Le 31 août 2023, le gouvernement français annonçait son nouveau plan de soutien à l’exportation « Osez l’export ! ». Ce plan, qui s’exerce dans le cadre de la « Team France Export », qui associe notamment les Chambres de Commerce et d'Industrie (CCI) et Bpifrance, renforce également les moyens dont dispose Business France pour accompagner les PME et les TPE au-delà de nos frontières.
« Avec le Plan Export, nous étoffons la palette d'outils que Business France met à disposition des PME et ETI exportatrices », affirme Laurent Saint-Martin, directeur général de Business France. « De plus, le plan 'France 2030' s'enrichit d'un volet résolument international pour projeter les pépites de demain sur la scène internationale. Notre objectif est double : soutenir efficacement les entreprises ayant déjà intégré l'export dans leur stratégie et encourager celles qui n'ont pas encore franchi le pas à s'engager dans cette dynamique ».
Au-delà de l’exportation, l’internationalisation est une vraie source de croissance. L’ouverture vers de nouveaux marchés, la confrontation à de nouveaux concurrents, la structuration juridique de l’opération,… sont autant d’étapes importantes qu’il faut préparer en amont. Pour connaître les 5 best practices en la matière, Maddyness a interviewé Jérôme Bonnet, directeur général de Pramex International, qui accompagne les entreprises dans leur projet d’internationalisation, Eric Morand, Directeur du département événement B2B chez Business France, ainsi que Laith Jubair, fondateur d’Axelor, présent en Inde, au Maroc et plus récemment à Toronto.
1 - Considérer l’internationalisation comme une opportunité, jamais comme une obligation
Ouverture vers de nouveaux marchés, développement du chiffre d'affaires, possibilité de racheter ou de collaborer avec un acteur déjà présent sur le marché… Si l'internationalisation n’est nullement une obligation pour les startups, les nombreuses opportunités qu’elle offre pèsent dans la balance.
« L’internationalisation n’est pas une obligation, évidemment, et dépend de beaucoup de facteurs ! », rappelle Jérôme Bonnet, directeur général de Pramex International. « On remarque, cependant, notamment dans les projets des startups en deuxième ou troisième levée de fonds, que l’internationalisation s’inscrit dans le plan de développement comme un levier de croissance : croissance de chiffre d’affaires par la conquête de plusieurs marchés, recrutement de compétences. Le monde des startups évolue rapidement, les mêmes idées peuvent naître au même moment dans plusieurs pays. Pour réussir donc, grossir plus vite que ses concurrents et maîtriser plusieurs marchés est un facteur clef de succès. »
En effet, l’internationalisation peut être pensée dès les premières années de développement, ou à un stade plus mature, surtout si le marché français ne permet pas à la startup d’exprimer tout son potentiel.
« Les startups ambitieuses doivent penser dès le départ à l’international, le fameux ‘Born Global’ car le marché français, de taille moyenne, est trop étroit pour permettre une croissance suffisante », affirme Eric Morand. « La plupart des startups françaises ont heureusement bien intégré ce facteur, avec la montée en puissance de la French Tech que ce soit dans leur effectifs ou leur organisation. Mais, dans tous les cas, l’internationalisation résulte d’une véritable volonté et stratégie du chef d’entreprise. »
2 - Analyser son marché et se préparer le mieux possible
Toute internationalisation réussie doit commencer par une préparation et une analyse approfondies. Tant d’un point de vue commercial et social que juridique. En effet, le produit ou le service peut ne pas être adapté aux attentes du marché, et donc ne pas trouver la clientèle qu’il souhaitait atteindre. Un test du marché en amont de l’internationalisation est alors à envisager, pour comprendre l’intérêt des locaux. Il sera ainsi possible, si besoin, d’adapter son produit pour le rendre compatible avec les besoins du pays. Cette phase d’étude et de test évitera d’engendrer des coûts inutiles vers un marché qui ne serait pas adapté.
« Quand on projette d’ouvrir une filiale, il est indispensable de bien choisir le marché ciblé, car ce dernier doit permettre un retour rapide sur investissement », affirme Laith Jubair, fondateur d’Axelor. « Pour cela, il faut prendre en compte plusieurs indicateurs, et même certains signaux faibles : les demandes entrantes en provenance de l’étranger, les barrières propres à ce marché comme la langue, les modalités d'installation, les procédures d’émigration des entreprises, les contraintes locales liées à cette catégorie de produit, … Il est important de sentir un intérêt de la part de prospects locaux : dans notre cas, nous avions déjà eu des contacts avec des prospects intéressés dès la mise en ligne d'un site web en anglais dédié aux zones géographiques qui nous intéressaient ».
