Seulement 26 % des emballages plastiques seraient recyclés en France selon l’UFC-Que Choisir. Près des trois quarts de ces déchets se retrouvent donc enfouis, incinérés et parfois disséminés dans la nature. Une pollution plastique qui incite une poignée d’entreprises françaises à remettre la consigne au goût du jour. Car avant les années 1960, toutes les bouteilles étaient consignées.
L’entreprise nantaise Bout à Bout est l’une des pionnières sur ce marché. Créée en 2016, la société de 15 salariés réemploie environ 1,5 millions de bouteilles par an. Son modèle : collecter les contenants vides dans des cafés, restaurants ou des magasins de vrac, les laver puis les revendre à ses clients producteurs de vins, de jus de fruits ou de bières. Un schéma que suit également la coopérative Distro, en Bretagne. Mais pour ces acteurs, remettre la consigne n’est pas sans difficulté.
Des machines de lavage rares et vieillissantes
D’abord parce que la collecte à un coût. " Aujourd’hui, les " flux retour " n’existent pas. Et il faut massifier les quantités pour que ce soit abordable ", insiste Antoine Clapier, président de Distro. Dans le même temps, la grande majorité des machines de lavage ont disparu ou sont particulièrement âgées. Bout à Bout, travaille avec une machine de lavage vieille de 50 ans, à une trentaine de kilomètres de Nantes, mais investit 2 millions d’euros pour s’équiper de sa propre plateforme de tri et de lavage. Car pour atteindre son seuil de rentabilité, la société doit doubler le nombre de bouteilles réemployées.
La société Le Fourgon, arrivée sur le marché en avril 2021 a, quant à elle, choisi de se concentrer sur la distribution. Elle revend en ligne du lait, du soda, de la bière ou du vin et les distribue à des particuliers à Lille, Nantes et Rennes. " Lorsqu’on livre nos clients, on collecte les bouteilles vides. Puis nous travaillons avec des entreprises comme Bout à Bout, à qui l’on donne les contenants pour qu’ils soient lavés. C’est ensuite eux qui les revendent aux fournisseurs ", détaille Charles Christory, le dirigeant. Un modèle plus rentable puisque le premier site de la société, à Lille, est déjà à l’équilibre. Autre acteur sur le marché : la start-up NoWW, qui a créé un meuble à consignes, permettant de collecter bouteilles en verre et tout autre contenant réutilisables.
Une perte de business pour les acteurs du recyclage et les fabricants de verre
Mais la marche est encore grande pour faire décoller la filière. Car la consigne ne fait pas l’unanimité. " Certains industriels veulent rentabiliser leurs lignes d’emballages plastiques ou ne sont pas prêts à engager des frais de lavage pour repasser à la consigne ", estime Charles Christory. Les acteurs du recyclage ne sont pas tous enclins à son retour non plus. " Cela prouve qu’il y a un problème avec le recyclage du plastique et c’est une perte de business pour eux ", poursuit le dirigeant lillois. Un manque à gagner qui concernent également les fabricants de verre. Même si, " les mentalités changent, assure Yann Priou, directeur général de Bout à Bout. S’ils voyaient le réemploi du verre comme une concurrence il y a quelques années, ils sont nombreux à s’y intéresser aujourd’hui. C’est un bon moyen de montrer l’intérêt du verre par rapport au plastique. "
La réglementation va, elle aussi, dans le bon sens.
En 2023, la loi Agec imposera 5 % d’emballages réutilisables aux producteurs. D’autant qu’il y a actuellement de grosses difficultés d’approvisionnement. De nombreux fabricants se trouvent en Ukraine ou en Russie et les verriers Duralex et Arc International ont annoncé qu’ils allaient suspendre leur activité pendant les mois d’hiver car le coût de l’énergie pèse trop lourd dans leur production.