Après le «fantasy football» qui a rencontré un fort succès grâce à des plateformes comme Sorare et Mon Petit Gazon, le «fantasy tennis» va-t-il connaître un succès similaire ? C’est en tout la conviction de Jean Matias et Romain Boudré, les fondateurs de Fungiball.

Derrière ce nom, se cache une plateforme permettant aux fans de tennis de collecter des cartes NFT de leurs joueurs préférés pour s’affronter dans des tournois où les performances réelles de ces derniers détermineront leurs chances de succès. En effet, les cartes intègrent des compétences comme la puissance, le service, le retour et le mental. Celles-ci sont réévaluées chaque semaine en fonction des résultats réels des joueurs dans les tournois qu’ils disputent, ce qui permet d’allouer un score allant de 0 à 100. Les cartes sont réparties selon trois niveaux de rareté : unique, or et argent.

«Dans quelques années, on verra des gamers gagner plus d’argent que des traders»

Si le concept n’est pas forcément nouveau, au vu du succès de Sorare dans le monde du football, les fondateurs de Fungiball ont fait le choix de se concentrer sur le tennis, sport mondial par définition avec un circuit qui s’exporte aux quatre coins de la planète onze mois sur douze chaque année. «Je suis un grand passionné de Web3. Je crois beaucoup en cette technologie, car elle peut apporter beaucoup de choses au niveau mondial, et notamment au sport. Étant un grand passionné de tennis, j’y ai vu un intérêt pour l’écosystème de ce sport. J’avais envie de créer un jeu le plus immersif possible pour les fans de tennis et que celui-ci permette de générer des revenus pour les joueurs qui en ont besoin d’argent, notamment ceux classés au-delà de la 200e place mondiale», raconte Jean Matias, co-fondateur et CEO de Fungiball. Avant d’ajouter : «Le fait de détenir des actifs dans un jeu, c’est une révolution. Cela va créer une nouvelle économie. Dans quelques années, on verra des gamers gagner plus d’argent que des traders.»

Avec cette idée en tête, l’entrepreneur a lors tenté de convaincre les stars de rejoindre son projet. Mais il n’a essuyé que des refus dans un premier temps. «Il y avait très peu d’ouverture. Je suis donc allé voir des joueurs moins bien classés, autour de la 500e place mondiale, et j’ai commencé à signer des contrats avec eux. Assez vite, 50 joueurs ont rejoint l’aventure, et je me suis retrouvé aux portes du Top 100 mondial. A partir de ce moment-là, j’ai mis toutes mes économies dans le projet», explique-t-il.

«Façonner le tennis de demain»

Pour prouver que la viabilité du projet, Fungiball a organisé sa première vente exclusive de cartes en mai dernier. De quoi éveiller l’intérêt des passionnés de la petite balle jaune, mais aussi celui des plus grands stars du circuit ATP. Ces derniers mois, des champions, comme Alexander Zverev (3e mondial) et Daniil Medvedev (5e), ont ainsi rejoint la plateforme, devenant même des ambassadeurs officiels de cette dernière. «J'adore le concept de la plateforme qui apporte une énergie nouvelle et de l'innovation à notre sport et offre également aux jeunes joueurs la possibilité de gagner des revenus supplémentaires», salue le Russe, vainqueur de l’US Open en 2021.

Avec deux grands noms du tennis, la société va bénéficier d’un tremplin considérable pour gagner en visibilité et ainsi monter rapidement en puissance dans son développement. «Alexander Zverev et Daniil Medvedev ne se contentent pas de prêter leur nom. Ils s'impliquent fortement pour nous aider à façonner le tennis de demain. Grâce à leur soutien, nous bénéficierons d’une crédibilité inégalée dans cet univers pour tisser des relations étroites avec les tournois et les marques», se réjouit Jean Matias.

