Il y a 14 ans se créait Evaneos. Yvan Wibaux et Éric La Bonnardière partageaient une passion pour le voyage et une conviction commune. « Dès le début, on avait le sentiment qu’il y avait besoin d’une transformation en profondeur du secteur pour créer un tourisme plus durable, plus pérenne et plus vertueux pour les destinations, raconte Éric La Bonnardière, CEO d’Evaneos. On pense aussi que le voyage a une vertu pour se transformer soi-même et on avait envie de créer quelque chose qui permettrait de faire tout cela. »
L’aventure commence donc par la création d’une collection de guides de voyages papier pour accompagner les touristes vers des voyages plus durables. Le déclic qui allait amener à la création d’Evaneos, c’est la discussion avec une agence à Madagascar : « Ce sont ces locaux qui ont la passion du pays, ils connaissent les enjeux de la destination et on voyait vraiment la vertu de les faire discuter directement avec les voyageurs. On a donc commencé sur cette notion de mettre en relation le voyageur avec les meilleures agences locales. » Ils commencent tout d’abord à tester le modèle en proposant le produit minimum viable : un site web avec un formulaire.
Evaneos démarre en mode bootstrap
« Pendant presque deux ans, on avait une logique de développement vraiment bootstrap, raconte Éric La Bonnardière. On voulait d’abord se confronter à nos clients, à nos fournisseurs pour comprendre comment faire fonctionner ce modèle. On s’était même dit que l’on ne lèverait jamais de fonds… On avait créé cette boîte pour être libre, je vis assez mal l’aspect hiérarchique et la dépendance aux autres. Tout est parti d’un besoin d’indépendance et d’autonomie. »
Une ambition initiale qui sera ensuite remise en cause par les cofondateurs qui ont déjà levé plus de 100 millions d’euros, notamment avec une série D de 70 millions en septembre 2018 auprès de Level Equity Management et Partech. Une levée qui est arrivée à point nommé quand on refait l’histoire a posteriori. Puisqu’en 2020 arrivait un événement qui allait complètement rebattre les cartes du secteur du tourisme…
L’après-Covid d’Evaneos
« On a eu de la chance d’un point de vue financier, reconnaît Éric La Bonnardière. On avait eu cette belle levée en 2018 et nous étions donc confortables au début du Covid. Puis nous avons eu aussi de la chance d’être en France puisqu’il y a eu beaucoup d’aides. Cela nous a permis de tenir tout en limitant aussi les départs. »
À l’heure où de nombreuses entreprises dans le domaine du tourisme mettent largement leurs collaborateurs en chômage partiel, Evaneos décide de miser sur quatre jours travaillés par semaine. La startup prend un risque à ce moment-là pour payer ces salaires alors que le chiffre d’affaires en face était de zéro.
« C’était un vrai investissement pour préparer le futur, avoue le CEO d’Evaneos. Cela nous a permis de faire tout le travail pour devenir B Corp, mais aussi de se poser la question de ce qui fera que l’on ressortira encore plus fort de cette pandémie. Pendant la Covid, on a fait un virage encore plus important sur nos réflexions autour de la durabilité du tourisme et sur comment renforcer notre impact sur cette dimension. »
Evaneos va donc agrandir son offre en France et en Europe, en appuyant encore davantage sur l’impact sur les économies locales et sur les questionnements environnementaux autour du voyage. Des directions qui sont immédiatement en phase avec les tendances sociétales qui accompagnent la reprise des voyages en 2021 et 2022.
« On a eu une reprise progressive, explique Éric La Bonnardière. De nombreuses destinations ont mis du temps à se rouvrir et on est maintenant sur des niveaux qui sont au-dessus de l’avant-Covid. On s’est demandé s’il y avait un effet de rattrapage un peu ponctuel, mais cela perdure dans le temps avec une envie de voyager mieux. Et on veut vraiment être l’acteur pionnier sur ces sujets-là. »
Evaneos retrouve la rentabilité
2023 a signé le retour d’Evaneos dans la profitabilité. Les fondateurs ont pourtant choisi de réaliser une nouvelle levée de 20 millions d’euros en décembre 2022 pour sécuriser la suite de l’aventure. « En tant qu’entrepreneur, on n’imagine pas que l’on puisse être impacté par un événement externe de manière aussi importante… et ce sera potentiellement de nouveau le cas un jour. On veut qu’Evaneos soit résiliente, solide, avec les moyens financiers d’absorber ça. »
L’entreprise s’est donc très largement éloignée du schéma boostrap qu’ils avaient imaginé pendant un temps. Éric La Bonnardière ne regrette pourtant pas un seul instant son choix : « Je ne vois pas l’impact à petite échelle. Ce sont ces levées qui nous ont donné les moyens de chercher un impact à grande échelle. Et puis le modèle me semble tellement évident pour l’avenir du tourisme, que quelqu’un d’autre l’aurait fait à notre place. Donc je suis fier, non seulement de l’avoir inventé, mais aussi d’avoir pu le développer. Et ce n’est que le début de l’histoire. »