" Je m'éclate dans ce que je fais alors que je ne m'imaginais pas y rester plus de deux ans ! " lâche avec beaucoup de spontanéité Alexis Robert du haut de ses 33 ans. Sept ans qu'il a rejoint Kima Ventures (l’un des fonds d’investissement en amorçage les plus actifs au monde avec deux à trois startups financées chaque semaine à hauteur de 150.000 euros chacune) et sept ans qu'il vit sa passion au quotidien. Un heureux hasard pour celui qui disait " détester le monde de la finance et des investisseurs ".
" J'ai lâché mes Legos pour la programmation "
Car sa première passion, c'est la programmation. " Mon père, un passionné d'électronique, m'a initié très tôt. A 8 ans, j'ai commencé à programmer et j'ai lâché mes Legos pour l'ordinateur car la programmation me permettait de créer. Ça ne m'a jamais quitté. Ça reste aujourd’hui encore mon hobby " reconnaît Alexis Robert, qui avait même créé à 13 ans, un logiciel pour gérer la bibliothèque de son grand-père. En école d'ingénieur, il s'ennuie " car je sais déjà programmer ". " Des amis qui suivaient leur scolarité à HEC avaient un projet qui nécessitait un développeur. Parallèlement à mes études, je me suis donc lancé dans cette première aventure entrepreneuriale, comme CTO de My Bee qui deviendra PayinTech " poursuit-il.
C'est en lançant sa première entreprise avec un associé à Londres, que ce jeune entrepreneur fait la rencontre de Kima Ventures. " On est mort pendant la levée de fonds mais j'avais sympathisé avec Vincent Jacobs, l'investisseur de chez Kima Ventures qui avait regardé notre dossier. Ils avaient besoin de quelqu'un et j'ai passé des entretiens ". C'est là que tout bascule pour lui : enthousiasmé par ses échanges, il rejoint le monde de l'investissement et de la finance en 2015.
" Mon cerveau scanne tel un robot d'IA "
Aujourd'hui, il fait partie des trois " partners " à temps plein (plus un stagiaire) de la structure soutenue par Xavier Niel. Un effectif dérisoire quand on sait qu’une soixantaine d'entrepreneurs sont reçus par Kima Venture chaque semaine, pour en sélectionner deux à trois. " Ce qui nous rend très productif, c'est l'organisation " explique Alexis Robert. Une organisation que Kima Ventures lui doit en partie puisqu'à son arrivée, il a d'emblée créé plusieurs logiciels d’organisation : Kima Lab (pour traiter le flux des demandes que chaque membre du fonds passe en revue), Kima Circle (un agenda avec des événements réservés aux startups financées par Kima) et Kima Forward (un outil de gestion du réseau d’experts et de ressources que Kima met à disposition des startups).
Des entrepreneurs, il en voit une vingtaine par semaine via Zoom. Et pour les sélectionner, " je suis tellement habitué que mon cerveau scanne tel un robot d'Intelligence Artificielle " s'amuse-t-il à dire. Plus sérieusement, il aime interroger les entrepreneurs à propos de la genèse et les débuts de la startup car pour lui, " déconstruire le passé permet de voir ceux qui ont la flamme, ceux qui porteront les projets et leur rapidité d'exécution ". De la vivacité, il en faut car le flux constant des candidatures oblige le fonds à être d'autant plus réactif sur les réponses que Kima investit très rapidement (entre 2 à 4 semaines, contrairement à d’autres fonds de capital-risque classiques dont les délais seraient plus long, avant de donner leur accord de financement). " Les boîtes étant jeunes, il y a beaucoup d’incertitudes sur les investissements. C’est l’opportunité de marché et la qualité de l’équipe qui va faire la différence " précise Alexis Robert.
Le fonds s’intéresse à tout type de startup dès lors qu'elle possède une brique technologique et qu'elles peuvent atteindre le seuil de rentabilité facilement sans avoir besoin de lever beaucoup d’argent. Dernièrement, le Web 3 a connu un fort engouement, et représente moins de 10% des quelque 20 dossiers reçus chaque jour. " En 2021, beaucoup de startups voulaient faire du Web3 pour faire du Web3, par passion de la technologie plus que pour ce qu'elle permet de faire " déplore l'investisseur de chez Kima. Lui préfère défendre des projets " avec des profils cartésiens, amoureux d'un problème et non d'une solution et qui vont utiliser le Web 3 comme un moyen de résoudre leur problème ".
Construire la communauté Kima
Alexis Robert a du flair. Et du talent. " Je suis à la fois du côté technique en tant que programmateur, et du côté financier en tant qu'investisseur, ce qui me permet d'aborder des sujets très pointus avec les business angels " reconnaît-il. Mais pour lui, sa force véritable réside ailleurs : dans sa façon d'aborder le business. " Quand je fais un investissement, mon focus n'est pas l'aspect financier. La principale qualité d'un investisseur, c'est d'être avant tout amoureux de l'entrepreneuriat, pas de l'argent. Si on aborde ce métier en se considérant d'abord dans la finance, on se plante ! ". Réputé dans le milieu, et reconnu par ses pairs, il reste humble et se méfie même d’un excès de confiance en soi. " C'est à double tranchant car c'est en étant persuadé d'être fort et infaillible que l'on fait des erreurs. Et j'en ai fait bien sûr " admet-il
A présent, son objectif est de renforcer la communauté Kima (les quelque 2.000 entreprises qui ont été aidées depuis la création du fonds en 2010) afin de mieux aider les entrepreneurs. " Nous organisons des événements pour créer, faciliter et promouvoir ce lien précieux entre entrepreneurs pour qu'ils s'entraident car on ne peut entreprendre sans connexion " conclut celui qui à ses débuts en a parfois " bavé d'être seul ".