Le business model de la startup dans laquelle j'investis va-t-il être disrupté par l'intelligence artificielle ? Un nouvel outil IA risque-t-il de la remplacer ? Est-ce que je fais bien d’investir ? Autant de questions d’actualité, entendues par Jean-Charles Chevalier, co-directeur M&A de BearingPoint Capital, auxquelles une due diligence tech pourrait répondre. Certains fonds ont en effet pour habitude de se tourner vers ces audits approfondis, qui s’intéressent à la viabilité technologique d’une startup.
Pour Axa Venture Partners (AVP), la due diligence tech est systématique. Comme l’ensemble des due diligences traditionnelles (financière et légale, notamment), elle est réalisée après la signature de la term sheet et avant la décision finale d'investir. L’objectif est de « vérifier que ce qu'on a vu pendant le process d'investissement s’apparente à la réalité de la société, qu’on ne nous a rien survendu », précise François Robinet, fondateur et managing partner.
La due dil’ tech pour estimer si la technologie a de la valeur
Plus spécifiquement, l’intérêt de la due dil tech est « d’estimer si la technologie développée par la startup a de la valeur », indique Céline Passedouet, investment director du fonds Elaia, qui réalise plutôt ces analyses en interne. « On est tous ingénieurs dans l'équipe, on aime donc beaucoup creuser ces sujets-là, poursuit-elle. On fait appel à des cabinets plus ponctuellement, lorsqu’on sent qu'il va y avoir une scalabilité très rapide pour être sûr que la la startup tienne bien la charge. »
BearingPoint Capital est l’un de ces cabinets. « Si l’on synthétise, on peut dire qu'il y a quatre éléments principaux à évaluer : la maturité et la scalabilité du software, la compétence et l’expérience des équipes tech, les aspects de sécurité, y compris cyber et de compliance, et le réalisme des investissements prévus en lien avec le business plan, énumère Jean-Charles Chevalier. En complément, sur le volet financier, on va notamment s’intéresser au sujet de la dette technique, en se demandant si le software développé à date va demander des travaux de réécriture par exemple. Si tel est le cas, l’impact pourra se faire sentir sur la valeur de la transaction. »
La scalabilité en ligne de mire
Concrètement, une due dil tech débute par une analyse documentaire. Le business plan, la roadmap de développement de l'application, les schémas d'architecture, les contrats d'hébergement, les schémas d'organisation de l'équipe technique sont notamment consultés. « C'est le point de départ, indique Jean-Charles Chevalier. Puis, nous organisons en parallèle entre deux et trois ateliers de travail avec, d’une part, l'équipe dirigeante pour comprendre la stratégie, le business plan, le produit, les clients, et d’autre part, les équipes techniques afin de développer l’analyse sur le software. En tout, cela peut aller d’une semaine d’audit pour les plus petites structures à trois ou quatre semaines pour les plus importantes. »
« Tout cela nous permet de comprendre si la société peut sereinement scaler, explique Céline Passedouet, qui estime que le prix de ces due dils tech varie entre 3.000 et 5.000 euros. C'est important pour nous qui investissons en pre-seed et en seed. Il y a alors peu de clients, mais il faut que la technologie tienne lorsqu’il y en aura beaucoup plus les années suivantes. Les startups dans lesquelles nous investissons étant à forte valeur technologique, nous attachons également beaucoup d’importance à la cybersécurité et à la sécurisation des données. On ne peut pas se permettre d'investir dans un projet qui est un peu bancal sur ces sujets car ils seront valorisés lors des prochains tours ou au moment de l'exit. »
Enfin, la session de relecture de la due dil offre l’occasion aux investisseurs et à l’équipe dirigeante, souvent conviée, d’échanger et d’identifier d’éventuels axes d’amélioration. « Si quelque chose nous gêne vraiment, sur la sécurité par exemple, on demande que ce soit réglé avant le closing, raconte François Robinet, managing partner d’AVP. Si c'est important, mais que ça met un peu de temps à être mis en place, ça va être une condition post-closing contraignante. Des suggestions de plan d'action peuvent aussi être formulées. Généralement, les sociétés trouvent cela très utile. »