Persil, ciboulette, basilic, menthe, coriandre… La startup Prêt à pousser est née de l’idée de développer les potagers d’intérieur. Inexistant en 2016 en France, quand la jeune pousse initiait ce marché avec le soutien de ses partenaires revendeurs dont l’enseigne Boulanger. "Faire pousser son alimentation s’inscrit dans le concept de la cuisine de demain " précise Romain Behaghel, cofondateur. Trois années de croissance, des levées de fonds de plus de huit millions d’euros notamment auprès de fonds de capital risque comme Capagro ou Inventures et Prêt à pousser commercialise son premier produit intégrant des plantes à installer sur un plan de travail. Très vite, un deuxième suivra, un mur végétal fait d’aromates classiques et de salades. A côté d’un site e-commerce performant, l’entreprise s’appuie alors sur des distributeurs de renom : Boulanger, Nature et Découvertes ou Fnac / Darty. " Malgré la crise sanitaire et la fermeture des magasins de détail, 2020 a été une belle année, poussée par notre site internet qui a compensé les pertes de l’activité retail. "
Le début de la fin ?
Le premier trimestre 2021 s’inscrit dans la même dynamique mais les choses se dégradent à l’été 2021. " Nous pensons qu’à la fin du confinement, les gens ont réattribué leurs dépenses, délaissant les équipements de la maison et les activités d’intérieur. " Malheureusement, la startup avait dimensionné ses achats en s’appuyant sur les chiffres de croissance de 2020, mettant sa trésorerie dans le rouge. " Un nouveau tour de financement n’était pas réaliste et nous étions trop endettés pour nous mettre en " mode ralenti " et faire tenir notre trésorerie le temps que la situation s’améliore " complète Romain Behaghel.
L’entreprise, qui comptait alors 15 salariés, échange alors avec ses actionnaires. Ils décident conjointement d’accélérer le projet de cession pour adosser Prêt à pousser à un industriel. " Nous avons mandaté une banque d’affaire et nous avions de bons contacts mais le contexte s’est dégradé confrontant les potentiels acheteurs à leurs propres problématiques. " Guerre en Ukraine, problème d’approvisionnement, inflation… A l’été 2022, Prêt à pousser n’a toujours aucun repreneur.
Faire le bon choix
" Nous avions anticipé la cessation de paiement et la mise en redressement judiciaire pour les faire dans de bonnes conditions, avec une trésorerie nous permettant de maintenir un minimum d’activité. " Lucides, fondateurs et associés savent que " le succès capitalistique est impossible, qu’un plan de redémarrage semble irréaliste vis-à-vis d’une clientèle B to B. " Gardant l’objectif de s’adosser à un industriel, ils envisagent cependant une vente des actifs. Romain Behaghel se souvient de cette période complexe. " Chaque décision sur un investissement, un développement produit, l’idée même de continuer à avancer ne devait pas mettre en péril l’entreprise. Nous étions sur une ligne de crête. " La relation avec les équipes a elle aussi amené son lot de difficultés. Le dirigeant a choisi de les informer en toute transparence des différentes options. " Il a fallu les accompagner dans la réalité de la vie de l’entreprise tout en engageant des projets pour la suite afin de maintenir la motivation. " Avec le recul, le dirigeant conseille : " Avant d’être endetté ou d’avoir des ventes en bernes, si le dirigeant n’a pas de certitude sur ses ventes, il doit pouvoir ne compter que sur lui et manager sa trésorerie pendant 18 mois sans avoir besoin d’une levée de fonds. "
Le bout du tunnel
L’entreprise lyonnaise Vif Systems se porte finalement acquéreur des actifs en novembre 2022 avec l’ambition de devenir l’équipementier de référence en agriculture urbaine. L’équipe de sept personnes, la technologie, le portefeuille client changent de main. " Je suis soulagé que cette période soit achevée et que l’aventure Prêt à pousser continue. Une phase de redressement c’est une forme d’échec pour les investisseurs et les actionnaires mais ce n’est pas l’échec du projet. " Un nouveau produit doit d’ailleurs sortir à l’été 2023 pour encourager les particuliers à devenir autonomes sur les légumes feuilles que sont les plantes aromatiques, salades ou encore choux kale, pour que chacun devienne acteur de son alimentation.