Depuis plusieurs années déjà, le secteur de la mode est rattrapé par ses dérives, de la pollution des eaux aux conditions de travail en passant par la surproduction. Les invendus de certaines enseignes ont longtemps été incinérés. Un non sens quand on connaît le coût environnemental de conception d’un vêtement. C’est dans l’optique de redonner vie à des tissus que Vanessa Counaert et Cédric Vanhoeck se sont associés pour lancer Resortecs. La société belge développe deux produits : Smart Stitch™, des fils de couture solubles à la chaleur, et Smart Disassembly™, un système de désassemblage thermique à faibles émissions. Assemblés, ces deux innovations permettent de “découdre” facilement les vêtements et facilitent ainsi la récupération du tissu.
“Même si l’adoption de Smart Stitch™ est un pilier de notre solution, nous ne vendons pas juste le fil de couture mais une solution 360° pour faciliter le recyclage de vêtements. Cela commence au moment de la conception du vêtement mais apporte un retour sur l’investissement au prochain cycle de vie” , précise Vanessa Counaert. Ces deux solutions ouvrent la porte à un recyclage à grande échelle et de haute qualité en créant du “lien entre les marques qui souhaitent recycler leurs invendus ou vêtements en fin de vie et les recycleurs” .
Pour développer son modèle, la startup a bénéficié de plusieurs financements: 1,5 million d’euros sous forme de prêts convertibles, de récompenses et de prix de la part de PMV, Fashion for Good, Trividend, VLAIO, H&M Foundation et Textirama Foundation. Une somme à laquelle s’ajoute une bourse de 2,5 millions d’euros provenant du Conseil Européen d’Innovation.
Pour monter ce projet, la société d’une douzaine de personnes s’est également appuyée sur l’expertise de Vanessa Counaert. L’entrepreneuse possède plus de 20 ans d’expérience en entreprise, où elle a exercé des missions à l’intersection du marketing, de la stratégie et de la finance pour une société Fortune 500.
De grandes enseignes testent la solution
Toute la R&D -en partie brevetée- derrière ces solutions se répercute sur le prix du fil. “Le coût moyen de Smart Stitch™ est plus élevé que celui d’un fil standard et dépend de plusieurs facteurs comme l’épaisseur ou encore le point de fusion du fil”, confie la fondatrice. Ajoutant : “Cependant, l’investissement sur le fil de couture est très vite rentabilisé par les économies apportées par l’utilisation combinée de Smart Stitch et Smart Disassembly. Pour donner un exemple, avec moins de 2% de la production conçue avec notre technologie, certains de nos clients ont rentabilisé leur investissement en totalité grâce à des économies substantielles au niveau de la gestion d’invendus, de la compensation carbone et du respect des nouveaux cadres d’éco- législation (EU Green Deal ou la loi anti-gaspillage en France).”
Le modèle proposé par Resortecs a déjà séduit plusieurs marques installées à l’international comme le fabricant de jeans sur mesure Unspun, H&M dans le cadre de sa collection “A Circular Design Story” ou encore Bershka. La collection développée avec cette dernière a été mise en vente dans 60 pays, ce qui “témoigne de l’impact qu’on peut avoir dans l’industrie textile dès aujourd’hui” , se réjouit Vanessa Counaert. Plus proche de nous, la société Decathlon travaille, elle aussi, sur un premier modèle de veste de ski conçu avec le fil Resortecs.
Tous les produits des marques qui collaborent avec Resortecs portent déjà un label qui met en valeur l’éco-conception du vêtement ainsi que la facilité de recyclage. “Nous sommes très conscients du potentiel de marketing que cela apporte aux marques tout comme notre responsabilité auprès du consommateur. C’est pour cette raison que toutes nos collaborations sont basées sur des analyses de cycles de vie qui visent à assurer la transparence et la précision de l’impact positif que notre solution apporte aux vêtements.”