Lorsqu'on évoque le numérique responsable, on pense à l'écoconception des infrastructures numériques et l'utilisation d'énergies renouvelables, mais ces actions ne suffisent pas, à elles seules, à réduire significativement l'empreinte environnementale du numérique. Pourtant le chantier est réel, selon l’ADEME et l’Arcep le numérique pesait déjà 3,6 % des émissions mondiales en 2023 et pourrait doubler d'ici 2040 sans mesures correctives. "Le traitement de l'information en lui-même est un facteur déterminant de la consommation énergétique", explique Justine Bonnot, CEO de la startup WedoLow.
L’optimisation logiciel embarqué, un pas supplémentaire vers la sobriété
Visionnaire, cette ingénieure et docteure en informatique, s’est attaquée - dès ses travaux de thèse, récompensés par le prix i-PhD, premier volet des concours de l’innovation du plan France 2030 - à un défi majeur : réduire la consommation énergétique des logiciels embarqués comme ceux présents dans nos voitures, satellites et autres appareils connectés. Dès lors, soutenue par l'INRIA et l'IETR, Justine développe de nouveaux outils logiciels permettant aux développeurs d'optimiser l'efficacité énergétique de leurs applications tout en préservant leurs performances et crée en 2022 la startup WedoLow pour poursuivre le développement de ses solutions.
Fort de son succès avec des outils logiciels optimisés pour les systèmes embarqués dont le développement est assez avancé pour être commercialisé sous forme de licence, WedoLow étend désormais son expertise aux logiciels dont les traitements sont hébergés dans le cloud ou dans des datacenters par exemple.
"Notre nouvelle solution, BeLow Cloud, vise à réduire l'empreinte carbone des datacenters et des serveurs en ligne. En adaptant notre technologie à ces environnements spécifiques, nous ouvrons la voie à une optimisation énergétique à grande échelle du numérique. C'est un nouveau chantier qui demande beaucoup de recherche, mais qui promet un impact toujours plus important", explique Justine Bonnot, CEO de WedoLow.
i-Lab : une distinction tremplin
Un chantier qui en vaut la peine. Deux années de travail intense au regard d’un projet impactant ont été - jeudi 19 septembre à la Cité de la Musique à Paris - valorisées lors de la remise du prix i-Lab; un des trois concours d’innovation de l’État dans le cadre de France 2030 qui évalue et récompense les projets de recherche qui ont abouti à des développements spécifiques.
"Après avoir été révélé par i-PhD, i-Lab permet à BeLow Cloud de rentrer dans des réflexions sur les pré-séries, sur des tests en grandeur semi-réelle. C’est la certification qu’on est à une étape de pilote, capable de la preuve de concept et qu’on tend à la transformation en produit parce que l’on répond à des critères concrets", détaille Bruno Bonnell, multi entrepreneur spécialisé dans l’industrie du numérique et de la robotique et aujourd’hui secrétaire général pour l’investissement, chargé de France 2030.
Tout juste remporté, le concours i-Lab, organisé par l'État, joue déjà un rôle déterminant dans le développement de WedoLow. En remportant ce prix, la startup a bénéficié d'un soutien financier de l’Etat et d'une reconnaissance qui lui ont permis d'accélérer sa croissance et d'attirer de nouveaux talents. "Le soutien financier d'i-Lab est un accélérateur indispensable dans un secteur en pleine émergence. Lorsque nous avons lancé WedoLow, la question de l'empreinte carbone du numérique était marginale. Grâce à ce concours, nous avons acquis une reconnaissance qui nous ouvre des portes et nous permet d'attirer les talents dont nous avons besoin pour développer nos solutions à travers l'étude de langage de programmation complexes. Cette aide financière nous donne les moyens d'accélérer considérablement notre croissance et de conserver notre avance sur un marché désormais en constante évolution", explique la CEO de WedoLow.
Au-delà du financement, le label i-Lab est un véritable accélérateur de croissance. Comme le souligne Justine Bonnot : "Dès l'annonce des résultats, nous avons été sollicités par des investisseurs. Être lauréat i-Lab, c'est acquérir une reconnaissance immédiate et renforcer la crédibilité de notre projet. C'est la garantie d'avoir convaincu un jury d'experts de la pertinence de notre marché, de notre technologie et de nos innovations. Parce qu'aujourd'hui il y a un peu à boire et à manger dans le numérique responsable."
La décarbonation au coeur du plan
Des solutions, qui répondent tout particulièrement - comme le rappelle Bruno Bonnell - aux objectifs fixés par France 2030 : "Notre obligation légale est de consacrer 50 % du budget global de France 2030 à la réduction de l'empreinte carbone. Les indicateurs actuels montrent que nous sommes en voie d'atteindre cet objectif. Fort de ce constat, nous avons décidé d'élever nos ambitions en visant à améliorer notre santé à travers celle de l'environnement mais à répondre à la demande croissante des consommateurs qui veulent connaître et maîtriser leur impact, explique-t-il. Dans le domaine du numérique, cela se traduit par des initiatives telles que la mutualisation des infrastructures pour limiter la prolifération de serveurs et d'ordinateurs, l'exploitation du potentiel de l'informatique quantique pour optimiser les calculs, la valorisation de la chaleur générée par les centres de données pour alimenter d’autres réseaux, comme ceux des chauffages de ville, et enfin l'optimisation du traitement des données dans le cloud grâce à des solutions innovantes, telles que celles proposées par BeLow Cloud. Tout le monde court après ces piliers de l’économie énergétique dans le secteur du numérique. J’en veux pour preuve la récente annonce de Microsoft, qui prévoit de réactiver la centrale nucléaire de Three Mile Island en Pennsylvanie pour alimenter ses data centers."
Spécifiquement conçue pour réduire l'empreinte carbone des datacenters et des serveurs en ligne, la solution phare de WedoLow, BeLow Cloud, est particulièrement pertinente dans un contexte où la demande en capacité de calcul ne cesse d'augmenter, notamment avec le développement de l'intelligence artificielle et de l'Internet des objets. "Cette approche a été saluée par les experts qui composent le jury chargé d’examiner les dossiers", témoigne Bruno Bonnell.
Un avenir prometteur pour WedoLow
Et pour cause, avec BeLow Cloud, la proposition de valeur de la startup WedoLow est - de l'avis de sa fondatrice - bien plus aboutie que celles de ses concurrents. "BeLow Cloud ne se contente pas d'analyser les outils construits par les développeurs pour détecter les failles qui entraînent une surconsommation, explique Justine Bonnot avant de poursuivre, en effet, grâce à des mesures de la consommation d'énergie réalisées sur les serveurs avant et après optimisation, nos solutions sont en mesure de prouver leur efficacité de manière tangible. Les serveurs du CNES qui traitent les images satellites peuvent déjà en témoigner, ce qui a sans doute contribué à notre succès lors du concours. BeLow Cloud va même jusqu'à quantifier le gain écologique d'une modification du système, en prenant en compte des éléments matériels souvent négligés par les solutions existantes. De plus, il permet de résoudre automatiquement les problèmes en un simple clic", rappelle la CEO de WedoLow.
Avec ce nouveau produit, Justine Bonnot espère toucher non seulement les industries de l'automobile, du spatial et de la défense, mais aussi les développeurs individuels. "La subvention que nous avons obtenue va notamment nous permettre de mener une étude de marché approfondie afin de démocratiser au maximum l'utilisation de BeLow Cloud", conclut-elle.
Portée par l'impulsion du concours i-Lab de France 2030, WedoLow devrait s'imposer rapidement comme un leader de la sobriété numérique.