« Faire du commerce sans publicité, c'est comme faire de l’œil à une femme dans l'obscurité. Vous savez ce que vous faites, mais personne d'autre ne le sait... » affirmait le journaliste américain Steuart Britt. Ce n’est pourtant pas le choix Veja. Et les chiffres semblent lui donner raison puisque la marque de sneakers responsables a vendu 12 millions de paires depuis 20 ans et est implanté dans 70 pays. Le tout, sans aucune publicité.
D’autres acteurs comme Zara ou Tesla ont opté pour le même choix stratégique. Mais tout le monde n’a pas les mêmes atouts stratégiques comme l’enseigne de mode qui peut compter sur près de 2.000 points de vente à travers le monde, véritables vitrines de la marque, et le constructeur automobile qui bénéficie de l’aura de son dirigeant, un certain Elon Musk et ses 140 millions d’abonnés sur X.
Un parti pris économique
Pour Veja, le choix est avant tout économique puisque « lorsque vous achetez une paire de baskets d'une grande marque, 70 % de ses coûts sont consacrés à la publicité et à la communication. L'objectif de VEJA est d'investir dans la réalité plutôt que dans la fiction, les matières premières biologiques, la production, les salaires des employés et des agriculteurs ». Résultat : si leurs sneakers coûtent entre 5 et 7 fois le prix de ses concurrents à concevoir, elles reviennent au final au même prix que les grandes marques dans les magasins.
Même principe pour la marque de cosmétique Avril. Son fondateur, Alexis Dhellemmes, est parti du constat que beaucoup de clients aimeraient consommer des cosmétiques bio mais se heurtent à leur coût élevé. « Comme les produits bio sont forcément plus chers du fait de la qualité des composants et de la façon de les concevoir, la seule solution de pouvoir baisser les coûts était de supprimer la publicité et le marketing » explique-t-il. Grâce à cela, il parvient à proposer une gamme bio de qualité accessible à tous.
Aucune publicité ne signifie pas aucune communication
Ne pas utiliser la voie publicitaire ne signifie pas pour autant ne pas communiquer. D’autant que selon les préceptes de l’école de Palo Alto, « on ne peut pas ne pas communiquer » et que du coup le fait d’affirmer se passer de la publicité est déjà une communication en soi. « Nous communiquons très régulièrement sur nos nouveautés et des conseils d’utilisation, au niveau national mais aussi local, puisque nous avons un compte Instagram pour la marque et un compte par boutique, qui peut ainsi animer sa communauté en proximité » détaille Alexis Dhellemmes qui conseille la patience à toute entreprise qui voudrait suivre sa voie. « Nous avions prévu un capital un peu large au démarrage de la marque pour pouvoir tenir pendant les deux trois premières années » indique-t-il.
Du côté de Veja, « nous croyons au pouvoir du bouche-à-oreille, des collaborations sympas et de l'intelligence collective, c'est ainsi que les choses se passent aujourd'hui ». Si la marque a un coup de com inattendu avec une photo de Meghan Markle chaussée baskets V-10, elle a su aussi nouer des partenariats avec des grands noms de la mode comme Agnès B. ou Marni. « Nous préférons avancer avec des marques, des artistes ou des créateurs qui nous attirent. Nous aimons le changement, échanger avec des regards neufs, et c’est ce pour quoi nous faisons des collaborations » est-il précisé.