Ce n’est heureusement pas le cas de celui mené par la startup deeptech EX9 chez DHL, qui a débouché sur un partenariat fructueux et une industrialisation prochaine. La fondatrice de la startup Ksenia Duarte, nous a partagé ses clefs de succès.
Fondée début 2021 par Ksenia Duarte et son associé Enzo Salvatore - tous deux spécialistes des technologies de conduite autonome - la startup EX9, labellisée “Deeptech” par Bpifrance, déploie des robots tracteurs autonomes électriques destinés à automatiser les mouvements de semi-remorques et conteneurs sur les sites logistiques. Avantages ? Des flux optimisés, avec moins de pollution grâce à l’électrification de la flotte et des risques d’accident réduits pour les manutentionnaires. Le tout en apportant une réponse à la pénurie de main-d’œuvre dans le secteur, due à la pénibilité du travail routinier 24/7.
C’est après plusieurs mois d’échanges avec différents acteurs du monde de la logistique - routière, portuaire ou industrielle - que la startup a décidé de tester un premier cas d’usage de sa solution dans des entrepôts. Le géant DHL lui a en effet ouvert pour cela les portes d’un de ses sites à Mitry-Mory, à côté de l’aéroport Charles de Gaulle.
Cet entrepôt alimentaire, opéré par le logisticien pour le compte du distributeur Metro, n’a pas été sélectionné au hasard : il a été choisi pour la diversité des types de chargements et des marchandises qui y circulent.
Avec environ 200 mouvements de camions par jour, en entrant ou sortant, près de 30 opérations de “préchargement” y sont opérées quotidiennement.
“Valider l'intérêt pour un grand logisticien de déployer notre solution”
« L'objectif était double : d’abord, de valider l'intérêt pour un grand logisticien de déployer notre solution. Et ensuite, voir comment faire pour être plus rapidement opérationnels et efficaces, en vue d’un déploiement industriel », explique Ksenia Duarte. Deux objectifs largement atteints, puisqu’à l’issue de ce test, mené pendant un peu plus d’un mois en conditions réelles, DHL a rapidement souhaité aller plus loin avec une lettre d’intention marquant son ambition d’équiper 10 % de ses sites en Europe avec la solution industrielle.
Sur un site comme celui de Mitry-Mory, l’automatisation apportée par EX9 permet d’augmenter le préchargement (+20 %) et de réduire les temps d’attente des conducteurs de camions, tout en accélérant les cycles de rotation en livraisons de magasins. La startup a fait le calcul : une plateforme logistique qui déploierait dix de ses robots-tracteurs autonomes pourrait bénéficier d’économies de l’ordre de 1,5M€ et de réduction d’environ 500 tonnes de gaz à effet de serre sur 3 ans.
“Des demandes arrivent presque toutes les semaines du monde entier”
Ce succès avec DHL a servi de catalyseur pour le développement d'EX9. La startup a pu capitaliser sur cette réussite pour attirer l'attention d'autres acteurs majeurs de la logistique et de l'industrie, notamment à l’occasion du CES 2024, où la startup était présente dans la délégation de la région Ile-de-France ou encore à VivaTech à Paris. Ksenia Duarte explique ainsi que désormais, "des demandes arrivent presque toutes les semaines du monde entier, avec de très grands groupes qui nous contactent en direct."
Bootstrappée jusqu’à présent, EX9 préfère ne pas disperser ses efforts. Elle se concentre plutôt sur son activité en Europe et sur la phase suivante de son développement - le passage à l’échelle - avec le bouclage d’une première levée de fonds d’ici fin novembre. La startup est actuellement en discussion pour de nouveaux sites pilotes en France et en Europe avec différents acteurs du secteur - logisticiens, distributeurs et marques industrielles - afin de valider d’autres cas d’usage et déployer en opérationnel. « Nous sommes fiers d’avoir été soutenus par DHL, qui a contribué à notre progrès sans aucune exclusivité, car nous cherchons à créer la solution la plus réplicable possible », précise la cofondatrice.
“Le sujet a réussi à fédérer un peu tout le monde”
Alors que la majorité des POC échouent, comment expliquer le succès de ce pilote avec DHL ? « Nous avons beaucoup travaillé en amont du test sur le business case et les KPIs, sur les bénéfices visibles et cachés de l’automatisation, sur l’alignement des différents acteurs au sein du groupe, aussi bien au niveau opérationnel que stratégique, puis nous avons avancé ensemble, sur les process, les besoins opérationnels en lien avec les systèmes d’information, la formation des équipes… » , souligne la cofondatrice d’EX9, qui indique aussi avoir « visité beaucoup de sites en France et à l’étranger avant de fixer le premier pilote à Mitry-Mory ».
Autre point clé : « le sujet a réussi à fédérer un peu tout le monde, les gens du groupe comme les équipes sur le terrain. Il y avait une vraie volonté de collaborer et d’apprendre. C’était win-win, il n’y avait pas de rapport de force », ajoute Ksenia Duarte. Et ce, des deux côtés : « de notre côté, nous avons toujours eu la volonté d’embarquer des clients dans nos projets. Nous ne sommes pas une startup qui fait les choses dans son coin. On pense d’abord au client, à sa problématique, à la réalité “terrain” et ensuite on développe du besoin, en mode agile. »