Republication d'un article du 6 mai 2021
Levée de fonds, valorisation, croissance exponentielle, labels, programmes gouvernementaux comme Next40, FT120 ou le récent FT Green 20... Aujourd’hui, le succès des startups s’examine souvent par le prisme des financements qu’elles attirent et la croissance de leurs clients. Rien d’absurde à ça, bien évidemment. Mais dans une société où les enjeux sociaux et environnementaux sont de plus en plus importants, se cantonner à ces seuls critères peut paraitre restrictif, pour ne pas dire insuffisant. La Boussole, qui rassemble 80 structures d’accompagnement, a réalisé une étude avec le BCG sur les critères à prendre en compte pour mesurer le succès d’une startup. En plus d’une cinquantaine d’entretiens réalisés avec des structures d’accompagnement, des entrepreneurs et entrepreneuses et des investisseurs, 106 startups ont été interrogées.
La levée de fonds n'est pas un critère exhaustif
Aujourd’hui, en l’absence d’autres informations et d’indicateurs plus larges, les critères d’évaluation du succès et de la réussite d’une startup se concentrent quasi exclusivement sur le montant de leurs levées de fonds et la valorisation qui en découle. En témoignent, les critères utilisés par le Next40 et FT120, deux classements qui sélectionnent les startups les plus prometteuses, ou encore la mise en avant de startups dans les médias suite à d'importants tours de table. Ce qui conduit parfois certains entrepreneurs et entrepreneuses à courir après la levée, en oubliant que l'essentiel n'est pas là. Si celles-ci peuvent s’avérer très utiles - notamment pour les entreprises ayant besoin d’un financement important en vue de s’internationaliser - elles ne doivent pas s’apparenter à un objectif en soi et peuvent parfois cacher une autre réalité. "Certaines startups qui ont réussi à se construire sans levées de fonds, via un model autofinancé, ne sont pas présentes dans le Next40 et n’entrent pas dans les critères des licornes alors qu’elles sont incroyables" , regrette Paul Jeannest, co-fondateur et co-président de la Boussole également CEO du RaiseLab.
Suite aux entretiens menés auprès des acteurs de l'écosystème, la Boussole a développé une nouvelle cartographie de critères pour évaluer le succès ou non d'une startup. Ils sont répartis en 4 catégories :
Impact économique (prépondérant )
- Croissance reste un critère important pour mesurer le succès. .
- Financement qui ne se limite pas aux levées de fonds. "La levée de fonds est emblématique mais possède des inconvénients comme la dilution du capital de l’équipe fondatrice, développe Lionel Are, Senior Partner au sein du BCG. L’ensemble des dépenses engagées et à venir doivent être réfléchies sous l’angle de l’auto financement" .
- Rentabilité à court, moyen et long terme.
Impact sociétal
- Impact positif sur l’environnement au sens large du terme : climat, pollution de l’air, préservation de l’écosystème, de l’eau…
- Impact social
- Redistribution de la valeur au sein de l’écosystème startup
Gouvernance
- Emploi et expérience collaborateur : égalité homme/femme, inclusion, formations, écart salarial, recrutement en CDI). Loin d’être anodin, ces critères sont devenus essentiels pour le recrutement des nouveaux collaborateurs et nouvelles collaboratrices
- Gouvernance et management : mécanisme de BSPCE existants
- Développement responsable
Innovation
- Création de nouveaux usages : création d’un produit ou d’un service inexistant avant.
- La manière d’accéder au marché
- Les modèles alternatifs de rémunération (comme la vente de données)
Pour les startups, le point cardinal est celui de l’innovation, suivi de l’impact social, de la gouvernance responsable et de l’impact économique. Et elles sont nombreuses - 68% - à avoir déjà mis en place des indicateurs extra-financiers pour analyser le succès de leur structure, selon l'étude. Mais on s’aperçoit que ces bonnes intentions ne sont pas forcément suivies des faits puisque seules 56% d’entre elles les suivent dans le temps.
Les startups françaises en quête d'accompagnement
Le bilan effectué par le BCG et la Boussole souligne également l'évolution de l'écosystème entrepreneurial français qui s'est bien développé au cours des dernières années. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : en 2017, l'Hexagone comptait "seulement" deux licornes et un montant global des levées de fonds de 2,8 milliards d'euros contre 12 licornes aujourd'hui et plus de 7,7 milliards d'euros de financement.
La croissance du nombre de startups créées, l'intérêt des fonds d'investissements français mais aussi étrangers - américains notamment - prouvent que l'écosystème se structure. Ce que les entrepreneurs et entrepreneuses voient plutôt d'un bon oeil. Ils estiment, en effet, que cela facilite le développement des entreprises (46 %), le financement (59%) et le déploiement de meilleures offres d'accompagnement (61%) . Et ce dernier point est essentiel car les entrepreneurs en sont très friands.
Sur la centaine de fondateurs et fondatrices interrogé·e·s, 86% répondent avoir besoin d'un soutien dans leur développement, principalement des mentors, d'ex-entrepreneurs ou des investisseurs.