Une levée en pré-seed de 2,2 millions d’euros avant un autre tour de table en 2025

Fungiball a passé plusieurs étapes importantes cette année. La startup a notamment conclu un partenariat inédit de cinq ans avec la PTPA (Professional Tennis Players Association), organisme autonome par rapport à l'ATP et à la WTA fondé par Novak Djokovic et Vasek Pospisil. De quoi offrir à la société un accès à 250 joueurs professionnels et envoyer un signal fort sur le marché. «Nous avons déjà plus de 300 joueurs professionnels sur la plateforme au total (entre 40 et 50 % du Top 100, 6 joueurs du Top 10 et 3 joueuses du Top 10). Il est donc quasiment impossible pour un acteur de venir sur ce marché avec autant de joueurs chez nous», analyse Jean Matias. Pas même pour Sorare, qui a levé plusieurs centaines de millions de dollars ? «La question à se poser, c’est pourquoi ils ne se sont pas déjà positionnés sur le tennis ? Le marché a été difficile en 2022 et en 2023, toutes les structures ont dû se refocaliser sur leur activité principale. Aujourd’hui, nous sommes les leaders sur le tennis. Sorare a d’autres soucis à gérer de son côté», observe-t-il. En effet, la licorne tricolore a notamment réduit son équipe américaine plus tôt cette année pour se recentrer sur Paris. Et ce malgré une série B vertigineuse de 680 millions de dollars en 2021 qui avait propulsé sa valorisation à 4,3 milliards de dollars.

De son côté, Fungiball est encore très loin de ces considérations financières. La jeune pousse annonce aujourd’hui une levée de fonds en pré-seed de 2,2 millions d'euros réalisée auprès de business angels privés, dont Adrien Dassault, le petit-fils de l'industriel français Serge Dassault. Cliff Capital et Bpifrance ont également apporté leur soutien dans le cadre de cette opération.

Celle-ci doit permettre d’étoffer la plateforme avec de nouvelles fonctionnalités, en intégrant des modes free-to-play et des options de paiement supplémentaires. Car si le jeu est disponible en bêta-test depuis avril, ce n’est que dans les prochains mois qu’il va être pour de bon dévoilé au grand public. A ce jour, Fungiball revendique plus de 5 000 utilisateurs actifs. «On vise une hausse de 10 000 à 15 00 utilisateurs d’ici le premier trimestre 2025, notamment avec les modes free-to-play. On veut proposer le jeu le plus fun possible, mais le coût moyen dépensé par utilisateur est assez élevé», reconnaît le CEO de la société.

Si la plateforme compte 75 % d’utilisateurs français à l’heure actuelle, les dirigeants souhaitent rapidement gagner du terrain en Amérique du Nord et en Europe, notamment dans des pays friands de tennis comme le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Espagne et la Serbie, mais aussi en Australie, en Amérique du Sud (Argentine, Brésil…) et en Asie (Chine, Japon…), où le tennis se développe de plus en plus.

Devenir une plateforme de référence dans le tennis au-delà du gaming

Cependant, Fungiball veut devenir bien plus qu’un jeu de «fantasy tennis» à l’avenir. «Notre objectif à moyen terme, c’est de devenir la plateforme de référence du tennis, aussi bien sur le gaming que sur l’actualité de ce sport. J’ai envie de moderniser le tennis. Quand je vois l’ATP qui bloque les vidéos postées par d’autres utilisateurs sur les réseaux sociaux, je trouve que c’est le meilleur moyen de tuer la médiatisation du tennis. On veut changer ça», assure Jean Matias. De fortes ambitions qui nécessiteront un nouveau tour de table prochainement ? «On a l’ambition d’aller chercher des fonds en 2025. Des fonds d’investissement à nos côtés seront utiles pour se développer, notamment en allant chercher des top-players. Car aller chercher les licences des meilleurs joueurs, c’est aussi du marketing», souligne le patron de la plateforme.

Cette dernière est également en négociations avancées avec les principales fédérations de tennis pour enrichir l’expérience proposée aux fans. Fungiball souhaite d’ailleurs leur offrir la possibilité à plus long terme d’accéder à des rencontres exclusives avec les stars du tennis et des accès VIP à différents tournois. Avec l’aide de la blockchain, c’est tout un sport qui pourrait être révolutionné aux yeux des dirigeants de Fungiball.