La loi Anti-Gaspillage pour une Économie Circulaire (AGEC) fête ses quatre ans. Depuis sa création, sa mission est la même : la réduction de nos déchets pour parvenir collectivement à baisser notre empreinte carbone. Pour ce faire, elle a identifié des objectifs clairs, la réduction des emballages plastiques à usage unique et la suppression pure et simple des emballages plastiques « inutiles » d’ici à 2050 par exemple. De nombreux acteurs de terrain - éco-organismes, associations, entreprises, investisseurs - sont déjà mobilisés pour accompagner cette mise en marche.
Parmi eux, la filière du réemploi, qui œuvre pour le remettre à sa juste place dans la gestion des emballages, avant le recyclage et la revalorisation des déchets. Et qui lutte, doucement mais sûrement, contre les réticences du « monde d'avant », avec la démocratisation de solutions simples. La consigne pour réemploi, abandonnée en France il y a 40 ans et peu à peu remise au goût du jour, en est un bon exemple.
Les chiffres ne mentent pas : la mise en place d’un système de consigne durable et global représente ainsi la fin de 36M de bouteilles plastiques consommées chaque jour, 5 % d’émissions de CO2 liées uniquement à la boisson dont ⅓ à l’emballage, et des poubelles divisées par trois (!). En outre, consigner permet à tout un chacun d’être acteur de sa consommation, en évitant la contrainte puisque chaque centime investi est récupéré, et que le geste est maintes fois récompensé. Une étude de 2019 montrait déjà que les Français sont prêts à réemployer puisque 88 % d’entre eux se montraient favorables au réemploi des bouteilles et emballages.
Les systèmes de consigne, partout où ils vont, ne cessent de démontrer leur potentiel écologique et anti-inflationniste : les retours d’expérience de nos voisins européens (Irlande, Roumanie, Allemagne …) prouvent que le réemploi est clé dans la lutte contre l’usage unique.
Pourtant, une poignée de collectivités et d'industriels présentent encore front uni contre la consigne, en avançant divers arguments … dont aucun n’est écologique. Nous serions trop attachés à notre poubelle jaune, deviendrions dépendants des lobbys de la boisson. Des arguments fallacieux quand, en réalité, c’est notre système de tri qui est aujourd’hui inefficace et trompeur. En effet, environ 70 % du plastique que nous jetons ne sera jamais réellement recyclé, mais incinéré ou enfoui, à côté de chez vous où à l’autre bout du monde. Du verre, entièrement neuf, à hauteur de 6.000 tonnes par jour sera broyé, fondu puis réintroduit, consommant au passage des quantités astronomiques d’eau, d’énergie et de CO2. Il devient donc primordial de remettre le cycle du réemploi avant celui du recyclage - aussi bien politiquement que financièrement - et ce pour l’intérêt de tous.
Pour cela, il faut d’abord créer une prise de conscience générale autour de l’ensemble des impacts de l’industrie du réemploi : création d’une vraie filière industrielle française favorisant notre souveraineté et le contrôle de nos ressources, création de nombreux emplois locaux, non délocalisables … Notre cadre réglementaire, nécessaire mais pas assez ambitieux, n’est plus suffisant. Nous avons besoin d’engagements beaucoup plus forts, dès aujourd’hui. Qu’attendent les pouvoirs publics pour une démarche plus ambitieuse, ralentie seulement pour une poignée de réticents ? Les contenants ont de la valeur, et le réemploi n’est pas qu’une tendance, mais bien une solution de fond, fin prête à s’ancrer dans nos habitudes.
Nous appelons de nos vœux une prise de conscience imminente de la part du gouvernement, un nouveau cadre réglementaire, ainsi que des investissements conséquents. Nous avons besoin d’engagements plus forts pour lutter contre le réchauffement climatique, comme l’inscription du réemploi comme priorité économique dans les prochaines lois de finances.