Peu connue du grand public, l’énergie osmotique correspond à l’énergie générée par la différence de salinité de l'eau douce et de l'eau salée lorsque celles-ci se rencontrent. Propre, durable, illimitée et indépendante des conditions météorologiques, elle présente de nombreux atouts et un potentiel incroyable. " Chaque année, l’énergie osmotique engendrée dans les estuaires et les deltas est équivalente à 30 000 TWh, plus que la demande totale d’électricité de la planète " , souligne Nicolas Heuzé, le co-fondateur de Sweetch Energy.
Sur le papier, il s’agit d’une énergie idéale. Mais dans la réalité, son exploitation s’avère, pour le moment, complexe et onéreuse. Ce à quoi Sweetch Energy entend bien remédier.
Capter cette énergie
“Dans tous les deltas et les estuaires de la planète, de l’énergie osmotique se libère lors de la rencontre de l’eau salée et de l’eau douce. Lorsque ces eaux se rencontrent, la différence de niveau de salinité va entraîner un déplacement d’ions”, simplifie Nicolas Heuzé, qui va créer de l'énergie.
Plusieurs expériences ont déjà été menées dans le nord de l’Europe, en Asie ou en Amérique du Nord pour réussir à capter et utiliser cette source d'énergie . “Toutes ces tentatives se basent sur l’usage d’une membrane de chaque côté de laquelle on fait passer l’eau douce et l’eau salée afin de capter la circulation ionique. Ces technologies fonctionnent mais les membranes ont deux problèmes majeurs : elles sont peu performantes et très coûteuses” , analyse le directeur général de Sweetch Energy. Conséquence : ces systèmes ne sont pas compétitifs par rapport au prix actuel de l’énergie.
Persuadés du potentiel de cette énergie, Nicolas Heuzé, Bruno Mottet et Pascal Le Melinaire se sont rapprochés du laboratoire du professeur Lydéric Bocquet (CNRS/ ENS) qui a observé, pour la première fois, “qu’avec des membranes dont les pores sont plus larges (à l’échelle nanométrique), on pouvait faire circuler plus rapidement et de façon plus dense les ions, qu’avec les anciennes membranes” , développe le PDG de la société. Mais cette découverte possédait un point faible : elle avait été réalisée dans un laboratoire à partir de matériaux très onéreux.
La jeune pousse rennaise a donc recruté une équipe de chercheurs qui a travaillé pendant plusieurs années sur la manière de passer “d’un nanotube à une membrane performante et abordable”. "L’un des objectifs était d’avoir des matériaux qui ne soient pas coûteux et facilement disponibles. Nous avons réussi" , confie t-il, précisant que son approvisionnement peut être réalisé en France. Ce qui permettra à la société de déployer rapidement sa technologie une fois qu’elle aura fait ses preuves avec sa première centrale pilote qui devrait voir le jour en 2023.
Objectif 2023
Sweetch Energy s’est fixée pour objectif 2023 pour faire émerger sa première centrale pilote basée sur sa solution technologique nommée INOD pour produire de l’électricité 100% renouvelable et continue à grande échelle. Ce qui lui laisse encore quelques mois pour peaufiner son modèle.
Pour l'aider dans son projet, la société possède le soutien de la Compagnie nationale du Rhône (CNR) avec qui elle a noué un partenariat il y a un mois et demi. En s’intégrant à l’embouchure du fleuve, la technologie développée par Sweetch Energy viendra compléter les solutions déjà exploitées sur le fleuve pour augmenter la quantité d'électricité produite.
Cette année, la société se concentrera donc sur la création d'un prototype. Une phase de modélisation et de tests techniques sera d’abord réalisée au CACOH, le laboratoire intégré de CNR et des tests seront effectués pour déterminer l’emplacement idéal au déploiement du premier pilote, prévu pour 2023. Si les délais sont tenus, l’énergie osmotique de l’embouchure du Rhône pourra permettre de produire 4 millions de MWh à l’horizon 2030, deux fois la consommation annuelle des habitants de la ville de Marseille.