Encore hier lors d’un événement amical, en présentant Wagli, mon voisin de droite a ri. Rire de gêne, d’incompréhension ou de doute, peu importe : Tout a commencé lorsque j’ai prononcé le mot " Web3 ".
"tout a commencé lorsque j’ai prononcé le mot " Web3 ""
Le Web3 fascine... autant qu'il repousse.
Le fabuleux essor des NFT (ces petites images digitales), des technologies blockchain ou des metavers fascine autant qu'il repousse.
Le contexte actuel a pourtant toutes les raisons de générer de l'intérêt. Malgré la crise ambiante, le marché n'a jamais été aussi intéressant, les levées de fonds dans le Web3 sont phénoménales partout dans le monde et également en France (110M$ levés par Animoca Brands en septembre 2022, dont le principal investisseur n'est autre qu'un fond issu du gouvernement singapourien - Temasek, Bernard Arnault sur le point de lancer un fonds de 100 millions d’euros dans le Web3 avec Aglaé Ventures, etc.). Et pourtant.
"le Web3 a mauvaise presse"
Anciennement salariée d'une entreprise à mission, passionnée d'éducation, mes amis et anciens collègues ont (quasi) tous réagi de la même manière lorsque j’ai annoncé le lancement de mon activité de formation dans le Web3, Wagli : "Ah, je ne t'imaginais pas travailler là dedans", "Super, mais étonnant comme nouveau tournant non ?". Tous ces euphémismes cachaient un certain désaveu du secteur.
Alors pourquoi un tel effet repoussoir ?
Je me suis longtemps posé la question et je me suis arrêtée sur cinq points. Le premier : peut-être que tout a commencé au début du Bitcoin, lorsque dans les années 2010, son utilisation détournée servait à acheter armes et drogues sur le site Silk Road. Ces technologies ont alors certainement été ternies par des usages frauduleux et des représentations douteuses.
Cette diabolisation s'est peut-être aussi construite dans le temps, à force de médiatiser de spectaculaires phénomènes spéculatifs : la vente d'un Bored Ape (NFT de singe déprimé) à plus de 3,1 millions de dollars, la destruction d'un tableau original de Frida Khalo au prix de la création d'un NFT, ou encore l'effondrement de la blockchain Terra en moins de 96h. La liste est longue.
Pourquoi donc passer du temps sur ces technologies Web3 alors que notre Terre brûle ? Réchauffement climatique, guerre en Ukraine, pouvoir d'achat : à quoi bon ces nouvelles technologies qui semblent si vaines et superficielles ?
Ou alors est-ce un sujet de sémantique : web3, blockchain, NFT, metavers, DAO. Des acronymes qui ne font référence à rien si ce n'est à l'univers technologique. Où se trouve la poésie, le réel, le quotidien dans tout ça ? Comment se rattacher à de l’utile lorsque tout est inconnu ?
"comment se rattacher à de l’utile lorsque tout est inconnu ?"
Enfin, l'univers web3, très masculin et en apparence très spéculatif, semble laisser peu de place aux femmes qui peinent encore à émerger dans cet univers très technophile.
Le Web3 : les technologies des possibles
Si l'on fait fi de toutes ces annonces bling-bling et usages inutiles, les technologies blockchain sont fascinantes pour les possibles qu'elles offrent. Le Bitcoin a, initialement, été créé dans le but de se libérer de tous intermédiaires et donner notamment l’accès au plus grand nombre à ses services. Soucis de décentralisation et de transparence sont au cœur de son fonctionnement.
"ce n’est pas la technologie qu’il faut bannir mais l’utilisation que l’on peut en faire"
Ces technologies ne sont que des outils : ce n’est pas la technologie qu’il faut bannir mais l’utilisation que l’on peut en faire. À nous de trouver le bon usage. Le possible est ainsi entre nos mains comme le montrent certains services qui permettent : l’inclusion des non bancarisés (ceux qui n'ont pas accès aux services bancaires traditionnels mais dont les 2/3 possèdent pourtant un smartphone), l’accès à la formation via le modèle de learn to earn, les projets de reforestation (Carbonable, Regen ou My Lovely Planet en format jeu), la traçabilité de produits alimentaires pour des produits plus éthiques et une origine plus transparente, mais aussi des déchets. Ou encore une meilleure rémunération des artistes et l’authentification de biens de luxe font aussi partie des possibles.
Côté féminin, un incroyable écosystème se met pourtant en place : World of Women, SheFi , Women in Web3 (aux États-Unis), La Mineuse, Les Hackeuses (en France) et j’en passe. Une incroyable opportunité.
Ainsi, espérons que la démocratisation d'usages plus justes, plus éthiques en accord avec nos besoins actuels permettra de redorer le blason de ces technologies qui offrent un potentiel fort.
En attendant, rien n’est perdu. Avant d’agir prenons le temps de comprendre et de questionner. Éveillons notre esprit critique afin de comprendre leurs impacts, leurs opportunités et limites bien sûr. Quels problèmes ces technologies peuvent-elles vraiment résoudre et surtout apprenons à abandonner certains usages sur le bord de la route.