« Avoir un modèle économique déjà rodé à minima sur le marché national est essentiel : partir à l’international sans avoir testé sur son propre pays serait imprudent », complète Jérôme Bonnet. « Acquérir une bonne connaissance des marchés voisins : un modèle économique dans un pays peut ne pas fonctionner dans un autre. Il faut donc connaître les habitudes de consommation. Et, surtout, il ne faut pas confondre vitesse et précipitation, en prenant le temps d’analyser les risques de l’opération et leurs implications : le potentiel du marché, les réglementations locales, les différences culturelles … »
3 - Disposer de ressources financières suffisantes
Le coût de l’internationalisation est un coût facilement sous-estimé, qui nécessite pourtant de rédiger un business plan afin de prévoir la trésorerie adaptée. A ce sujet, Jérôme Bonnet recommande aux startups de budgétiser les coûts futurs tout en investissant dans des outils de pilotage performants, pour éviter le cash burn.
« Nous estimons pour une filiale en Europe de 3 salariés un coût annuel de 600.000 € sur trois ans avant d’atteindre le break-even, précise Jérôme Bonnet. Des outils de pilotage financiers et commerciaux seront également nécessaires : certaines startups peuvent avoir tendance à surestimer la business value de leur modèle sur le marché visé. Nous avons beaucoup d'exemples de startups qui ont dû replier leur voilure suite à une mauvaise approche du marché. »
4 - Se faire accompagner par des dispositifs ou organismes adaptés
Une startup souhaitant s’internationaliser aura beaucoup à gagner à se faire accompagner, et à prendre conseil auprès d’organismes spécialisés en la matière, publics comme privés. La volonté actuelle du gouvernement étant de soutenir l’internationalisation des entreprises, des organismes, comme la Team Export, développent de plus en plus de possibilités d'accompagnement. Business France, quant à elle, constitue l’agence nationale chargée de l’internationalisation des entreprises françaises et de l’attractivité.
De plus, de nombreuses aides existent par ailleurs pour se développer que ce soit via les salons, l’utilisation de VIE ou encore avec le mise en place de programmes d’accélération subventionnés, de boosters pour les entreprises les plus prometteuses comme les pépites de French Tech 2030.
« Se développer et réussir à l’international ne s’improvise pas et nécessite de se préparer et de construire une stratégie, en priorisant les marchés sur lesquels une startup veut se projeter même si elle bénéficie d’une traction sur plusieurs marchés », conclut Laith Jubair, fondateur d’Axelor. « Pour cela, la Team France Export permet de réunir les meilleurs experts de l’international avec Business France, CCI France, Bpifrance et les Régions pour répondre aux questions essentielles : par où commencer ? avec quels financements ? vers quels marchés ? comment ? »
5 - Développer une politique RH adaptée et cohérente
La politique RH du groupe et de la filiale doit faire l’objet d’une attention particulière, à la fois pour la sélection des premiers collaborateurs présents sur le nouveau marché, mais également pour faciliter leur intégration dans le groupe. Le recrutement de talents locaux en faveur de la création d'une équipe mixte (ressources locales et expatriés) est cruciale pour comprendre et s'adapter rapidement au marché local.
Si les ressources humaines disponibles sur le nouveau marché ne sont pas suffisantes, il conviendra de prévoir des coûts de formation complémentaires. La mixité de locaux et de ressources provenant de la maison-mère permet de bénéficier de l'expertise locale du marché pour s'adapter au plus vite à la demande. Cela permet de ne pas réinventer la stratégie de l’entreprise, qui a fait ses preuves (innovation, savoir-faire et méthodes) mais plutôt de s’adapter aux spécificités du marché, avec une forte compréhension culturelle.
« Il s’agit de constituer une équipe sur place et de la rendre performante, et cela nécessite de combiner recrutements locaux et apport d’expertise depuis la maison mère », rappelle Laith Jubair, fondateur d’Axelor. « Lors de l’ouverture de la filiale d’Axelor au Canada, j’ai ainsi proposé à deux personnes de travailler sur place, un gestionnaire et un expert produit. L’intérêt est d’exporter la culture de l’entreprise, tout en recrutant des équipes locales qui baignent dans la culture de leur pays. Il est également important d’harmoniser ses processus et sa politique RH à l’échelle globale, pour s’assurer d’une parfaite intégration des salariés de la filiale dans le groupe. Créer dès le départ un principe d’égalité pour tous les salariés du groupe est une des clés d’un succès pérenne à l’international. »