Si la moitié des stations essence actuelles fermaient demain, il serait difficile, pour les propriétaires de véhicules à essence, d’effectuer leurs déplacements… C’est exactement le problème inverse qu’il faut résoudre pour permettre la démocratisation des voitures électriques. Impossible de les rendre accessibles à tous si la France ne dispose pas de plus de points de recharge. C’est l’une des missions que s’est donnée Chargemap, startup française spécialisée dans la cartographie des bornes, lancée par Yoann Nussbaumer, et qui veut lever les freins empêchant le déploiement de la voiture électrique : coût, nombre de bornes et accessibilité, impossibilité de payer directement par carte bancaire…
" En 2009, alors que je souhaitais acheter une voiture électrique, il n’y avait aucune cartographie des bornes à disposition. C’était un frein considérable. C’est pour le contourner que j’ai eu l’idée de monter Chargemap. Faire de cette plateforme un outil collaboratif était alors fondamental ". La création de son entreprise n’a finalement pu émerger qu’en 2015.
Mais la startup a, dès l’année suivante, levé un million d’euros, grâce au potentiel du développement, au-delà de la solution de cartographie, d’un moyen de paiement universel. Alimentée par la communauté d’utilisateurs et utilisatrices, Chargemap est donc aujourd’hui, aussi, une solution de paiement opérationnelle dans près de 250 000 bornes en Europe. Elle offre ainsi la possibilité à ses utilisateurs et utilisatrices d’ajouter des commentaires et avis sur les différentes bornes.
L’éternel enjeu du financement
L’apparente rapidité entre la création et la levée de fonds cache néanmoins un chemin semé d'embûches, de portes qui se ferment puis s’entre-ouvrent à nouveau, de difficultés à trouver les bons interlocuteurs, de preuves à apporter, en espérant être finalement approuvé par les financeurs. Car si la voiture électrique bénéficie aujourd’hui d’une réputation flatteuse, en 2015, elle passait encore sous les radars des partenaires financiers traditionnels. “Elle n’était l’affaire que de quelques passionnés, se souvient Yoann Nusbaumer, et le marché peinait à exister, car nous manquions de modèles en la matière” . Autant dire que les investisseurs sur ce marché était frileux… D’autant plus pour une startup indépendante, non rattachée à un constructeur automobile ou à un fournisseur d’énergie. Dans ce contexte, difficile, pour Yoann Nussbaumer, de rencontrer des partenaires prêts à se lancer : " les financeurs n’étaient pas tous convaincus. Notre business n’était pas évident à trouver, le marché n’était pas mature ".
Malgré tout, en 2016, Chargemap réussit sa première levée de fonds auprès de Cap Innov’Est de Bpifrance et de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME). Puis, la route de la startup strasbourgeoise croise celle de la Caisse d’Epargne et notamment son dispositif Neobusiness, dédié à l’accompagnement et au financement des entreprises innovantes. Une rencontre déterminante pour la croissance de l’entreprise, selon Yoann Nussbaumer : " Mon premier interlocuteur, Sébastien Pierre, Directeur adjoint dans le centre d'Affaires Alsace chez Caisse d'Epargne Grand Est Europe, a compris tout de suite notre ambition, mais aussi nos problématiques. Nous avions besoin d’un financement, mais ne pouvions pas présenter 3 exercices comptables complets, mais il nous a fait confiance et a cru en nous. "
De son côté, Sébastien Pierre confirme l’intérêt de trouver l’interlocuteur qui comprendra les besoins d’une toute jeune entreprise qui porte une vision ambitieuse, sur un marché encore méconnu : " Le premier accompagnement consiste à mettre en face du dirigeant un chargé d’affaires qui soit capable de comprendre les problématiques propres à l’entreprise innovante, en saisir les enjeux et la stratégie qui en découle, pour en analyser les risques ".
Un accompagnement bancaire et humain
Cette rencontre a débouché sur un double dispositif. Un accompagnement humain, avec l’affectation à Chargemap d’un chargé d’affaires dédié, capable de comprendre les problématiques propres à l’entreprise innovante, en saisir les enjeux et la stratégie qui en découle pour en analyser les risques. Mais aussi un accompagnement bancaire, sous la forme d'un Prêt Innovation (pour finaliser le développement d’une solution de gestion de flotte), d’un prêt immobilier (pour l’acquisition du siège de l’entreprise) et d’un Prêt Garanti par l’État (PGE) ainsi que d’un prêt relance FEI, les confinements ayant eu pour effet de diminuer les recours au réseau des bornes de recharges pour VE.
Autre facteur clé de la réussite de cette relation particulière : le temps. Bien souvent, il n’a pas la même valeur ni la même limite, que l’on soit d’un côté ou de l’autre du chéquier. Quand le dirigeant a besoin de réponses, de validations ou d’orientation, le financeur a, lui, besoin de temps pour analyser puis décider. Yoann Nussbaumer confirme ces tempos discordants parfois difficiles à concilier : " les échelles de temps sont très différentes. Pour nous, tout peut aller très vite, dans un sens ou dans l’autre, il faut pouvoir être réactif, s’adapter. C’est pourquoi compter sur un interlocuteur qui ne vient pas de ce milieu, mais en comprend les codes et les impératifs est si précieux ". Les solutions de prêts proposées par la Caisse d’Epargne à Chargemap ont ainsi permis à la startup de pouvoir attendre sereinement que l’entreprise génère un bénéfice après la fin du premier financement de CapInnov’Est.
L’urgence climatique en ligne de mire
En 2022, la situation a changé pour le secteur des voitures électriques. Face à l’urgence climatique, l’opinion publique est de plus en plus favorable à l’émergence de systèmes moins coûteux pour la planète. En outre, depuis la crise sanitaire, de plus en plus de citoyens français posent un regard critique sur leurs modes de déplacement et cherchent à réduire leur empreinte carbone. Mais beaucoup s’interrogent encore sur le “comment” , si l’on en croit l’étude Ipsos réalisée pour Vinci Autoroutes en juillet 2021. Celle-ci révèle que, si population française est prête à réduire l’impact environnemental de ses déplacements (90%), elle a encore majoritairement recours au véhicule individuel comme mode de transport (à 67%). La même enquête affirme par ailleurs que près de 7 personnes sur 10 prévoient ou réfléchissent à acheter une voiture électrique dans les 5 ans. Les chiffres des ventes des voitures électriques neuves en France prouvent d’ailleurs cette tendance : elles ont augmenté de 279% entre 2019 et 2021.
Pour Yoann Nussbaumer, le futur est donc prometteur pour le secteur : " On est en plein basculement du marché. On repère tous les jours de nouvelles solutions, de nouveaux services. Le déploiement des bornes est massif, l’adhésion du grand public aussi, les batteries sont de plus en plus performantes, tous les voyants sont au vert ". La couleur de l’espoir, pour une transition qui en respecte le code couleur.
Néobusiness, partenaire média de Maddyness
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