Les startups qui visent à lutter contre le gaspillage alimentaire se multiplient et connaissent un intérêt croissant de la part des investisseurs. Notamment portées par le pacte national de lutte contre le gaspillage alimentaire, qui fixe une réduction de 50 % des pertes en 2025. « On a vu un premier boom il y a un peu moins de 10 ans, avec notamment la Loi Garot, de 2016 (qui oblige les supermarchés de plus de 400 m2 à donner leurs invendus encore consommables à des associations d’aide alimentaire, NDLR). Aujourd’hui, le secteur est toujours dynamique, notamment grâce aux nouvelles réglementations », estime Pauline Debrabandere, coordinatrice de campagnes au sein de Zero Waste France, qui vise à réduire le gaspillage de ressources.
En France, les pertes alimentaires représentent toujours 10 millions de tonnes par an, soit une valeur commerciale estimée à 16 milliards d’euros, selon le ministère de la Transition écologique. D’où l’urgence à agir. « Il y a encore beaucoup de choses à faire, notamment en amont de la chaîne, au niveau agricole et industriel. Plusieurs sociétés ont vu le jour il y a deux, trois ans mais cela reste encore récent », poursuit Pauline Debrabandere.
Une levée de 10 millions d’euros pour Bene Bono
Pour lutter contre les pertes avant leur arrivée dans les rayons des supermarchés, Bene Bono a notamment mis au point, en 2020, une application permettant de vendre directement aux consommateurs les produits refusés par les circuits classiques de la distribution. En seulement quatre ans, la startup a déjà réalisé trois tours de table et réunit 10 millions d’euros cette année. Son objectif : atteindre la rentabilité. « Les investisseurs s’intéressent de plus en plus à ce secteur. Même s’ils recherchent davantage la rentabilité dans un contexte financier un peu plus compliqué », indique Grégoire Carlier, le cofondateur. Pour devenir rapidement rentable, la startup envisage de poursuivre son maillage géographique afin de passer à l’échelle. Bene Bono, qui rachète directement la marchandise à des industriels ou des agriculteurs, couvre actuellement 300 communes en France. La startup s’est récemment déployée à Toulouse et Bordeaux, en plus des quatre agglomérations – Paris, Lyon, Marseille et Lille - dans lesquelles elle était déjà présente, et à triplé son nombre de clients entre 2022 et 2023.
« Nous surfons sur la tendance de l’alimentation durable, qui se heurte à l’inflation. En proposant des produits de bonne qualité, 40 % moins chers à nos clients, on répond à leur demande », souligne Grégoire Carlier, le cofondateur, qui propose notamment des fruits et légumes bio mais aussi des produits secs, d’hygiène ou des boissons.
Les supermarchés gaspilleraient 12 % de leur chiffre d’affaires
De son côté, la startup Ida a mis au point une solution d’optimisation des stocks de produits frais dans les commerces de proximité et les grandes surfaces. Créée en février 2023, la société a levé 2,7 millions d’euros dès le mois de novembre. « Notre objectif est de limiter le gaspillage sur la chaîne logistique avec des algorithmes d’IA assez récents. On travaille sur les produits ultra frais : la boucherie, la poissonnerie, les fruits et légumes, et on évite à nos clients d’avoir trop de stocks pour limiter les pertes », précise Mateo Beacco, cofondateur. En moyenne, les supermarchés gaspilleraient 12 % de leur chiffre d’affaires. Pour eux, l’idée est donc ainsi de faire des économies. Avec sa première levée de fonds, Ida envisage d’étendre sa solution et de recruter, pour éviter 3 000 tonnes de gaspillage d’ici 2025, en France mais aussi rapidement en Europe.
Pour les pionniers du secteur, le contexte semble également favorable. Too Good to go vient de s’implanter aux Etats-Unis et est désormais présente dans 22 villes américaines. La startup pionnière du marché enregistre par ailleurs une hausse de 30 % de consommateurs. Et Phenix vient d’atteindre la rentabilité après une série C de 15 millions d’euros en 2022.