Keecker avait su se faire remarquer. Il faut dire qu’avec son look de R2D2 qui sert de projecteur multimédia dans toute la maison, il était difficile de ne pas avoir le sentiment que cet objet venait du futur.
Pierre Lebeau, fondateur et CEO de Keecker puis d’Exceenis, se rappelle de sa première entreprise avec des étoiles dans les yeux. À commencer par la campagne Kickstarter menée en 2014 qui avait atteint son objectif de 100.000 dollars en trois jours. L’ambiance pendant la soirée de lancement était électrique alors que les premières commandes se succédaient à intervalle régulier.
L’autre grand moment est arrivé quelques années plus tard, le jour où un camion est arrivé au bureau de la startup avec les premières palettes qui allaient leur permettre de poser les yeux pour la première fois sur le produit fini. L’aventure a donc rassemblé son lot de bons moments, mais se termine, comme pour beaucoup, lorsque Keecker n’arrive pas à boucler une nouvelle levée qui leur était vitale.
Pierre Lebeau ne souhaitait pourtant pas vivre cette expérience comme un échec et se mit immédiatement en quête de ce qui allait lui permettre de le transformer en un événement positif.
Naissance d’Exceenis
Si Keecker a fermé ses portes en mars 2019, Exceenis a vu le jour seulement trois mois plus tard, en juin de la même année. La motivation de son équipe se retrouve d’ailleurs dans le nom latin " ex cinis " qui signifie " sortir des cendres ". Le double " ee " est d’ailleurs là pour rappeler le nom Keecker. Objectif : retirer tous les apprentissages de la précédente aventure pour éviter les travers.
Pierre Lebeau était le seul à fonder Keecker et avait donc fait face à de grands moments de solitude quand il fallait prendre des décisions difficiles. Pour Exceenis, l’équipe fondatrice compte cinq associés, exclusivement des anciens de Keecker : " Ce sont un peu les directeurs de l’ingénierie de chaque secteur de Keecker, explique Pierre Lebeau. Avec l’électronique, le logiciel embarqué, la mécanique et l’IA. Parce que l’une des grosses valeurs de Keecker était l’équipe que l’on avait réussi à monter. Si faire du hardware, c’est compliqué. Monter une équipe qui s’entend bien et qui travaille bien ensemble, c’est presque encore plus compliqué. ".
Malgré les difficultés connues par la précédente startup, une partie de l’équipe reste soudée et décide de se relancer sous la forme d’un bureau d’études dédié au hardware.
" On voulait être le bureau d’études que l’on aurait rêvé d’avoir aux débuts de Keecker, résume le CEO d’Exceenis. Cela nous aurait évité pleins d’erreurs de débutants. ". Le deuxième apprentissage fondateur hérité de Keecker, c’est la volonté d’autofinancer cette nouvelle aventure.
" Gagner de l’argent avant d’en dépenser, cela paraît un concept simple, lâche Pierre Lebeau. Mais c’est beaucoup plus sain et nous permet de vivre beaucoup mieux en termes de stress. " Exceenis a déjà accompagné de nombreux clients comme Lunii, Tikino, Bolk, LightInderm, Bibak (ex-La Consigne Greengo) et Balyo. " En externalisant cette partie hardware, précise Pierre Lebeau. Ils sont en mesure de se concentrer à 100% sur le business. ".
Il s’agit d’ailleurs probablement là d’un autre héritage de Keecker où les équipes étaient particulièrement bonnes sur la dimension hardware et software, mais n'avait pas suffisamment de moyens pour sa commercialisation. Les équipes d’Exceenis connaissent leurs forces et se positionnent là où elles apportent le plus de valeur ajoutée.
Vers un nouveau produit
Le bureau d’études n’est pourtant pas la finalité de l’aventure. En effet, l’échec du Keecker ne leur a pas fait passer l’envie de plancher sur leur propre projet. Pierre Lebeau dévoile à Maddyness les contours d’un nouvel objet qui sera présenté au salon Automatica de Munich en juin prochain.
Pas de BtoC cette fois, mais une machine industrielle qui va trouver sa place dans les usines ou chez des acteurs du reconditionnement pour s’assurer qu’un produit est fonctionnel à la fin de la ligne d’assemblage. Aujourd’hui, de telles machines sont construites pour tester un produit spécifique, Exceenis souhaite développer une machine qui va s’adapter au test de nombreux produits différents.
" Il s’agit d’une sorte de très gros Keecker avec des bras robotisés qui va appuyer sur les boutons, inspecter visuellement les produits, tester les mises à jour logicielles, et s’assurer que tout fonctionne avant de le mettre dans le carton. Cela va permettre d’automatiser des éléments à très faible valeur ajoutée pour l’humain que l’on va aujourd’hui faire faire dans d’autres pays à la main-d’œuvre moins chère. Cela permet de produire plus localement et de faciliter aussi le travail des reconditionneurs. Cela vient donc aussi s’inscrire dans le besoin environnemental et sociétal pour que les produits puissent vivre plus longtemps. ".
Pas de doutes, Exceenis a réussi à sortir de belles choses des cendres de Keecker.