Vins sans alcool, étiquettes soignées, flacons de luxe... Dans les allées du salon professionnel Wine Paris & Vinexpo, qui se tient à Paris du 14 au 16 février 2022, les producteurs retrouvent les acheteurs après le choc de la pandémie de Covid-19. Et cherchent à se distinguer les uns des autres par l'innovation, pour grignoter des parts de marché.
De toutes parts, les verres tintent et les bouchons sautent. Bousculée par deux ans de crise sanitaire, qui a réduit les occasions de trinquer, la filière viticole fête ses retrouvailles au parc des expositions de la porte de Versailles. Arrivé en France la veille, James Graham présente plusieurs nuances de porto, qu'il produit sur son exploitation familiale au Portugal, du rouge sombre à l'orange mandarine. Le Luso-Britannique souhaite "gagner en visibilité auprès des restaurateurs" , ses principaux clients, dont l'activité a été stoppée à maintes reprises durant la crise sanitaire.
Du côté des vins du sud de l'Hexagone, l'on chantonne autour d'un (voire plusieurs) verres de rosé. Sur certains stands, les bouteilles sont exposées et éclairées telles des bijoux dans des meubles vitrines. Chris Goldman est là pour les rosés de Provence. Sac à dos XXL sur les épaules, il tente de se frayer un chemin dans l'espace de dégustation où s'alignent des dizaines de bouteilles en libre service. L'acheteur anglais sélectionne "les plus pâles" floqués de "jolies étiquettes" , car "les gens achètent tout d'abord avec les yeux" , précise-t-il.
Malgré le Brexit, le Royaume-Uni reste deuxième importateur de vins et spiritueux français, après les États-Unis. Quelques mètres plus loin, on se presse près du stand de la coopérative Java Sud-Ouest. Il est midi passé, les Basques ont sorti le jambon de Bayonne, et le rouge. Iban Riouspeyrous est heureux de promouvoir ses nouvelles cuvées, issues du cépage Irouléguy, une des plus petites appellations de France (270 hectares). "On est très content de se retrouver" , souligne-t-il, dans un sourire coloré par le tanin.
En quête de "gros poissons"
Entre les Corses et les Bordelais, des entrepreneurs animent l'espace de la "Wine Tech" , dont le nom est affiché en hauteur sur fond rose, en grandes lettres capitales. Les innovations destinées à la filière vini et viticole éveillent l'attention des curieux. Aérateurs de vin à effet quasi-instantané, étiquettes en réalité augmentée, flacons de grands crus pour le service au verre... Trente startups de la Wine Tech sont présentes sur le salon mais la pépinière en compte 71, dont le champ d'action va "de la vigne au verre" , précise son président Laurent David.
Des "projets Covid" , pour certaines : cet ancien de chez Apple raconte notamment que les plateformes spécialisées dans la vente de vin en ligne ont doublé durant la crise sanitaire, à la suite d'une demande forte des vignerons. "Il y a encore beaucoup à faire mais le besoin est là" , explique Laurent David, qui entend "aider la filière viticole à se numériser" .
Au-delà, la Wine Tech accompagne les viti et vinicuteurs à travers d'autres solutions répondant aux "enjeux climatiques mais aussi concurrentiels" , avec par exemple des lampes contre le gel, ou des drones d'imagerie pour détecter gel et mildiou... Pas de vin sur ces stands tech... enfin, presque. Seulement des sans alcool et des "légers" , comme ceux à 5 degrés pensés par la startup Moderato "pour les amateurs de vin qui souhaitent réduire leur consommation d'alcool" , explique Fabien-Marchand Cassagne, co-fondateur.
Ici, il cherche à appâter de "gros poissons" comme des chaînes de cavistes par exemple, pour conquérir davantage le marché français et international où les bières sans alcool rencontrent déjà un franc succès. Yann Guislain, caviste à Versailles, est venu "voir ce qui se fait et trouver de bonnes idées" , dit-il, nez dans un verre. Il a jusqu'à ce soir pour trouver son bonheur.