L’histoire de PeopleSpheres a commencé bien avant le dépôt de ses statuts (en 2015). Pour comprendre les origines de ce logiciel RH, il faut remonter à une société de conseil nommée NeoSpheres, et encore avant cela à une entreprise de la Silicon Valley du nom de Saba Software. C’est dans cette dernière que Philippe Bloquet, qui deviendra le fondateur de PeopleSpheres, fera ses armes entre 2007 et 2010. C’est là qu’il découvrira le concept de “best of breed”, qui est la possibilité d’interconnecter plusieurs logiciels de différents éditeurs pour aller choisir les solutions les plus adaptées.
La fin du “All in One”
Pour Philippe, nous allons connaître la fin du “tout-en-un” (ou “All in One” si l'on veut poursuivre avec la langue de Shakespeare) : " Il faut bien le dire, lance-t-il. Les gros all-in-one restent limités… et ils ne sont pas très agiles ". Pour lui, l’avenir du Système d'Information de gestion des Ressources Humaines (SIRH) se fera par l’assemblage de multiples logiciels que l’entreprise sélectionnera dans la liste pléthorique des outils existants en fonction de la spécificité de ses besoins.
Pour que le " best of breed " fonctionne et que les entreprises ne se retrouvent pas avec des outils trop éparses, il a très vite l’idée d’orchestrer l’ensemble. Mais Philippe Bloquet n’est pas du genre à sauter à pieds joints dans l’inconnu. Avant PeopleSpheres, il y a eu NeoSpheres, une société de conseil qui va lui permettre de préparer le terrain tout en venant accompagner les entreprises dans leurs besoins RH. En filigrane des années NeoSpheres, il y a donc toujours des études et des expérimentations pour venir développer la vision d’un portail RH.
Celle-ci n’arrivera que cinq ans plus tard, en 2015, moment où Philippe Bloquet considère que le marché est prêt, avec une plus grande maturité dans le monde du SaaS. Cette première itération s’appellera tout simplement Mon Portail RH avant de changer de nom en 2019 au profit de PeopleSpheres.
Pendant un premier temps, les clients s’intéressent aux briques logicielles spécifiques et Philippe Bloquet arrive à proposer son portail en supplément. Puis, progressivement, les clients signent pour cette vision d’un portail unique, qui va leur permettre de rassembler l’ensemble des briques logicielles RH.
Être une boîte de soft
2019 est une année charnière pour la jeune startup. Le changement de nom est anecdotique puisque Philippe Bloquet va en même temps vendre son activité de conseil (NeoSpheres) à Sopra HR, réaliser une première levée de fonds de 3 millions d’euros (1,5 en equity auprès de ODYSSEE Venture et 1,5 en dette) pour faire développer la solution technologique de PeopleSpheres (qui était jusqu’à présent basée sur des technologies non-propriétaire par manque de moyen).
" On a décidé d’aller au bout du raisonnement, explique t-il. C’était le moment de décider si nous étions une boîte de conseil ou une boîte de logiciel. Et c’était définitivement la plateforme qui nous motivait et on a fait le choix du software ". Le pari va vite payer. En 2019, PeopleSpheres signe son premier client de 1.000 collaborateurs, en 2020, c’est le premier à 5.000, et en 2021, la première entreprise de 15.000 collaborateurs.
Une nouvelle levée de 8,5 millions d’euros est alors réalisée en 2021 auprès d’Omnes Capital, Irdi capital, UL Invest et Swen, pour financer la croissance de l’entreprise. D’une quinzaine de personnes en 2019, PeopleSpheres comptabilise jusqu’à 100 collaborateurs actuellement.
Le rêve américain
Cette phase de croissance amène à réfléchir à l’internationalisation de PeopleSpheres. Très vite, le choix se porte sur les États-Unis. Philippe Bloquet commente ce choix : " Hélas, l’histoire nous montre depuis 25 ans que les gens qui comptent dans le monde des plateformes sont américains. Si on veut compter un jour sur ce marché, nous devons être sur le marché américain. Et puis, PeopleSpheres a atteint une maturité technologique sur le monde des plateformes qui n’a pas à rougir de ce qui se fait aux États-Unis ".
L’entreprise est donc en train de modestement dérouler ce scénario d’expansion américaine avec de belles réussites comme la signature d’un contrat pour une entreprise de plus de 6.000 collaborateurs il y a quelques semaines. Mais le président de PeopleSpheres concède que ce n’est pas avec la précédente levée qu’ils vont pouvoir conquérir le marché américain.
Une nouvelle levée est en préparation, mais ralentie par la conjoncture actuelle. Le montant espéré ne sera peut-être pas le montant final mais la situation n’inquiète pas Philippe Bloquet outre mesure : " J’en ai déjà vécu quelques-unes de crises depuis mon arrivée dans le monde des affaires. Lorsque vous affichez une proposition de valeur différenciante et plutôt innovante, vous avez des cartes à jouer. Je pense que c'est le bon moment pour nous ".
Il commence donc déjà à regarder les acteurs américains que PeopleSpheres pourrait être en mesure d’acquérir pour jouer la carte de la croissance externe. Le CEO rêve aussi d’un “plan secret” qui serait de boucler une levée importante, auprès des bonnes personnes pour se mettre à l’abri d’un rachat, d’ici 3 ou 4 ans. Dans cette dynamique, Philippe Bloquet a totalement intégré le fait qu’il finira pas ne plus être majoritaire dans sa propre entreprise. Mais il ne l’a jamais vu comme une perte de contrôle. " Je ne me suis jamais posé cette question parce que je savais que ce projet ne pouvait se faire qu’avec l’aide de financier externe ".
A 59 ans, Philippe Bloquet compte préparer la suite de l’aventure d’ici une dizaine d'années. Une perspective qui l’amène aussi à penser sur le long terme, à la forme qu’il donnera à PeopleSpheres et à la prochaine génération d’entrepreneurs qui pourra accompagner cette startup aussi loin que possible.