Camille Girard fait partie de ses jeunes actifs qui décident d’entreprendre à peine leur étude terminée. “Après avoir rendu mon mémoire [de dernière année de Master, N.D.L.R], j’ai pris une semaine de vacances, j’ai beaucoup réfléchi”, explique t-elle. Sept petit jours qui ont suffi à faire germer l’idée de Simplement Français. “J’ai parlé de ce projet d’entreprise à mes parents mais ils m’ont conseillé de trouver un CDI - les études, ce n’est pas gratuit- et de mener ce projet en parallèle” , confie-t-elle. Un conseil qu’elle décide de suivre sans pour autant lâcher son idée d’entreprise.
Elle décroche finalement un job chez Medeo Health en septembre 2019 et travaille, en parallèle, sur son projet.. Convaincue de son idée -un site e-commerce permettant de trouver des produits fabriqués en France-, elle quitte son job et “prend le risque” de lancer sa boîte et de se retrouver au chômage début 2020.
“A l’époque, j’ai pensé à entreprendre avec un ami de mon école mais l’entrepreneuriat ne le tentait pas, il était à la recherche de la sécurité offerte par un CDI” , confie t-elle. “Ca ne m’a pas dérangé d’entreprendre toute seule, au contraire. Quand je vois certaines entreprises, je me dis que je suis heureuse de l’avoir fait seule. Peut-être que j’ai l’habitude de prendre des décisions seule parce que je suis fille unique..”. En réalité, elle sera épaulée par ses deux alternantes, un incubateur et d’autres entrepreneurs.
Trouver son modèle
Février 2020, c’est le début de l’aventure entrepreneuriale. Camille Girard participe à un concours organisé par son école au cours duquel elle développe le plan d'affaires de sa future société. S’en suit une campagne de crowdfunding sur Ulule qui rencontre le succès : “Nous avons récolté 13 000 euros sur les 10 000 souhaités au départ” , insiste t-elle.
Une opération qui change la donne pour son mentor. “On m’a expliqué que je ne demandais pas assez de financement par rapport à la réussite de ta campagne” . Ce qui la pousse à revoir son plan d’affaires en septembre 2020 avec Vincent Riffard, indépendant qui fait de l’accompagnement proposé par France Active. Et lui permet de demander un prêt à Bpifrance qui lui répond positivement en février 2021. Grâce à ce financement et d’autres prêts bancaires, l’entrepreneuse réussit à sécuriser 135 000 euros.
Le début officiel de l’aventure débute en février 2021 où l’un des premiers chantiers de Camille Girard consiste à recruter deux stagiaires pour l’épauler dans le développement de la société. “A la fin de leurs stages respectifs, elles sont restées dans l’entreprise en alternance” , souligne-t-elle pour mettre en avant leurs rôles et leur soutien.
Puis, comme de nombreuses startups, Simplement Français rejoint l’incubateur Manufactory à Lyon et reçoit plusieurs soutiens comme celui du Moovjee.
Un essai difficile à transformer
Le concept de Simplement Français séduit rapidement ses premiers clients. “Au début, cela a bien marché puis nous avons connu une petite période de flottement. En novembre 2021, la croissance est revenue mais elle n’était pas assez rapide, ce qui a entraîné des problèmes de trésorerie” , reconnaît Camille Girard. Pas question de perdre espoir pour autant. “J’ai essayé de lever des fonds mais le montant que je pouvais obtenir n’était pas suffisant. Il m’aurait juste permis de tenir trois mois de plus. Avec la guerre en Ukraine, qui a débuté en avril, les investisseurs sont devenus plus frileux ” . Une situation intenable pour la fondatrice qui ne se verse pas de salaire depuis la création de l’entreprise. Le constat est là: Simplement Français doit cesser son activité et entamer une procédure de liquidation judiciaire.
“Nous n’avons pas encore le recul nécessaire pour analyser les raisons de notre fermeture. J’ai décidé d’attendre six mois avec mes deux alternantes pour qu’on puisse dresser le bilan de cette aventure” . Sans y avoir particulièrement réfléchi, Camille Girard avance néanmoins quelques pistes.
“On constate une différence entre les personnes qui déclarent vouloir acheter français et celles qui le font vraiment” , débute l’entrepreneuse. Les produits Made in France sont généralement plus coûteux que ceux venant d’Asie. Et l’inflation due à la guerre en Ukraine devrait continuer à grever le portefeuille de certains Français.
La véritable erreur stratégique que l’entrepreneuse retient est sans doute le manque d’investissement dans la publicité. “Nous nous sommes rendues compte vers la fin de l’aventure qu’en multipliant notre budget publicité par deux, notre chiffre d’affaires triplait. Nous n’avons pas assez investi sur ce pôle” , reconnaît-elle.
Aucun regret
Malgré la fermeture de sa société, Camille Girard porte un regard positif sur cette première aventure entrepreneuriale. “J’ai appris énormément de choses, j’ai rencontré de nombreux entrepreneurs et acteurs de l’écosystème” , et j’ai pu expérimenter un peu de management. “Nous avions peu d’écart d’âge donc nous avions un management très horizontal. J’ai toujours été transparente à chaque étape de la société”, même lorsque les finances vacillaient. “Je pense que c’est aussi une chance de connaître les débuts d’une aventure entrepreneuriale lorsqu’on est en alternance. L’idée de création d’entreprise a d’ailleurs germé dans leur esprit mais elles veulent avoir quelques années d’expérience comme salariée avant de se lancer” , confie la fondatrice.
De son côté, Camille Girard souhaite attendre un peu avant de se lancer dans un nouveau projet de ce type malgré les propositions qui lui ont été faites. “Je cherche plutôt un poste en communication / marketing” , avance-t-elle avec une petite crainte tout de même. En tant qu’entrepreneuse, “il n’y a pas un jour où je me suis ennuyée. J’ai peur de la monotonie dans mon prochain poste”. Preuve que son énergie et sa détermination à faire bouger les choses n’ont pas changé.