« Nous nous imaginions que nous ne progressions pas tous au même rythme, mais nous avons eu la surprise de constater que si ! relève Laura Pho Duc, Transformation Executive Director chez LVMH Recherche. Mieux, nous nous posons tous les mêmes questions : sur la formation, la sécurité des données, les biais algorithmiques, l’impact environnemental… et sur le ROI, qui reste difficile à démontrer. »
Construite avec 80 experts issus de grandes entreprises (BPCE, Orange, LVMH Recherche, L’Oréal, Veolia, Carrefour, Michelin, Renault Group, SNCF Connect & Tech, RATP Dev, Suez, Back Market, Les Mousquetaires…) et plus de 200 répondants, l’étude « Trends of AI » parue hier analyse les cas d’usage de l’IA, fonction par fonction.
Les marketeurs en première ligne
Le marketing est de loin la fonction qui a le plus adopté l’IA : plus de la moitié des répondants (54%) utilisent l’IA pour la traduction de contenus et 47% l’utilisent aussi pour la génération et la déclinaison de contenus visuels. Un tiers des répondants utilise des outils d’IA afin de personnaliser ses communications clients.
Les agences ont-elles du souci à se faire ? Il semble que oui. En adoptant des outils d’IA, les entreprises « s’affranchissent d’une certaine dépendance à leurs prestataires. » « La moitié (46%) des experts du marketing souhaite renégocier les budgets de création avec les prestataires utilisant l’IA », indiquent les auteurs de l’étude.
Ce n’est pas la même chose en revanche pour les missions stratégiques : élaboration de nouvelles stratégies marketing, lancement de produits… « L’IA doit enrichir notre réflexion, pas la remplacer. Ne déléguons pas nos cerveaux ! », recommande Olivier Laborde, Head of Marketing, Innovation & Digital chez BPCE.
A la DAF, l’adoption des technologies d’IA reste « prudente, avec un taux de déploiement entre 13% et 16%, bien inférieur à celui du marketing. » Cependant, des cas d’usage comme la lutte contre la fraude ou la qualité des données sont des priorités majeures : 21% des répondants ont déjà déployé des solutions de détection et correction d’anomalies.
Vers un binôme IT x RH ?
Les cas d’usage RH incluent le recrutement, la formation, et la gestion de la marque employeur. 45% des répondants RH envisagent d’utiliser l’IA pour la préqualification de CV et un sondé sur quatre a déjà franchi le pas. 20% s’appuient sur l’IA pour la génération de documents.
« Les RH, tout comme l’IT, sont confrontés au sujet IA à double titre : dans l’exercice de leur propres métiers, mais aussi parce qu’ils interviennent en support des autres fonctions du groupe : ils ouvrent la voie, ils acculturent, ils forment, souligne Sébastien Denoual, associé chez KPMG France. Former un binôme IT-RH me semble franchement pertinent. »
Débats sociétaux
Côté IT justement, les cas d’usages associés à la cybersécurité sont les plus matures, ainsi que l’assistance à la programmation. 80% des DSI ont lancé des initiatives pour former les équipes à l’IA afin de diminuer les risques liés à l’utilisation de l’outil.
« On nous parle beaucoup de l’IA qui va absorber les tâches répétitives à faible valeur ajoutée, conclut Etienne Lecœur, cofondateur des EnthousIAstes. Mais ce qu’on nous dit moins, et j’ai été surpris de l’entendre régulièrement au cours de cette étude, c’est cela : “Si vous m’enlevez tout ce qui n’a pas beaucoup de valeur ajoutée, ça veut dire que je dois être 100% stratégique, toute la journée ? Mais vous privez mon cerveau d’oxygène, vous fabriquez une machine à burn-out…” J’apprécie que ces débats s’invitent dans notre étude. L’impact social de l’IA est très présent - et très légitime. »
A noter : une seconde édition est déjà lancée pour l’an prochain, pour apporter une vision dynamique et inclure progressivement d’autres fonctions de l’entreprise.