Amputé de ses bras et de ses jambes depuis un grave accident du travail en 1994, Philippe Croizon a traversé la Manche à la nage en 2010. Après ce défi qui a contribué à sa renommée, il a ajouté un nouvel univers à ceux où il se dépasser, celui des startups. En effet, il a lancé en début d'année son application "VIP" pour "very important parking", créée avec son associé Thierry Garot.
Après avoir scruté ce que le marché proposait, les deux hommes ont réfléchi à une solution qui intègre non seulement les parkings mais aussi les toilettes et autres lieux publics accessibles. « On est parti comme pour une aventure, avec une idée. On a contacté des développeurs mais je refusais les délais proposés au départ », se souvient l’aventurier. De son propre aveu, toujours pressé, Philippe Croizon se montre un startuper impatient. « Je voulais faire l’appli en trois mois. Nous avons trouvé une équipe de Nantes qui nous a suivi, épaulée par 150 bêta-testeurs que nous avons réunis pour construire le projet. »
L'aventure des marchés
L’aventurier découvre un nouvel univers et peine à trouver les indispensables partenaires financiers. Les applications liées au handicap disposent souvent de peu de moyens pour se développer. « Elles ne donnent pas envie. Le handicap ne fait pas rêver, les financeurs, qui l’associent encore à du misérabilisme, nous rétorquent que nous visions un marché trop petit. » L’entrepreneur optera finalement alors pour l’autofinancement de son projet, comptant sur le marché potentiel pour son application, 12 millions de personnes porteuses d’un handicap en France ainsi que 11 millions d’aidants directement concernés.
Une plongée dans un nouveau monde
Si aujourd’hui Philippe Croizon s’exprime comme un entrepreneur, il reconnait que sa vision du monde a changé. « J’étais un jeune en échec scolaire. Ouvrier métallurgiste, l’entrepreneuriat ne me parlait pas. Mais depuis mon accident, j’ose, je n’ai plus de limites et quand on n’a plus de limites, on réussit », sourit celui qui a contacté puis rencontré Elon Musk et ses équipes avec l’ambition d’aller dans l’espace. « J’ai appris par moi-même et dans ma carrière, j’ai mené des projets à gros budget. » Il résume simplement son mode de fonctionnement : « Dans la vie, je pars d’une idée ou d’un rêve à atteindre. Je prends les informations et je cherche comment mettre en œuvre les choses. Je me lance et quand j’ai peur, c’est trop tard ! »
Il complète toutefois. « La réussite repose aussi sur le travail et sur l’importance d’oser demander un coup de main aux bonnes personnes. Alors que la société considère comme un échec de demander un coup de main, il faut savoir s’entourer mais aussi déléguer quand on n’est pas capable de faire une chose. » L’aventurier insiste également sur l’importance de la résilience. « Il faut rebondir au-delà de ce que l’on croit être capable de faire. » Philippe Croizon reconnait que son parcours a été ponctué de doutes mais qu’il n’envisage pas l’abandon comme une option. « J’avance mais je ne recule pas. »