Arkeon Energy, Crymirotech, ENTENT, Cool Roof France, Shyva, Beyond The Sea, Carbon Time ou encore Leviathan Dynamics sont les huit premières innovations financées par le collectif Team for the Planet. Créé en 2019 par un groupe d’entrepreneurs, ce fonds d’investissement à impact ne fait rien comme tout le monde puisqu’il refuse catégoriquement d’apporter un rendement financier à ses investisseurs.
Team for the Planet (anciennement Time for the Planet suite à un contentieux sur le nom) est un OVNI qui assume des ambitions démesurées : non content d’avoir rassemblé 25 millions d’euros en quatre ans auprès de 128.000 actionnaires, l’entreprise vise le milliard d’euros pour être en mesure de financer une centaine d’innovations qui vont contrer les gaz à effet de serre.
L’entreprise souhaite d’ailleurs doubler son impact en seulement un mois grâce à une opération choc sur le mois de décembre qui vise à réunir 10.000 entreprises pour le climat. Si Team for the Planet réussit son pari, elle entrera dans le Guinness Book comme étant la plus grande coalition d’entreprises pour le climat au monde.
L’urgence de lutter contre le changement climatique
Ils s’appellent Mehdi Coly, Denis Galha Garcia, Nicolas Sabatier, Arthur Auboeuf, Laurent Morel et Coline Debayle. Tous entrepreneurs, ils se sont rassemblés par une chaude journée de septembre 2019 pour poser les bases de ce qui allait devenir Team for the Planet.
Mehdi Coly, cofondateur et Managing Director de la structure, se rappelle des circonstances pour Maddyness : « Je suis entrepreneur dans la tech. J’ai pris conscience de la question climatique assez tardivement via les réseaux sociaux et quelques livres. C’est le moment où ma femme est enceinte de notre premier enfant. J’avais développé un logiciel pour que les PME puissent faire du référencement naturel sur Google sans connaissance technique. L’aventure startup me passionnait, mais j’ai complètement perdu le sens de tout cela à partir du moment où j’ai pris conscience des questions systémiques du changement climatique. Je n’avais plus du tout envie de continuer. Je venais de lever 1,5 million d’euros en amorçage et j’ai dû expliquer à mes actionnaires que je ne pouvais pas continuer. Je ressentais une urgence : celle d’utiliser mes capacités d’entrepreneur pour lutter contre le changement climatique. »
Déjà en 2008, Mehdi Coly avait monté une entreprise sociale (qui existe encore à ce jour) pour financer le départ d’enfants en situation de handicap. Il avait pu voir combien l’entrepreneuriat était un levier puissant pour régler les problèmes. Déjà à l’époque, il avait en tête l’idée de « créer une boîte qui crée des boîtes ». S’il reconnaît que le concept était assez vague, il allait peu à peu faire son chemin jusqu’à cet été 2019 où les prémisses de Team for the Planet voient le jour.
L’hypercroissance contre les gaz à effet de serre
Pour subvenir à ses besoins financiers, Mehdi Coly va créer une entreprise, nommée Automate Me, avec l’objectif d’’automatiser une source de revenus récurrente qui ne demanderait que peu de temps de travail. Pendant ce temps, il prépare la première opération de communication avec la certitude que, pour fonctionner, Team for the Planet doit avant tout embarquer l’imaginaire collectif autour de son modèle.
Un premier événement a lieu en décembre 2019 et va lancer le coup d’envoi de la collecte. Quelques jours plus tard, les cofondateurs ont déjà rassemblé 40.000 euros auprès de 150 actionnaires. Ils se retrouvent alors bloqués puisqu’une SAS ne peut pas en avoir davantage. « Cela montre à quel point on avait réfléchi à la suite », plaisante Mehdi Coly.
C’est ainsi que Team for the Planet devient rapidement une société en commandite par actions, dont les offres au public de titres financiers sont réglementées par l’Autorité des Marchés Financiers (AMF). Cet épisode est d’ailleurs assez représentatif de la manière dont l’équipe va structurer les choses, souvent dépassées par son succès et en réaction aux problématiques rencontrées. Un bon problème à avoir puisqu’il reflète la vitesse à laquelle le succès est rencontré.
Apporter un « unfair advantage »
Après s’être correctement structuré financièrement, Team for the Planet est ensuite challengé sur sa crédibilité scientifique. L’organisation monte alors un comité scientifique de premier plan en arrivant notamment à convaincre le directeur scientifique du CNRS de s’y joindre. « On est très vite arrivé dans une boucle positive. Parce qu’au début, il est difficile de convaincre des investisseurs si on n’a pas de projets et vice-versa. Au bout de quelques mois, on a réussi à créer de l’intérêt jusqu’à arriver à aujourd’hui où nous avons financé huit innovations parmi 1.467 candidatures et que nous avons investi 12 millions d’euros sur les 25 millions collectés. Mais l’argent est presque la chose la moins importante que l’on amène à nos participations », explique Mehdi Coly avec conviction.
En effet, si Team for the Planet est en capacité de soutenir financièrement ces projets, un autre cercle vertueux s’est rapidement mis en place. Une surreprésentation de cadres dirigeants parmi les actionnaires de la structure permet aux projets financés de bénéficier d’un important réseau.
« Cela dépasse ce que l’on aurait pu imaginer, annonce Mehdi Coly. Pour Cool Roof France par exemple, ils ont doublé leur chiffre d’affaires tous les ans depuis que l’on a investi. Ils sont passés de 1,5 million à 8 millions de chiffre d'affaires en deux ans et 40 % de leur pipe commercial vient de Team for the Planet. Il s’agit de quelque chose qu’aucun fonds d’investissement ne peut apporter. Parce qu’un fonds va avoir le réseau de ses partenaires, c’est-à-dire 100 personnes dans le meilleur des cas. De notre côté, nous sommes 127.000 et nous visons à être des millions. »
La structure cherche donc à avoir le plus grand impact positif sur le climat. Il s’agit d’ailleurs de la raison pour laquelle elle se refuse à offrir un rendement à ses investisseurs. D’après le cofondateur de Team for the Planet, cela viendrait dénaturer le projet en lui donnant un incentive à financer des projets plus rentables, même si ce ne sont pas ceux qui auront le plus grand impact.
En effet, les statuts de Team for the Planet sont clairs : « aucun dividende financier ne sera versé avant que le problème du réchauffement climatique soit résolu. »