Les structures d’accompagnement
Les Sociétés d’accélération du transfert de technologies (Satt) passent au crible les innovations susceptibles d’être valorisées au sein des laboratoires académiques. Au nombre de 14 et réparties à travers la quasi-totalité des régions, elles ont une vision à 360 degrés quant aux technologies spatiales qui émergent en France. De quoi permettre aux aspirants entrepreneurs de faire leur repérage, pour imaginer la solution à commercialiser.
Connect by Cnes est une initiative du Centre national d’études spatiales (Cnes), qui vise à démocratiser et stimuler les nouveaux usages en matière de SpaceTech. "Une sorte de guichet d’accompagnement à destination des startups et entreprises devant permettre de comprendre leurs besoins et les aider à identifier des usages du spatial stratégiques pour leur développement" , détaille Frédéric Adragna, responsable du programme. Le président du Cnes, Philippe Baptiste, avait d’ailleurs encouragé, peu après sa prise de fonction en avril 2021, la structure à accepter le risque de signer des contrats avec les SpaceTech pour leur permettre d’être "plus disruptives" et de gagner la confiance des investisseurs.
Les ESA Business Incubation Centres (ESA Bic) fédère des incubateurs – une dizaine en France à date – soutenus par l’Agence spatiale européenne (ESA). Ils visent à soutenir les entreprises du spatial au sens large : celles travaillant dans les infrastructures (New Space), tout comme celles spécialisées dans l’utilisation de données spatiales. Bénéficiant d’un financement du Cnes, la structure se divise en deux composantes en France : l’ESA Bic Nord France (coordonné depuis Brest) et l’ESA Bic Sud France (depuis Toulouse). Elles proposent une incubation de 12 à 24 mois, des financements dédiés allant jusqu’à 50 000 euros, ainsi qu’une série d’actions de promotion. "158 startups ont été accueillies au sein des ESA Bic français, à date : 108 au Sud et 50 au Nord" , note Frédéric Adragna.
Plusieurs pôles de compétitivité, tel qu’Aerospace Valley, ont fait du secteur aéronautique et spatial leur cœur d’activité. Y est proposée une batterie de services pour accélérer le développement des entreprises innovantes. L’aide apportée comprend ainsi un travail de fond devant permettre au dirigeant d’agrandir son réseau, de rester informé quant à l’actualité de la filière, de labelliser son projet, de trouver une expertise technologique, de faire financer son projet de R&D ou bien d'accéder à de nouveaux marchés. Aeropace Valley fait notamment partie du réseau Copernicus Relay, mis en place par la Commission européenne en 2017.
Space Founders propose un accompagnement gratuit aux néo-entrepreneurs du secteur. Ouvert aux initiatives européennes, peu importe leur nationalité, l’incubateur retient deux cohortes de dix startups chaque année. Il offre un accompagnement de trois mois, depuis deux places fortes de l’aérospatial en Europe : Toulouse et Munich (Allemagne). Les futurs dirigeants qui y prennent part profitent de 40 heures d’ateliers, d’une dizaine de keynotes inspirationnelles, d’une centaine de mentors du secteur – qui dispensent une cinquantaine d’heures de cours et des sessions de conseil – ainsi qu'un accès privilégié aux divers investisseurs. Le programme se conclut par une journée dédiée aux démonstrations, à Paris.
Tech for the moon est, lui aussi, un incubateur réputé du secteur. Contrairement à Space Founders, il se focalise sur les technologies destinées à permettre à l’Homme de "vivre et travailler sur la Lune". Si la finalité est ambitieuse, les cinq startups qui composent chaque promotion doivent toutefois avoir prouvé que leur solution répond dans un premier temps à un besoin terrestre. Trois thématiques sont, de ce fait, prioritairement ciblées : l’accès aux ressources énergétiques, la construction d’infrastructures autonomes et l’anticipation des risques en matière de santé. Des professionnels issus des grands groupes ou jeunes pousses du secteur et des investisseurs aguerris encadrent ce programme de 12 mois.
