En 2022, Arnaud Malrin et Christophe Malrin se lancent dans la création d’une startup industrielle : Anod. Ils développent ensemble le premier vélo à assistance électrique hybride. La batterie qu’ils ont mise au point deux types de stockage d'énergie; des supercondensateurs et une batterie lithium miniature. Depuis la création de la société, ils ont réuni près de deux millions d’euros de financement (levée de fonds, subventions, dette…) et Anod compte une quinzaine de collaborateurs. Les premières livraisons de leur vélo hybride, conçu et fabriqué en France dans un premier site industriel en Vendée, auront lieu tout début 2025. 

Mais quelle est la particularité de ce duo ? Christophe Malrin, qui a fait carrière dans l’industrie et a dirigé plusieurs groupes, est le père d’Arnaud Malrin. C’est l’expérience du père alliée à la passion du fils pour le vélo et le design qui donne naissance à leur projet de vélo hybride et à Anod. Arnaud Malrin est PDG de la startup industrielle et Christophe, président du conseil de surveillance. Une séparation claire et nette qui fait leur force. 

Maddyness : Comment vous êtes-vous lancé dans ce projet ? 

Arnaud Malrin : Christophe Malrin dirigeait, il y a un groupe industriel, un groupe industriel qui fabriquent des supers-condensateurs. Nous nous sommes dit que nous pourrions développer une application dans la mobilité et notamment pour les vélos électriques. Dans le vélo, il y a deux systèmes de stockage d’énergie, une batterie et des supers-condensateurs. 

Je n’ai pas souvenir que l’un ait plus encouragé l’autre. C’était une évidence, on s’est dit, il y a un truc génial à faire, on y va ! 

Donc c'est plutôt l'innovation technique, en fait, qui vous a poussé à vous lancer sur ce produit. D'un côté, l'expertise technique et de l'autre, la passion pour en faire un seul produit.

Maddyness : C’est cette innovation technique mêlée à la passion qui vous a poussé à vous lancer ? 

Christophe Malrin : Passion, c’est un mot extrêmement important dans notre relation. Arnaud est passionné depuis son plus jeune âge par les beaux objets. De mon côté, j’ai l’expérience industrielle, l'innovation et la technologie. C’est effectivement Arnaud l’acteur majeur du projet. 

Arnaud Malrin : Dans ce type de projet, on ne peut réussir que si on répond à un besoin. Dans les premières réflexions, nous avons réfléchi à la technique, au projet industriel mais également au marché, au produit. Est-ce que notre solution répond à un vrai problème. 

Maddyness : Comment vous-êtes vous partagé les rôles ? 

Christophe Malrin : Nous avons travaillé ensemble plusieurs mois avant de créer la société et de lancer le projet. Arnaud avec son côté produit et marketing et l’intégration des nouvelles technologies et moi avec mon expérience industrielle puisque nous voulions concevoir et fabriquer le produit. Nous avons mûri le projet ensemble pendant plusieurs mois. 

C’est seulement que nous avons appuyé sur le bouton, lancé la société que nous avons défini les premiers rôles. Et nous avons clairement statué que Arnaud est le patron exécutif, c’est lui qui porte le projet. Moi je suis son conseil, son mentor, le président de la société. Il ne peut pas y avoir deux patrons, surtout dans cette relation père-fils. Il faut clarifier les rôles dès le début. 

Mon intensité d’investissement dans le projet dépend des phases. Arnaud, lui, est à 120% tous les jours et c’est normal, c’est lui le patron. De mon côté, c’est fluctuant, c’est Arnaud qui me sollicite pour tel ou tel sujet. Mais on s’appelle plusieurs fois par jour, surtout les premiers mois. 

Je suis président du conseil donc il y a des meetings, des reportings chaque mois… 

Maddyness : Comment présentez-vous votre relation à vos investisseurs ? 

Arnaud Malrin : Nous avons des investisseurs qui sont très bienveillants. Ce sont des business angels. Nous avons également réalisé une levée en crowdfunding avec Sowefund, un SPV a donc été créé à cette occasion et enfin nous avons une entreprise industrielle à notre capital. 

