A la veille de l’ouverture de VivaTech, l’écosystème français de l’intelligence artificielle voit débarquer un nouvel acteur de taille. Il s’agit de la startup H, qui veut mettre au point des modèles d’IA d’un nouveau genre. Celle-ci débarque sur le marché en grande pompe puisqu’elle annonce une levée de fonds d’amorçage… de 220 millions de dollars !
Pour cette opération, la société a pu compter sur le soutien de Xavier Niel, fondateur d’Iliad, d’Eric Schmidt, l’ex-PDG de Google, de Bernard Arnault, le patron de LVMH via la société de capital-risque Aglaé Ventures, ou encore de Yuri Milner, entrepreneur israélien d'origine russe qui a misé sur Airbnb, Spotify, Meta et Stripe avec son fonds DST Global. On retrouve également les fonds Accel, Eurazeo, FirstMark, Elaia et Creandum, ainsi que Bpifrance, Motier Ventures, family office des propriétaires des Galeries Lafayette, et Visionaries Club. Les géants de la tech que sont Amazon et Samsung complètent ce panel pour ce tour de table XXL, aux côtés d’UiPath, entreprise roumaine spécialisée dans l’automatisation de processus par la robotique (RPA).
Deux Français parmi les fondateurs
Si autant d’investisseurs de renom ont décidé de miser sur cette jeune pousse d’IA, c’est parce qu’elle est le fruit de l’imagination d’anciens chercheurs de Google DeepMind, la branche de la firme de Mountain View spécialisée dans l’IA. Parmi eux, on retrouve les Français Laurent Sifre, qui a travaillé sur le programme AlphaGo et Gemini, et Julien Perolat, expert de la théorie des jeux et de l'apprentissage par renforcement multi-agents (jeux de champ moyen, apprentissage basé sur la population). Karl Tuyls et Daan Wierstra, deux membres phares de l’équipe de Google DeepMind, ainsi que Charles Kantor, issu de l’université américaine de Stanford, complètent le casting. C’est ce dernier qui est à la tête de la société créée fin 2023.
En début d’année, des premières rumeurs, faisant part notamment du départ de Laurent Sifre des rangs de Google DeepMind pour créer une startup d’IA à Paris et lever plus de 200 millions de dollars, avaient commencé à émerger. C’est désormais une réalité. La société H, faisant référence à son nom de code initial Holistic, compte actuellement une équipe de 25 ingénieurs et chercheurs en IA. Celle-ci se fixe pour objectif de développer des modèles multimodaux, spécialisés sur l'action, de manière à introduire l’IA générative dans les entreprises du monde entier.
Faire un pas décisif vers l’IA générale
H ambitionne ainsi de créer des modèles «pour augmenter la productivité des salariés», annonce d’ailleurs l’entreprise sur la page d’accueil de son site web. «L'équipe est unie autour d'une mission tout aussi simple qu’ambitieuse : faire progresser la productivité de milliards de personnes. Nous sommes déterminés à transformer des secteurs entiers ainsi que nos expériences quotidiennes, en faisant du tandem homme-ordinateur une réalité, et ouvrant la voie à une intelligence plus générale et plus complète», précise Charles Kantor, co-fondateur et CEO de H.
A l’aide de ses modèles de fondation d’action, la startup entend en effet faire un pas décisif vers l’AGI (intelligence artificielle générale), qui serait capable de prendre des décisions de manière totalement autonome en prenant en compte son environnement. Pour l’heure, H préfère évoquer le terme d’IA agentique pour décrire ses travaux. Dans ce cadre, la société entend s’appuyer sur son tour de table initial pour se doter des puissances de calcul et des données nécessaires aux percées dans le domaine des modèles agentiques.
La création de H vient confirmer la statut de Paris en tant qu’épicentre mondial de l’IA, puisque la jeune pousse rejoint un bassin de startups composé notamment de Mistral AI, devenue une licorne en un temps record, avec une première levée de fonds de 105 millions d’euros en juin 2023, puis une deuxième de 385 millions en décembre dernier. On peut également citer le laboratoire Kyutai, créé sous l’impulsion de Xavier Niel et doté d'une enveloppe de 300 millions d'euros, ainsi que Dust, entreprise lancée par deux anciens d’OpenAI et d’Alan, ou encore Poolside, startup américaine qui s’est relocalisée à Paris l’an passé.