Il a connu l'époque glorieuse de WeWork. En effet, Romain Magri a passé deux années au sein de l'ancien mastodonte du coworking. D’abord dans l’équipe de lancement de l’entreprise sur le marché Europe du Sud, puis en tant que directeur du premier WeWork français (WeWork Lafayette qui était l’un des plus grands espaces de coworking du monde). « Chez WeWork, on recevait tout le temps des demandes pour de l’événement corporate. On refusait systématiquement toutes les demandes. Le métier de WeWork, c’est le coworking et pas l’événementiel », explique le fondateur et CEO de Metafore.
À force de refuser ces demandes, Romain Magri commence à se demander s’il n’y a pas quelque chose à creuser dans cette direction. Il explore la question pour diversifier la monétisation des espaces de WeWork, mais la période était un peu complexe pour le géant américain qui venait de rater sa tentative d’entrée en Bourse. Le projet devra se faire à l’extérieur de WeWork.
Romain Magri déjeune à cette période avec Alexis Bonillo, l’un des fondateurs de Zenly (qui travaille encore aujourd’hui chez Snap Inc. qui en a fait l’acquisition). Ce dernier lui partage la frustration de nombreuses entreprises dans lequel il a investi pour trouver des bureaux. Romain Magri lui expose alors son idée. Ce ne sera pourtant pas du coworking. « Je crois que j’ai suffisamment donné dans le coworking. Cela ne m’intéresse plus et on est sur un métier beaucoup plus complexe à opérer qu’un coworking où tes clients sont sédentaires pendant plusieurs mois. De notre côté, nous avons parfois plusieurs événements par jour dans une même salle sur des formats très différents. C’est beaucoup plus exigeant à opérer, mais ça rapporte aussi beaucoup plus d’argent. »
Le moins bon moment pour se lancer ou le meilleur ?
Après une levée à l’été 2019 avec Alexis Bonillo (Snap Inc), Nicolas Micallef (Factory), Clément Lamolinerie (Financière Saint James), Michael Benabou (co-fondateur de Veepee), Dominique Romano (family office Guibor), Marc Ménasé (Founders Future), mais aussi Aglae et Fimalac, l’avenir semble plein d’opportunité pour Romain Magri. Il signe pour un premier espace Metafore le 15 janvier 2020 avec le début des travaux fin mars.
« Ce n’était pas la meilleure période possible, ni pour lancer un business d’événementiel ni pour faire de gros projets de travaux », reconnaît-il en faisant allusion à la crise sanitaire qui vient largement bousculer ses plans. L’espace de la Boétie ouvrira malgré tout le 30 août 2020, entre deux confinements. Romain Magri comprend pourtant très vite que ce qu’il avait d’abord vu comme étant une situation catastrophique, était en réalité une opportunité.
Le monde était en train de se réorganiser autour d’une utilisation beaucoup plus forte du télétravail, avec des besoins beaucoup plus forts pour créer de l’événementiel pour rassembler les équipes. Très vite, Metafore reçoit des comités exécutifs ou de direction de groupe du CAC 40, bientôt suivis par des maisons du luxe, des cabinets d’avocat, de conseils, et plusieurs GAFAM. « On savait que le télétravail allait booster notre business, mais on ne pensait pas qu’il y aurait un événement majeur qui allait complètement redessiner les codes du travail », explique l’entrepreneur.
Romain Magri voit donc beaucoup d’avantages à ce lancement un peu particulier, permettant à ses équipes de peaufiner l’expérience avec les retours des clients. S’ils avaient imaginé une expérience haut de gamme, les attentes des clients les poussent à aller encore plus loin dans cette direction. « Aujourd’hui, tout le monde parle d’hospitalité, mais c’est une notion qui s’est un peu noyée. On veut vraiment créer des expériences mémorables en reprenant davantage les codes de l’hôtellerie. » Il raconte alors un récent événement où un chef étoilé est venu animer le dîner d’un conseil d’administration dans un salon privé.
L’avenir de Metafore
En 2022, une nouvelle levée de fonds de 15 millions d’euros permet à Metafore d’accélérer son développement. Si l’entreprise regarde pour ouvrir d’autres espaces, ce sont maintenant les propriétaires d’immeubles (ou des marques) qui viennent les contacter pour leur proposer d’opérer l’espace pour eux. Les négociations sont en cours.
Et si l’ancien de WeWork n’affiche pas la même démesure que ses anciens patrons, il vient défendre l’entreprise qui lui a tant appris : « Tout le monde a conscience que ça a grossi trop vite… mais il n’y a pas beaucoup de boîtes qui ont réussi à avoir l’impact que WeWork a eu. Il y a eu un avant et un après WeWork : ils ont réussi à transformer le monde des bureaux avec une machine opérationnelle qui était assez exceptionnelle. »
Metafore ne va donc pas suivre ces traces, mais va creuser son propre sillon où l’hospitalité est reine et où la dynamique RSE est très forte (Metafore est devenue B Corp il y a quelques semaines). « Dès le début, je me suis dit qu’il fallait être irréprochable en termes de RSE sans faire de greenwashing. On a dès le début banni les plastiques à usage unique, on essaye de travailler avec des matériaux les plus vertueux, nos cuisines sont en circuit court et en bio. »
Un choix qu’il ne regrette pas puisque l’ensemble de leurs clients posent aujourd’hui la question de ce qu’ils font en termes de RSE. Une nouvelle fois, Metafore semble être dans l’air du temps, proposant un concept qui vient répondre aux attentes des entreprises en ayant identifié les signaux faibles de la transformation d’un marché.