Julien Fayet, Jean-Claude Charlet et Olivier Cotinat ne semblent pas pressés. Loins de l’archétype de l’entrepreneur impatient qui recherche le coup d’éclat, les trois hommes ont mis presque deux décennies pour faire émerger le projet Schoolab tel qu’il existe aujourd’hui. Leur parcours est comme un rappel qu’il faut s’installer dans la durée pour avoir un véritable impact.
En partant d’un side-project
L’aventure commence en 2005 avec la création du CPI, acronyme signifiant « Création d’un Produit Innovant », un programme pluridisciplinaire qui s’est créé entre plusieurs grandes écoles françaises : Centrale Paris, ESSEC, Strate École de Design (rejoint depuis par La Sorbonne). Le projet est d’abord un side-project pour Jean-Claude Charlet. Il est bientôt rejoint par Olivier Cotinat, un étudiant ayant participé à la première année du CPI et qui l’aidera à le développer et Julien Fayet, avec qui il avait collaboré sur un site de musique en ligne.
Chacun avait son entreprise à côté et les ambitions ne sont pas immédiatement tournées vers le CPI. « Après une période de gestation de presque dix ans, raconte Julien Fayet. On s’est senti mûr pour monter quelque chose de plus ambitieux. On sentait que l’on était sur les bons angles avec la pluridisciplinarité, l’Open Innovation, le design thinking et les démarches agiles. ». Alors qu’ils commencent ce travail de professionnalisation de l’approche, ils croisent le chemin de l’association Silicon Sentier qui les sollicite pour réfléchir à ce qui allait devenir NUMA. De cette manière, ils mettent le pied dans l’univers des startups, une dimension qui complète leur approche alors centrée sur les étudiants et les grandes entreprises. L’aventure aurait pu prendre ici un tout autre tournant puisque Schoolab est le premier locataire de l’immeuble de Numa et des discussions ont lieu pour que les deux entités fusionnent.
« Au final, on était concurrents sur pas mal de sujets, explique Julien Fayet à Maddyness. Nous avions envisagé un rapprochement qui ne s'est finalement pas fait. Le départ du Numa a été le pied au derrière dont on avait besoin. ». Après un bref passage dans un autre tiers-lieu, Schoolab prend la décision de louer son propre immeuble. Un choix qui n’avait rien de simple pour cet acteur qui avait alors construit les choses brique par brique sans se presser. « Si on avait été raisonnable, on ne l’aurait pas fait, confie Julien Fayet. Le loyer représentait un an de chiffre d’affaires. ».
Olivier Cotinat arrive pourtant à les convaincre de sauter le pas, imaginant un modèle de résidence extérieur qui allait leur permettre de financer le lieu et rassembler tout leur écosystème sous un même toit. C’est l’ouverture de Schoolab en plein Sentier.
Tout miser sur les lieux jusqu’à…
Le lieu est une réussite. L’équipe décide de multiplier les projets, réalisant une levée de fonds pour se préparer à une phase de développement intensif avec le lancement d’une filiale aux États-Unis, mais aussi au Vietnam, et l’ouverture d’un nouveau Schoolab à côté de la gare Saint-Lazare à Paris. En parallèle, Olivier Cotinat chapeaute le lancement du MoHo, un lieu ambitieux qui veut créer le D-Day de l’impact positif, depuis les plages de la Normandie (Caen). D’un autre côté, ils préparent le RaiseLab conjointement avec le groupe d’investissement Raise. Là encore, le MoHo et le RaiseLab sont deux projets qui vont mettre plusieurs années à sortir de terre.
D’autres lieux auraient pu voir le jour si 2020 n’avait pas eu lieu. « Cette stratégie s’est vraiment fracassée sur le COVID, lâche Julien Fayet. Du jour au lendemain, tout était fermé et on a dû changer notre fusil d’épaule. On s’est recentré sur nos métiers d’accompagnement. ». L’entreprise fait évoluer son positionnement pour assumer sa volonté d’accompagner leurs clients dans l’innovation responsable, choisissant plusieurs grandes verticales avec la mission d’apporter concrètement des briques à la résolution de problèmes mondiaux.
« Nous voulons être à un poste avancé sur ces sujets majeurs comme celui du plastique… en acceptant de travailler avec des gros pollueurs et des ONG très engagées pour faire avancer concrètement les choses. Mais on veut aussi faire bouger les lignes sur les sujets d’agroalimentaires et de diversité/inclusion. Notre volonté, c’est d’apporter une ouverture au changement. D’aller au-delà des stigmatisations pour dé-siloter et faire travailler ensemble différents acteurs. ».
Schoolab admet ne jamais avoir été très fort en communication. « C’est l’ultime compliment que l’on peut leur faire, nous confie un entrepreneur passé par Schoolab. Ils ne communiquent pas… ils font ! » .