Pourquoi avoir recours à une valorisation entre deux tours ?
- Faire un bridge : en equity ou sous forme d’instrument dilutif, une valorisation précise est cruciale pour déterminer la dilution des actionnaires.
- Distribuer des BSPCE / BSA : ces incitations sont souvent utilisées pour attirer et fidéliser les talents. La valeur de l’action permet de fixer le prix d’exercice des BSPCE / BSA. Les bénéficiaires doivent s’acquitter de leur prix de souscription, calculé en fonction de la valeur de l’action ordinaire
- Faire entrer un nouveau dirigeant associé : entre deux tours, de nouveaux investisseurs peuvent entrer en jeu et vont naturellement vouloir connaître la valeur de ce qui leur sera accordé et la répartition entre les dirigeants actionnaires existants et les nouveaux venus.
- Opérations secondaires : certaines situations peuvent nécessiter des opérations secondaires, comme le rachat d'actions d'anciens investisseurs ou d'employés. Une valorisation précise est essentielle pour déterminer le prix équitable de ces transactions.
- Mener des opérations de M&A : dans le cas où une partie du prix d’acquisition est payé en actions, la valorisation est cruciale pour établir la valeur de l’action et pour déterminer si cette dernière est relutive.
La valorisation entre deux tours de financement s’avère donc indispensable dans de nombreuses situations courantes de la vie d'une entreprise en croissance. Il est essentiel de réaliser une telle valorisation en cohérence avec celle de la dernière (voire de la prochaine) levée de fonds, tout en mettant en place une méthodologie aussi efficace et adaptée que possible.
Les principales méthodes de valorisation
La valorisation des startups entre deux tours peut être réalisée selon diverses méthodes en fonction des situations.
Si on considère que la valorisation du dernier tour est juste, il est alors possible d'estimer ultérieurement la valeur de l'entreprise en se référant à l'évolution moyenne de la valeur des entreprises comparables (en termes de taille et de secteur d'activité) entre deux tours de financement similaires. La profondeur des données dont dispose l’évaluateur est alors essentielle. Il peut également s’avérer nécessaire de tenir compte d’évolutions spécifiques (ex. accord commercial, brevet déposé, etc.) et de faire appel à un tiers de confiance objectif pour obtenir un accès direct à des comparables continuellement mis à jour, ce qui réduit les biais liés à la volatilité du marché.
Dans le cas contraire, il faudra déterminer la valeur de l'entreprise en se fondant sur ses caractéristiques intrinsèques et non sur des comparaisons externes. Seront alors utilisées la méthode des comparables de marché, DCF ou la méthode patrimoniale fondée sur la valeur des actifs de l’entreprise. Ces méthodes appliquées à de jeunes entreprises en croissance peuvent avoir leurs limites, la prévision des flux de trésorerie futurs pouvant être incertaine.
Une fois la valeur de l’entreprise arrêtée, l’étape suivante consiste à déterminer la valeur des différentes catégories d’actions selon les besoins (notamment les actions ordinaires). Cela suppose de modéliser le « waterfall » prévu au pacte d’actionnaire, c’est-à-dire le mécanisme de répartition des produits de la vente de l’entreprise. Pour la plupart des startups, celui-ci crée des optionalités selon les classes d’actions car la répartition entre ces classes d’actions comporte des préférences. Il est alors nécessaire d’utiliser des méthodes optionnelles, au risque sinon de sous-estimer la valeur des actions de dernier rang comme les actions ordinaires (et surestimer celle des autres classes d’actions).
Une autre approche peut être considérée, celle qui consiste à utiliser un modèle de diffusion sur une période donnée. Un exemple d’application porte sur la détermination de prix d’exercice de BSPCE : une valorisation est menée sur la base de l’horizon de cession de l’entreprise ou exercice des BSPCE et la valorisation de chaque action est ensuite déterminée par analyse de waterfall. Un tel modèle nécessite d’estimer des paramètres déterminants comme la volatilité théorique de la valeur de l’entreprise, ou encore de tenir compte du caractère illiquide des actions selon les dispositions du pacte et l’horizon de cession par exemple. Dans ce cas également, la profondeur et la capacité d’analyse des données de l’évaluateur est clé.
Ajuster les variables de valorisation selon la situation de la société
La situation spécifique de la startup peut conduire à un ajustement des variables de valorisation, lorsque la valorisation du dernier tour ne fournit pas un cadre suffisamment objectif et qu'il convient de conduire une valorisation indépendante. Deux éléments en particulier vont entrer en jeu : la solidité des performances de la société associée à la crédibilité de son business plan et son degré de tension sur la trésorerie, qu’il soit lié au cash burn ou à une dette à honorer.
Si la startup atteint ses objectifs de développement conformément à son business plan, cela peut conduire à une valorisation plus élevée, reflétant la croissance et la performance attendues.
Dans le cas où la croissance est plus lente que prévu mais qu'il n'y a pas de tension significative sur la trésorerie, une valorisation modérée peut être justifiée pour refléter cette réalité.
Si la startup fait face à des difficultés de trésorerie, cela peut entraîner une valorisation plus basse, car les investisseurs prendront en compte le risque accru associé à ces défis financiers.
En conclusion, valoriser une startup ou ses différentes classes d’actions entre deux tours de financement est une étape cruciale pour assurer sa croissance, attirer les talents et maximiser sa valeur. En utilisant les bonnes méthodes de valorisation et en tenant compte des circonstances spécifiques de l'entreprise, les fondateurs peuvent positionner leur startup de manière optimale pour réussir sur le long terme.