Dans l’écosystème technologique français, les tours de table à trois chiffres et l’apparition de nouvelles licornes se font désespérément attendre, mais cela ne signifie pas pour autant que le tableau est complètement noir. Certes, le marché du capital-risque s’est effondré en valeur, avec seulement 4,1 milliards d’euros levés à l’issue du premier semestre, contre 8 milliards sur la même période en 2022, soit une chute spectaculaire de près de 50 %.
Cependant, il a bien résisté en valeur, puisque ce sont 448 opérations qui ont été recensées sur les six premiers mois de l’année par notre indice MaddyMoney. A titre de comparaison, il y en avait eu 453 au premier semestre 2022, soit peu ou prou la même chose un an plus tard. La différence se fait donc au niveau des différents stades de financement des startups. Et à ce petit jeu, c’est de loin l’early-stage qui a le vent en poupe. Si on se réfère au seul mois de juin, ce dernier a capté 55 opérations, très loin devant les 17 séries A ou encore les cinq séries B identifiées sur la période.
Au total, ce sont 682,3 millions d’euros qui ont été levés par les startups françaises en juin. Un montant en légère baisse par rapport à mai (748 millions d’euros), qui restait dans la continuité des mois précédents, avec 727,9 millions d’euros levés en avril et 753,6 millions en mars. Ce recul se ressent d’ailleurs sur la dynamique d’emploi dans l’écosystème.
Plus de 14 000 emplois créés entre mai et juin
Au mois de juin, ce sont ainsi 6 015 créations nettes d’emplois qui ont été répertoriées par le baromètre de l’emploi des startups en France, réalisé par Numeum, premier syndicat professionnel des entreprises du numérique dans l’Hexagone. Si ce chiffre reste imposant, dans la mesure où il pèse à lui seul plus de 30 % du total des emplois créés depuis janvier 2023 et se positionne au-dessus du record de l’année précédente (5 722 emplois créés en février 2022), il est inférieur aux 8 348 postes créés en mai.
Toutefois, ce mois était très particulier, puisqu’il était consécutif à un mois d’avril très difficile, marqué par la suppression de 3 467 emplois dans l’écosystème. A l’époque, ce sont 2 419 startups qui avaient choisi de couper dans leurs effectifs pour s’adapter à un climat économique plus morose, alors que 770 jeunes pousses avaient choisi de continuer à recruter. Depuis, une nouvelle dynamique positive s’est enclenchée.
Des startups qui continuent de recruter en dépit d’opérations moins spectaculaires
En juin, 2 591 startups ont ainsi ouvert de nouveaux postes, pendant que 1 488 décidaient d’en fermer. Résultat, le nombre de jeunes pousses créatrices d’emplois sur le mois a été supérieur de 75 % à celles qui en suppriment, relève le baromètre de l’emploi des startups en France de Numeum. A l’issue du premier semestre, c’est la greentech qui fait figure de bon élève, avec 3 342 emplois créés en six mois (17 % du total des recrutements au premier semestre), devant la transporttech (1 754) et la fintech (1 690). En revanche, l'e-commerce a le moral en berne et sort du Top 10 pour la première fois depuis janvier 2022.
"La dynamique récurrente de l’emploi dans les startups en France est soutenue par des vagues sectorielles de solutions innovantes. Lorsqu’un secteur atteint un palier, un nouveau prend le relai. Ceci explique certainement, pour partie, la résilience de l’emploi de la tech française dans la période actuelle. La dynamique forte de la greentech semble cependant plus structurante et plus pérenne : la France s’impose petit à petit comme l’un des fers de lance des solutions au service des transitions écologiques et climatiques au niveau européen et international", analyse Guillaume Buffet, administrateur et président de la commission en charge des startups de Numeum.
Une startup française compte en moyenne 27 employés
Au total, ce sont donc 19 305 emplois qui ont été créés dans la French Tech depuis janvier, contre 23 000 sur la même période en 2022. Sur l'échantillon de 10 674 jeunes pousses françaises analysées par Numeum, trois quarts des startups ont été créatrices d’emplois (4 541) ou stabilisatrices d’emplois (3 457), tandis qu'un quart d'entre elles (2 676) ont allégé leur masse salariale sur le premier semestre 2023. Numeum a ainsi pu déduire à l'issue des six premiers mois de l'année qu'une startup française est composée en moyenne de 27 employés, contre 24 à la même époque en 2022.
Cela confirme donc que l’écosystème se montre résilient malgré le marasme économique actuel, avec des startups qui continuent de lever des fonds et de recruter pour poursuivre leur développement. Certes, nous sommes désormais loin des périodes complètement folles où les centaines de millions d’euros pleuvaient sur la French Tech en l’espace de quelques heures. Personne n’a d’ailleurs oublié ces 24 heures complètement dingues entre le mardi 21 septembre et le mercredi 22 septembre 2021, durant lesquelles 1,3 milliard d’euros d’investissements sont venues nourrir les ambitions de plusieurs pépites tricolores : Sorare (585 millions d’euros), Mirakl (470 millions d’euros), Vestiaire Collective (178 millions d’euros) et Sunday (85 millions d’euros). Pour autant, l’écosystème français poursuit une progression plus saine, avec moins d’opérations spectaculaires et de valorisations exorbitantes qui pourraient faire craindre un phénomène de surchauffe.