Héléna Jérome s’est passionnée par ce secteur, pourtant elle était loin d’imaginer ce qui se passait derrière ces " vieux bâtiments que je voyais au bord de la route quand je partais en vacances " nous explique-t-elle amusée. Aujourd’hui co-fondatrice, avec Antoine Kuhnast, de la startup Safehear, elle conçoit des protections auditives communicantes pour les industriels et leurs salariés. " Je ne suis pas un profil tech, je ne suis pas scientifique, je n’ai pas suivi de formation d’ingénieure, et je ne viens pas de l’industrie. J’ai découvert ce secteur à 24 ans. Et ce que j’ai vu m’a immédiatement plu : voir cette matière première qui rentre, et découvrir l’objet directement à sa sortie ! On ne se rend pas compte du nombre d’objets de notre quotidien qui sont produits dans ces industries françaises ".
Pour valoriser ces productions, et faire rayonner ces savoir-faire, certains industriels ont rejoint La French Fab, l'une des communautés de Bpifrance.
Au fil des années, Héléna Jérome a visité beaucoup d’industries, rencontré différents interlocuteurs. " Mais très peu de femmes. Souvent, elles se cachaient un peu derrière les machines " regrette-t-elle.
" J’ai eu envie de leur donner la parole, alors j’ai lancé “les meufs de l’industrie” pour mettre en lumière des femmes qui adorent leur métier et qui sont tout aussi curieuses de savoir pourquoi les jeunes femmes ne se dirigent pas vers cette voie professionnelle. "
Plus de représentation féminine dans l’industrie
Ce manque de modèles et de représentation, la docteure en physiologie cardio-vasculaire Marie-Gabrielle Jouan l’a ressentie aussi. Fondatrice et directrice générale de BGene, elle s’est entourée de deux autres collaboratrices pour créer son entreprise qui veut révolutionner les processus industriels. L’une d’elle, Caroline Ranquet est docteure en microbiologie, la seconde, Alexia Chandor-Proust est ingénieure chimiste. " On était de purs produits de l’université, mais je crois que créer une entreprise à mission était une évidence pour nous ".
Depuis 2014, elles proposent aux industriels des solutions leur permettant de réduire leur dépendance à la pétrochimie, réduire la dégradation des sols et l’utilisation de produits phytosanitaire via l’utilisation de micro-bactéries issues, par exemple, de déchets d’exploitation forestière. " Il y a peu de femmes dans ce milieu, et encore moins dans les hautes sphères, mais je côtoie désormais de plus en plus de femmes à la tête d’entreprises à Grenoble."
" On m’a souvent demandé pourquoi BGene était dirigé uniquement par des femmes : c’est un hasard de recrutement. Il n’y a rien d’exceptionnel à cela, je suis pour que ça soit banalisé ".
Sur leur site BGene revendique une parité hommes-femmes " ça me parait une évidence, même si on n’axe pas nos recrutements sur ce point, on reste très vigilantes. La difficulté aujourd’hui, c’est de trouver des profils techniques, d’ingénieure par exemple " rajoute Marie-Gabrielle Jouan.
Attirer et former plus de profils féminins
Pour l’instant, les femmes occupent principalement dans les industries des fonctions supports et ne sont que 10 à 15 % dans les métiers de la conception et de la production. Certains secteurs comme la métallurgie peinent à convaincre les femmes. " J’ai rencontré des jeunes filles de 15 ans qui se forment au métier de soudeur et qui ne se posent pas de questions : elles aiment ce qu’elles font, c’est tout ce qui importe. Pour changer les choses je pense qu’il faut communiquer autrement sur ce que font les industries, en parler à l’école, au collège et au lycée, de tous ces métiers passionnants qu’on peut faire. Cela ferait naître des vocations " propose Héléna Jérome " les industriels sont prêts à les former, financer des formations et investir, ce qui leur manque ce sont juste des candidatures. ". Afin d’attirer plus de profils, les concours récompensant les femmes à la tête d’entreprises ou de projets scientifiques et industriels, permettent de mettre la lumière sur ces réussites.
" Même s’ils accentuent le côté exceptionnel du rôle des femmes dans l’industrie, ces concours sont importants, précise Marie Gabrielle Jouan, je reproche seulement aux médias de parfois infantiliser les femmes qui se lancent dans la tech et les sciences de précision. Arrêtons d’opposer les genres et écoutons ce que les femmes ont à dire. Elles ont toute leur place dans l’industrie. "