Pour certains, " le train sera le mode de transport du 21ème siècle, s’il survit au 20ème siècle. " Cette phrase, prononcée par Louis Armand, directeur général de la SNCF de 1955 à 1958, pourrait être en phase de devenir réalité. En effet, la demande est actuellement très forte pour que la question de la mobilité ne soit pas synonyme d’une empreinte environnementale catastrophique.
" Il y a une demande extrêmement forte de transport durable, et donc de transport ferroviaire puisque le rail est la colonne vertébrale du transport durable, explique Henri Poupart-Lafarge, PDG d’Alstom. Mais il faut que l’on puisse augmenter sa capacité, que l’on fasse des économies d’énergies et qu’on livre beaucoup plus rapidement nos solutions. Nous sommes face à un tournant à la fois du marché et à l’intérieur d’Alstom. ".
Si l’entreprise apprécie plutôt la discrétion (son directeur de l’innovation, Bruno Gutierres, confirmera d’ailleurs à Maddyness qu’Alstom est plus intéressé par son impact que par sa visibilité sur le salon), cette première participation de l’entreprise à Viva Technology n’est pas un hasard.
Pour soutenir l’accélération demandée par le marché, Alstom souhaite multiplier les collaborations avec les startups pour renforcer ses capacités d’innovation. En même temps, cette présence sur le salon était un moyen de soigner sa marque employeur puisqu’elle a un besoin d’attirer de nouveaux talents.
" Les gens sont surpris de voir à quel point Alstom est une entreprise qui est très high-tech ", reconnaît Henri Poupart-Lafarge. Son objectif est donc de positionner son entreprise à l’intersection entre innovation et responsabilité. En effet, le rail ne représente ainsi que 2 % des émissions totales des transports alors qu’il représente 8 % du transport mondial de passagers et 7 % du transport de marchandises.
Le rail est une question de prix
Si le rail est généralement bien identifié comme une solution de transport propre, la question du prix est souvent un enjeu majeur. En effet, le grand public pointe souvent du doigt le fait qu’un trajet en train est souvent plus long et surtout plus cher que son alternative en avion. Alstom a-t-elle certaines clefs pour rendre le secteur du rail plus attractif ? " Il y a beaucoup de réponses à cette question, reconnaît Henri Poupart-Lafarge. Il faut tout d’abord que les modes de transport paient leurs externalités. L’aérien va maintenant entrer dans le système de carbone trading cette année. C’est déjà une bonne chose. Il faut que les transports aérien et automobile paient pour leurs externalités négatives. Il y a aussi le prix de nos propres matériels, et là on travaille énormément sur des solutions plus efficaces avec de l’industrie 4.0. Mais on travaille aussi à augmenter la capacité et la fréquence des trains pour faire chuter les prix. Parce que ce qui coûte cher, c’est l’infrastructure, si on augmente de 20 à 30 % la capacité de l’infrastructure, c’est autant de coûts en moins. Les nouveaux TGV vont aussi avoir une consommation d’énergie de 20 % en moins… pour 15 à 20 % de places en plus. ".
C’est donc aussi en innovant sur chacun de ces points que le rail arrivera à faire baisser le prix des billets de train, même si Alstom n’est évidemment qu’un chaînon dans la vie du rail.
Une innovation invisible
Si Alstom ne donne pas le sentiment d’être une entreprise particulièrement innovante, c’est aussi parce qu’elle a une culture de l’innovation qui doit rester invisible. " Nos innovations tendent surtout à rendre le voyage le plus fluide possible, partage Henri Poupart-Lafarge. Si on interroge les passagers, leur première demande est d’avoir un trajet fluide. On a donc réduit le bruit et les vibrations. De même, la maintenance prédictive pour éviter des problèmes de retard a été un important chantier. ".
Alstom accueillait aussi des startups sur son stand à Viva Technology. Au menu : la maintenance, la gestion des risques cyber, la formation des collaborateurs en réalité virtuelle. L’entreprise cherche à être la plus efficace possible pour que le trajet des passagers se passe dans les meilleures conditions. La quantité d’innovations nécessaires pour permettre la qualité de cette expérience sont en revanche totalement invisibles.
" On ne va pas mettre des écrans dans les sièges alors que tout le monde vient avec son propre écran dans la main, ce serait gadget ", explique le PDG d’Alstom. Le rail est donc une solution d’avenir, où l’innovation est omniprésente. C’est juste qu’elle est invisible et le restera.