La France se maintient à un bon niveau en matière d’investissements dans l’e-santé – un domaine qui regroupe les outils numériques et robotiques destinés aux professionnels de santé. C’est ce que met en avant, pour la deuxième année consécutive, le recensement des fonds réalisé par Karista. La société française de capital-investissement, qui se livre à cet exercice dans le but d’"identifier des acteurs aux côtés desquels co-investir" , note que les amorçages restent majoritaires en Europe de l’Ouest. 63 % des 626 startups opérant dans l’e-santé ont ainsi été créées au cours des cinq dernières années. Le secteur a, en 2021, collecté 4,23 milliards d’euros – dont 577 millions en France. "Soit près de trois fois les 1,45 milliard amassés en 2020" , souligne aussi auprès de Maddyness Catherine Boule, directrice générale de Karista. Son équipe a "réalisé des études sectorielles et épluché le Web" pour obtenir ce résultat qui inclut les fonds ayant réalisé trois investissements au moins dans l’e-santé.
44 fonds français, dont 6 spécifiques
Dans le cadre de cette édition 2022, le "mapping" de Karista dénombre 143 fonds actifs dans l’e-santé en Europe occidentale. Soit une hausse de 61 % par rapport à l’an passé : 17 nouveaux fonds se sont ajoutés en France, et 37 dans les autres pays européens. Réalisé chaque année, ce travail de recensement a pour vocation de devenir un outil pour les startups du domaine qui cherchent à se financer. Cette nouvelle mouture confirme l’avance de la France sur les autres pays européens en nombre de fonds investissant dans le domaine : elle en compte 44, dont 6 dédiés. Ce qui représente 32 % des fonds européens, contre 23 % pour le Royaume-Uni et 20 % pour l’Allemagne. "Attention au leurre, avertit toutefois Catherine Boule. Le Royaume-Uni reste le premier pays en nombre de deals et en montants investis" – avec 1,96 milliard d’euros. Les méga-tours de tables restent très anglo-saxons, malgré deux méga-tours en France : Alan et Dental Monitoring.
L’état des lieux réalisé par Karista se veut le miroir de la jeunesse des sociétés du secteur, qui reste en consolidation. Les montants des opérations ont cela dit augmenté, témoignant de la maturation de l’écosystème. "Sachant que le nombre de deals n’a pas explosé, cela signifie que l’investissement moyen a progressé à 17 millions d'euros" , explique Catherine Boule. Les fonds early stage ont encore de beaux jours devant eux : 79 des 143 fonds au niveau européen n’investissent qu’à ce stade de développement, soit 57 % au total. "Et le niveau se maintient, car l’intérêt européen pour le domaine est encore récent. La majorité des nouveaux entrants (56 %) sont eux-mêmes early stage" , relève la directrice générale de Karista, qui souligne que les fonds multi stages "réalisent, eux aussi, une percée" (+68 % sur un an, avec quelque 17 nouveaux investisseurs). À en croire Catherine Boule, "les opérations de late stage vont monter en puissance à mesure que l’écosystème mûrira" .
Une trentaine de sorties en 2021
Si les opportunités sont souvent peu évidentes dans la BioTech, la performance est bien plus accessible dans la MedTech, selon Karista. Un phénomène qui a été exacerbé par la crise sanitaire du Covid-19. "On voit l’arrivée d’acteurs du financement d’un plutôt bon œil, assure Catherine Boule. Il y a beaucoup d’argent sur le marché, et il existe un flux continu d’opportunités." La directrice générale appelle, tout de même, à structurer l’écosystème du financement afin que celui-ci se répartisse harmonieusement en fonction des besoins. "La masse n’est pas encore tirée par les méga-deals et les fonds dédiés" , regrette-t-elle. Les grands groupes renforcent toutefois, via le corporate VC, leurs capacités d’investissement.
À noter, par ailleurs, qu’une nouvelle catégorie de fonds fait cette année son entrée dans le "mapping" de Karista : les family offices. Sur les sept recensés, quatre sont français : Majycc eSanté Invest, Kima Ventures (Xavier Niel), Aglaé Ventures (famille Arnault) ainsi que PJP Investissements. "Nous n’avons, toutefois, qu’une vue partielle : tous ne rendent pas leurs décisions d’investissement publiques" , reconnaît Catherine Boule, qui entend se syndiquer avec certains des acteurs figurant dans le mapping pour mener les prochaines opérations de Karista. L'effort doit aussi permettre à la société de capital-investissement de "positionner son prochain véhicule" , en fonction des besoins observés. Pour mémoire, elle nous annonçait fin 2021 vouloir être "active en 2022, avec trois fonds à déployer et un à lever" .