Porté par l’incubateur spécialisé Starburst, le programme d’accélération Blast est l’un des plus complets à ce jour : il concerne aussi bien le spatial que l’aéronautique et la défense. "S’étalant sur une durée de trois mois, il est notamment encadré par une soixantaine de mentors de l’Office national d'études et de recherches aérospatiales (Onera) et de l’École polytechnique" , explique Christelle Astorg-Lépine, qui en est la coordinatrice. Co-financé par le Programme d’investissements d’avenir (PIA), il a l’avantage de faciliter l’octroi de subventions pouvant aller jusqu’à 50 % du coût total du projet pendant les deux premières années. L’enjeu est de répondre aux besoins de l’industrie en pérennisant des startups par le biais de contrats commerciaux et de collaborations avec les groupes privés ou publics.
Les fonds d’investissement
CosmiCapital a été créé à l’initiative du Cnes, de Bpifrance et Karista. Il vise une capacité d’investissement totale de 70 millions d’euros d’ici à la fin 2022, pour injecter en moyenne 3,5 millions d’euros dans 15 à 18 startups ces dix prochaines années. "Nous souhaitons investir dans des entreprises jeunes avec peu ou pas de chiffre d’affaires, et nous ciblons toute la chaîne de valeur" , avait expliqué Olivier Dubuisson, président de Karista, lors du lancement de la structure. Trois quarts des investissements sont prévus dans les activités downstream – qui permettent de récupérer et d’exploiter les données spatiales pour des applications terrestres comme les transports, l’agriculture, la finance ou la santé. Le quart restant sera ciblé sur les activités upstream, les technologies satellitaires et de lanceurs.
Le fonds Cassini, lancé par l’Union européenne, sera doté "d’au moins un milliard d’euros sur les cinq prochaines années". Son but principal : créer un engouement pour le secteur, car chaque euro public investi par le Fonds d’investissement européen (FEI) devra drainer "3 à 4 euros" de plus de la part d’investisseurs privés. Ces derniers rechignent à se lancer seuls dans des opérations qu’ils considèrent risquées, conduisant 80 % des startups à financer leur croissance auprès de fonds américains ou bien asiatiques. Or il en va de la souveraineté européenne. "Au-delà de son rôle de financeur, Cassini comprend diverses initiatives et agit à la manière de Connect by Cnes à l’échelon européen" , pointe Frédéric Adragna.
Geodesic est le dernier né des fonds d’investissement français dédiés à la SpaceTech. Initié par Charles Beigbeder, à la tête de la société de capital-investissement Audacia, ce dernier vise une taille de "plusieurs centaines de millions d’euros". Une manne nécessaire au développement des entreprises innovantes du New Space, qui seront "une quinzaine en trois ans" à bénéficier d’un investissement entre l’amorçage et la série B. Geodesic a pour but d’entrer au conseil d’administration de chaque jeune pousse sélectionnée afin de l’aider à se structurer puis se développer en Europe, voire même en Asie à moyen terme.
Starburst s’apprête à lancer un fonds d’investissement pour financer des tours plus avancés. Doté d’une capacité d’investissement totale de 300 millions d’euros, ce dernier visera à "pallier les blocages qui demeurent à partir de la série B" à en croire Christelle Astorg-Lépine, qui s’étonne que "des acteurs aussi spécialisés soient contraints de se mobiliser" pour créer de telles opportunités de financement. Si la date de lancement n’est pas encore arrêtée, la structure promet déjà de donner un coup d’accélérateur au secteur.
À noter que certains fonds généralistes marquent, depuis peu, un intérêt grandissant pour la SpaceTech. Les suivants ont mis un ticket au moins dans une startup du secteur : 360 Capital (dans Unseenlabs), Techmind (SpaceSense), Cathay Innovation (Kayrros) ou UI Investissement (Venture Orbital Systems). L’écosystème du financement s’ouvre peu à peu.
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