La crise n’est pas terminée, et cela risque de rester compliqué dans les prochains mois pour l’écosystème tech. France Digitale publie avec EY son baromètre sur la performance économique des startups et fonds de capital-risque français. Les prévisions ne sont pas au beau fixe : les financements sont de plus en plus difficiles à aller chercher côté VC. Pour 46 % d’entre eux, lever des fonds est le premier défi à relever, particulièrement auprès des LPs européens.
Côté startups, les deux premiers challenges cités sont «lever des fonds», 32 %, et «contractualiser avec des clients privés ou publics», 30%. Pourtant, les startups ont levé 8,3 milliards d’euros l’an passé. Sur la première partie de l’année 2024, elles ont déjà récolté 4,3 milliards d’euros. Montant moyen par opération : 10,3 millions.
«Si on y regarde de plus près, les bons chiffres sont portés par quelques méga-levées de fonds, et les tours de financement inférieurs à 100M€ décélèrent, aussi bien en montant qu’en nombre d’opérations», souligne l’étude. C’est à partir de la série B que les jeunes pousses ont du mal à boucler leurs roadshows. 16 % des startups françaises ont renoncé à leurs levées de fonds cette année. Beaucoup ont également fait le choix de se concentrer sur l’atteinte de la profitabilité, une nécessité aujourd’hui.
L’urgence de la profitabilité pour les startups
80% des startups sont déjà rentables ou ambitionnent de l’être d'ici les trois prochaines années. Dans leur stratégie pour les prochains mois, 18 % des startups placent la recherche de la profitabilité en haut de la liste, devant la réduction des coûts externes et l’accélération du développement. Pourtant, les startups restent des entreprises en (hyper)croissance. Le chiffre d’affaires global a augmenté de 27 % entre 2022 et 2023, passant de 7,85 milliards d’euros à presque 10 milliards. La majeure partie de ce chiffre d’affaires global est réalisée en France. Seules les plus grosses scaleups réalisent la partie la plus importante de leurs chiffres d’affaires à l’étranger, en Europe pour un tiers.
Autre indicateur : l’emploi. 200.000 emplois directs et indirects ont été créés dans les douze derniers mois. En 2024, les startups françaises représentent 1,3 million d’emplois. Mais les prévisions pour l’année à venir sont à la baisse. 40.000 postes internes aux jeunes entreprises devraient voir le jour dans les douze prochains mois, soit 10.000 de moins sur un an. C’est, sans surprise, l’industrie du logiciel qui en génère le plus avec une hausse de 7 %. 86 % des startups prévoient d’embaucher dans l’année, un chiffre en baisse de 6 points.
Des levées plus difficiles pour les VC
«Le marché semble bloqué», relève France Digitale à propos des levées de fonds. La crise du financement frappe désormais les fonds de capital-risque. Les VC se heurtent à une rareté de liquidités, et beaucoup doivent désormais provisionner des fonds pour suivre leurs investissements. Deux tiers des VC ont déjà déployé 40 % de leurs fonds. Près de la moitié des fonds d’investissement réservent 20 à 40 % de leur financement pour des startups déjà en portefeuilles. 50 % des fonds d’investissement VC français ont moins de 250 millions d’euros sous gestion. La porte se ferme petit à petit pour de nouveaux projets.
D’autant plus que les VC français, assez jeunes puisque un quart ont moins de 5 ans, restent dépendants des LPs français. Pour la grande majorité d’entre eux, l’argent français représente 80 % de leurs fonds. Et les trois quarts des sociétés de gestion en capital-risque n’ont aucun LPs des EMEA ou encore d’Asie, d’Océanie et d’Amérique du Sud.
L’irruption de l’IA dans les process internes
L’intelligence artificielle devient un véritable levier de compétitivité pour les startups françaises. Selon le baromètre, 77 % d’entre elles considèrent les innovations de rupture, comme l'IA générative, comme des opportunités majeures pour leur croissance. Cependant, elles doivent faire face à la concurrence acharnée des grands acteurs, qui bénéficient souvent d'une position dominante.
L’intégration de l'IA ne se limite pas aux produits et services offerts par les startups. En interne, elle est de plus en plus utilisée pour automatiser des tâches, améliorer la gestion des clients, et optimiser les processus de recrutement ou de marketing. Elles sont 67 % à l’avoir intégrée dans leurs outils tech et 43 % dans leurs outils marketing et sales. La fonction RH reste en retrait avec seulement 13 % des jeunes pousses qui l’utilisent. L’usage de l’intelligence artificielle sera un avantage important pour les startups dans les mois à venir, leur permettant des économies de productivité probablement décisives.