« Il y a deux types de fonds, ceux qui sont structurés pour aider les participations dans leur recrutement et ceux qui les laissent gérer », introduit Samuel Tamagnaud, fondateur du cabinet de recrutement Morgan Philips. Épopée Gestion fait partie de la première catégorie. « Chez Épopée Gestion, l’accompagnement opérationnel de nos startups fait partie de notre ADN, et le recrutement est un des sujets clé », avance Perrine Albrieux, qui pilote l’équipe accélération en charge de cet accompagnement.
Dans ce fonds, l’accompagnement au recrutement se matérialise de plusieurs façons. En amont, le fonds peut aider les startups à définir leurs besoins et leur proposer des benchmarks opérationnels. Ensuite, il les accompagne pour identifier les bons profils. « Au fil de l’eau, nous constituons un vivier de profils qualifiés. Il est alimenté par le réseau Épopée Gestion et par des profils qui nous contactent proactivement car ils veulent rejoindre nos startups. En fonction des besoins, nous établissons ensuite les connexions, en allant piocher les bons profils parmi ce vivier », explique Perrine Albrieux. « Nous avons également référencé un certain nombre de cabinets et de plateformes de recrutement partenaires que les startups peuvent contacter », ajoute-t-elle. Enfin, le fonds peut via son LinkedIn ou sa newsletter agir comme une caisse de résonance pour donner de la visibilité aux offres de recrutement de ses startups.
Des approches différentes en fonction des métiers et du niveau hiérarchique
Samuel Tamagnaud distingue aussi les types de fonctions. « Il y a une fonction régalienne pour laquelle les fonds interviennent quasi systématiquement, soit en menant le recrutement, soit en y participant, c’est la fonction finance », indique-t-il. « C’est une fonction centrale pour le fonds qui doit avoir une bonne relation avec le CFO et s’assurer qu’il va être garant des bonnes pratiques », poursuit-il. « Le CFO est en effet une fonction centrale, car c’est un profil avec lequel, en tant que fonds, nous allons collaborer étroitement », confirme Perrine Albrieux.
En fonction du niveau hiérarchique, les approches peuvent également être différentes. « Nous accompagnons les startups sur le recrutement, du top management au middle management en passant par les C-levels. Cela peut également arriver pour des collaborateurs, mais c’est plus rare », indique Perrine Albrieux. Pour Samuel Tamagnaud, les fonds font appel à des cabinets de recrutement, en particulier pour des C-levels ou des membres du comité exécutif. « Sur ces fonctions, il me semble clé qu’un professionnel du recrutement intervienne notamment pour apporter de la diversité et éviter les biais de recrutement. Notre rôle est de ramener des critères objectifs de recrutement. Les fondateurs ont souvent l’impression qu’ils peuvent s’occuper seuls du recrutement, mais cela donne souvent lieu à des phénomènes de cooptation, voire de clonage », explique Samuel Tamagnaud. « En revanche, pour recruter les équipes tech, sales ou développement, il n’y a pas mieux que le fondateur lui-même », ajoute-t-il.
Morgan Phillips travaille étroitement avec les fonds. Le cabinet recrute pour des fonds comme Eurazeo, OneRagtime ou Siparex. « On peut très bien travailler avec des fonds en central, et ne pas avoir une collaboration optimale avec les startups. Souvent, le fonds impose un cabinet de recrutement à sa participation, ce qui ne lui plaît pas forcément. Mais in fine, c’est le fondateur qui paye et qui choisit donc. En revanche, sur la fonction CFO, les fonds ne dérogent généralement pas », partage Samuel Tamagnaud. « Nous sommes toujours minoritaires, donc nous poussons des profils intéressants, mais in fine, la décision sera toujours celle de l’entrepreneur, même pour un CFO », modère Perrine Albrieux.
Palier aux besoins ponctuels
Les startups grandissent très vite, et le cahier des charges pour une fonction donnée peut également vite évoluer. « Parfois, nous rencontrons des startups qui pensent à horizon cinq ans quand elles recrutent leur CFO. Mais dans la réalité, les premières années, un CFO doit souvent être une personne de terrain et assurer aussi la gestion de la comptabilité, du contrôle de gestion, de l’organisation comptable et éventuellement les ressources humaines et le juridique », explique Samuel Tamagnaud. Pour assurer ces fonctions sur un horizon de temps court, il met en avant le management de transition. Au départ réservé aux fonctions les plus classiques comme les RH ou le juridique, il concerne aujourd’hui de plus en plus des fonctions IT ou marketing. S’il représente un surcoût, il évite aussi les coûts de sortie élevés d’un CDI et correspond bien au besoin d’agilité des startups.
Samuel Tamagnaud indique qu’en général, les startups préfèrent travailler au succès. « Attention toutefois à ne pas mandater trop de cabinets de recrutement. Dans un marché pénurique tel qu’aujourd’hui, il y a de grandes chances que les cabinets appellent les mêmes candidats, ce qui n’est pas terrible en termes d’image pour la startup », alerte-t-il.
Le professionnel du recrutement note également une forte tendance au freelance. Le groupe Morgan Philips s’est adapté et a créé la marque Fyte Freelance pour recruter ces profils, notamment sur les fonctions tech et développeur. « Ce sont majoritairement des profils entre 25 et 35 ans qui cherche de la flexibilité et une liberté de choix dans leur mission. C’est une vraie tendance qui n’est pas toujours évidente à gérer pour les entreprises », confie Samuel Tamagnaud.