Décryptage par Raphaelle de la Bouillerie
31 août 2022
31 août 2022
Temps de lecture : 4 minutes
4 min
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DALL-E 2, l’artiste est-il sur le point d’être remplacé par l’IA ? 

[DOSSIER ICC 4/5] Créer un tableau, style Rembrandt, représentant un chat astronaute en moins de quarante secondes. C’est maintenant possible avec DALL.E 2, le générateur d'images en intelligence artificielle lancé par Open.AI. Maddyness fait partie des chanceux a en avoir eu accès. L'heure de la disruption des artistes serait-elle enfin venue ?
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DALL-E 2 est un algorithme surentraîné capable de générer des images complexes à partir de consignes textuelles soumises par les usagers. Avec l’ouverture récente de leur version bêta, un million d’internautes peuvent déjà donner libre cours à leur imagination et se prendre pour des artistes en herbe. Annoncée comme une Intelligence Artificielle (IA) pouvant “créer des images réalistes et de l’art à partir d’une description naturelle”, ce logiciel de deep learning ultra sophistiqué puise son inspiration dans une gigantesque base de données structurée.

Comment ça marche ? 

Le propre de ces algorithmes dits "génératifs" est qu'il peuvent:

  1. "Comprendre" ce que représente une image ainsi que son style en identifiant ses différents éléments et leurs relations. 
  2. S'inspirer de ces images pour générer des créations visuelles à partir d'une simple requête textuelle.

DALL.E 2 permet donc à la fois de créer des images selon le bon vouloir des utilisateurs, mais permet également d’apporter des modifications réalistes à des images existantes par une simple requête scripturale. En clair, inutile de savoir manier un pinceau, DALL.E 2 offre à n’importe qui de s’inventer artiste, tant qu’il parvient à énoncer clairement son idée. 

C'est d'ailleurs ce que nous avons fait en générant cette image de chat astronaute dans le style "Rembrandt". C'est aussi une référence à la mission Artémis de la Nasa dont l’objectif est de reposer le pied sur la Lune.

L’artiste serait-il sur le point d’être remplacé par la machine ? 

Si les créations de DALL.E 2 sont comparables à des œuvres humaines d’une grande précision technique, le problème soulevé par l’IA est aussi celui de la place de l’artiste et plus précisément ce qu’on désigne comme “art”. Peut-on qualifier d’art des productions issues d’un algorithme sans impliquer une sensibilité humaine dans leur conception plastique ? Vous avez trois heures. Blague à part, on est allé interroger des experts bien informés.

Pour David Simonetta, peintre et philosophe, la capacité de l’IA à produire des images qui peuvent s'apparenter à de l’art, en dit plus sur l’évolution de l’art moderne que sur la capacité de la machine à devenir un artiste. “Si l’ordinateur peut aujourd’hui mimer une œuvre d’art, c’est aussi parce que l’art est devenu volontairement indistinct d’une image aléatoirement générée par ordinateur.” avance-t-il. En cause, selon lui : la tentation de “l’esthétique (Le rendu extérieur)” au détriment de “l’artistique (l’habileté du travail, derrière le rendu)” dans la création d’une œuvre, qui rend plus poreuse la limite entre la production d’une image par un algorithme et celle d’un humain. 

"Dans le domaine de la publicité par exemple, on peut utiliser ces outils plutôt que de faire appel à des agences"

L’artiste doit chercher à délivrer une vision du monde plutôt qu’une simple prouesse visuelle. David Simonetta poursuit : “je pense qu’une œuvre d’art véritable est liée à la profondeur, au travail et à la vérité. (...) je ne crois pas que les images produites par Dall.e 2 le fassent, tout simplement parce qu’on n’a même pas pensé à le leur demander.”

Une opinion partagée par Pierre Stock, chercheur en IA  chez Facebook, qui avance que le développement des IA génératives d'images a pour vocation d’aider les artistes et non de les remplacer. “Nous pensons que l’émergence de ce type d’IA va démocratiser l’accès à des modèles génératifs intéressants. (...) Tout artiste s’inspire de ce que les autres ont fait avant. Avec la machine c’est la même chose, on peut s’inspirer de ses productions.” souligne-t-il.

L’IA constituerait donc un outil supplémentaire permettant de faciliter l’accès à la génération d’images. “Dans le domaine de la publicité par exemple, on peut utiliser ces outils plutôt que de faire appel à des agences pour essayer de générer un visuel.” explique-t-il. DALL.E 2 au même titre que Photoshop ou encore Canva pourrait se révéler un atout majeur dans la production de visuels à moindre coûts. 

Mais les défis soulevés par une telle technologie s'annoncent de taille.

Tout d’abord le vide juridique sur la question des droits d’auteurs : les nombreux acteurs impliqués dans le processus de création, rendent difficile l’attribution d’une œuvre à une seule personne. Ensuite, celui des biais des images générées. “L’algorithme n'est pas biaisé, mais les données qui lui sont fournies le sont. Par exemple le concept de "médecin" sera souvent associé au sexe masculin, reflet des travers de notre société." prévient Pierre Stock. 

Enfin le problème des deep-fakes, images de synthèse pouvant véhiculer de fausses informations et canulars. Selon le scientifique, un moyen d’y remédier serait d’effectuer un véritable travail de vulgarisation et de pédagogie pour bien expliquer le fonctionnement de l’algorithme ainsi que ses limites.

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