Les choses ont toujours été très claires pour nos investisseurs. Les rôles ont été bien définis dès le départ et de manière naturelle. Je n’ai pas le souvenir que nous ayons des discussions sur ce partage des rôles ni entre nous ni avec les investisseurs. 

Ce qui est génial avec cette association, c’est de pouvoir profiter de l’expérience, de l’envie, de l’énergie de chacun. Le fait que Christophe soit président du conseil de surveillance, c’est une chance géniale. Je vais pouvoir grandir et apprendre sur ces sujets de gouvernance avec beaucoup de confiance. Cela nous permet aussi d’insuffler tout de suite beaucoup de professionnalisme puisque Christophe connaît ces sujets parfaitement. 

Je pense que c’est rassurant pour les investisseurs de voir ces rôles très définis et que cette partie de gouvernance est gérée avec les bonnes actions mises en place dès maintenant.

Christophe Malrin : Nous avons un vrai projet industriel, nous ne fabriquons pas un logiciel mais un produit que l’on conçoit et fabrique. Chacun sait que l’industrie est un secteur difficile, mon expérience apporte une caution. C’est un gage pour les premiers investisseurs.

J’ai également un réseau auquel on fait appel qui permet à Arnaud d’être rassuré. J’ai également participé à tous les recrutements. 

Maddyness : En cas de conflit, comment arrivez-vous à le résoudre ? 

Christophe Malrin : Il y a eu des disputes, c’est vrai. Mais ce qui est clair, c’est que c’est Arnaud qui décide. Je peux exprimer mon avis mais c’est lui qui tranche. Sinon, on ébranle toute la structure de l’entreprise. 

Je lui apporte mon expérience mais c’est tout et c’est le mode de fonctionnement qu’on a mis en place dès le démarrage. 

Maddyness : Comment séparez-vous votre vie de famille, votre vie personnelle et votre vie professionnelle ? 

Christophe Malrin : Aucun problème ! Quand on est en famille je suis le papa, le grand-père et puis Arnaud est le fils, le tonton. On se dit qu’on discute 5 minutes de l’entreprise parce qu’on est ensemble mais c’est juste 5 minutes et après on n’en parle plus de la journée ! 

Arnaud Malrin : On est très famille ! J’ai deux sœurs dont je suis très proche. Quand on se réunit, on est très contents de se voir et on profite des instants ensemble. Quand on s’appelle pour le travail, cela n’empêche pas qu’à la fin, on se pose quelques questions personnelles. 

De même, c’est normal qu’il y ait des désaccords, chacun à sa vision et c’est aussi notre richesse. Nous sommes une famille très vivante, tous passionnés et engagés dans ce que nous faisons. Il y a du débat, de la confrontation d’idées, mais il n’y pas d’ego et c’est très important. À la fin, il n’y a qu’une chose qui compte, c’est la réussite du projet. 

Maddyness : Quels conseils donneriez-vous à des gens très proches qui voudraient se lancer ensemble : frère et soeur, parents ou mariés ? 

Christophe Malrin : Le meilleur conseil c’est de bien définir les règles de fonctionnement. Ensuite, je dirais de s’associer avec quelqu’un qui est à l’écoute. Il faut vraiment avoir cette capacité d’écoute de l’autre, comme Arnaud l’a souligné, il n’y a pas d’ego. 

Car si on rompt la confiance, on n’est plus dans le projet. Monter une startup, c’est quelque chose de dur. Donc avoir de la confiance et être bien en phase. 

Arnaud Malrin : Je suis 100% d’accord. Pour moi, la définition des rôles est capitale. Cela ne veut d’ailleurs pas dire qu’ils ne peuvent pas évoluer. Deuxièmement, c’est d’avoir un moteur. Savoir pourquoi on se lance dans un tel projet. Monter une entreprise, c’est compliqué. Le fait d’être avec un proche dans les phases plus ou moins facile peut permettre de se rappeler pourquoi on est là et de mieux appréhender les événements. 

Dire qu’on va avoir une séparation nette travail / vie personnelle, je n’y crois pas une seule seconde, d’autant plus si on vit avec son associé.