Le 6 février prochain, Cityscoot devrait être fixé sur son sort. En effet, le tribunal de commerce de Paris sera amené à trancher entre les deux offres de reprise, respectivement déposées par Cooltra, rival espagnol de Cityscoot, et Bertrand Fleurose, le fondateur du spécialiste français de la location de scooters en libre service.
A seulement deux semaines de l’audience, ce dernier a lancé un appel sur LinkedIn pour inviter les investisseurs intéressés à se rapprocher de lui pour boucler le financement de cette opération de sauvetage de sa société créée en 2014. Pour rappel, Bertrand Fleurose a été aux manettes de cet acteur tricolore de la mobilité partagée jusqu’en avril 2022. La société revendique 250 000 utilisateurs actifs, une flotte de 2 500 véhicules et plus de 18 millions de trajets depuis sa création. Présente à Paris et en petite couronne, elle est également présente en Italie (Milan et Turin), mais s'est retirée de plusieurs marchés, comme Nice et Barcelone.
Si depuis son départ de Cityscoot, l’entrepreneur français s’était lancé dans d’autres projets, il n’a pu résister à son désir de sauver son «bébé» quand celui-ci s’est retrouvé en difficulté. Après s’être déclarée en cessation de paiement début novembre 2023, la société a été placée en redressement judiciaire par le tribunal de commerce de Paris quelques semaines plus tard. Face au spectre de la disparition, Bertrand Fleurose a donc retroussé ses manches pour venir au chevet de l’entreprise. Une attitude qui rappelle d’une certaine manière celle d’Éric Carreel, le fondateur de Withings, qui était venu à la rescousse du spécialiste tricolore de la santé connectée en 2018 après avoir perdu de sa superbe dans le giron de Nokia.
«J’ai compris tardivement qu’il ne fallait pas aller vers les chemins classiques»
Depuis qu’il s’est mis en tête de reprendre Cityscoot, l’entrepreneur est passé par toutes les émotions. Mais dans cette période particulière, il peut compter sur le réseau social professionnel LinkedIn pour continuer à croire au succès de cette opération de sauvetage. «Depuis le premier post où j’avais poussé un coup de gueule à l’annonce de la cessation de paiement de Cityscoot, les réactions que j’ai pu avoir ont boosté ma motivation. J’ai compris que la marque Cityscoot était forte et très appréciée», confirme-t-il à Maddyness.
Face aux retours positifs de sa communauté sur LinkedIn, Bertrand Fleurose a donc entrepris de contacter des investisseurs pour que son projet de reprise puisse avoir une chance de convaincre le juge. «Avec la banque d’affaires Mû-Impact, on s’est mis en tête d’appeler des investisseurs institutionnels en priorité. Nous avons alors compris que le monde se divisait en plusieurs catégories : les fonds de private equity classiques, les fonds de retournement et les business angels connus ou non. C’est la première fois que je suis confronté à un redressement judiciaire, je ne savais pas trop à qui m’adresser», raconte le fondateur de Cityscoot.
Dans ce contexte particulier, l’entrepreneur a dressé un constat qui l’a incité à changer de stratégie. «J’ai compris tardivement qu’il ne fallait pas aller vers les chemins classiques, comme les fonds de capital-risque, dans ce type de situation spéciale. Ces derniers, si on sort des sentiers battus et que l’on n’a pas au moins 3 à 6 mois devant soi, ce n’est même pas la peine d’essayer de les convaincre, même si le projet les passionne. Ils sont enfermés dans des process et la situation actuelle d’une entreprise Cityscoot leur fait peur», observe-t-il. Avant d’ajouter : «Je dois bien avouer que j’ai été un peu déçu par cette attitude. Mais le problème de Cityscoot, c’est que ce n’est plus vraiment du venture capital. Je ne m’adressais pas aux bonnes personnes. Il fallait donc que je m’adresse à des gens sans comité d’investissement et capables de prendre des décisions courageuses avec leur propre argent. J’en appelle à tous ces gens qui existent, qui sont capables de dégainer rapidement s’ils comprennent la situation.»
«J’ai avancé plus vite en 24h qu’en deux mois»
Avec son post sur LinkedIn ce lundi 22 janvier, baptisé «15 jours pour sauver Cityscoot», Bertrand Fleurose espère éveiller les consciences chez certains investisseurs alors que la dernière ligne droite de la procédure judiciaire est engagée. «J’ai eu plein d’appels depuis la publication de ce post et ce sont des personnes que l’on ne voit pas habituellement dans l’écosystème. Elles investissent autant sur l’homme que sur le projet. Ils ont envie de défendre une boîte française. J’ai avancé plus vite en 24h qu’en deux mois. Ce qui s’est passé hier n’a fait que de démontrer les différences entre les catégories de personnes dans l’écosystème», assure-t-il. Et d’ajouter : «J’avais perdu quasiment espoir. Depuis hier, j’ai un regain de motivation. L’espoir renaît.»
Il reste désormais deux semaines à Bertrand Fleurose pour boucler son financement et aborder le plus sereinement possible l’audience qui se profile à l’horizon. «Le combat continue», assure-t-il. Avec son offre, l’entrepreneur prévoit de reprendre 140 collaborateurs sur 157 et de renouveler intégralement la flotte située à Paris d’ici fin 2024, avec la commande de 2 500 nouveaux scooters et 800 batteries supplémentaires. Le tout dans le cadre d’une offre de reprise de 300 000 euros. Face à cette offre, il y a donc celle de Cooltra, qui prévoit de son côté de reprendre seulement 20 salariés et d’intégrer la base de données clients de Cityscoot à son service. Dans ce cadre, la startup espagnole prévoit de mobiliser une enveloppe de 100 000 euros.
Bertrand Fleurose espère donc l’emporter pour offrir un happy-ending à la période de fortes turbulences traversée actuellement par Cityscoot. «Le business model commençait à fonctionner quand le Covid est arrivé. Nous prenions la bonne direction. Je n’ai pas envie de voir un tel gâchis alors que les planètes s’alignent. Les investisseurs qui ont fermé le robinet se sont arrêtés à quelques mètres de la ligne d’arrivée. Quant à moi, je veux reprendre le témoin et franchir la ligne d’arrivée», confie-t-il à Maddyness.
Verdict attendu dans deux semaines.