Sauver des victimes d’arrêt cardiaque en refroidissant leurs poumons. C’est le défi que s’est fixé la startup Orixha, née de la rencontre de travaux académiques menés à l’université de Sherbrooke (Canada), à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et à l’École nationale vétérinaire d’Alfort (EnvA). "À l’aide d’un support respiratoire, on peut thermoréguler les poumons de manière à ce qu’ils agissent comme un refroidisseur du système sanguin et donc, in fine, du cerveau et du cœur" , indique à Maddyness Fabrice Paublant, son président. Dans l’optique de consolider ses prototypes, avant de demander "d’ici à 2024" le marquage CE des dispositifs médicaux, Orixha annonce ce mercredi 22 novembre 2021 une levée de fonds en amorçage à hauteur de 2 millions d’euros. Elle a ainsi reçu le soutien d'Angels Santé, Erganeo, InfiPlast, OEM Development et Activation.
Sauver 10 000 vies par an
Les secours n’arrivent, en moyenne, à temps que dans un tiers des cas d’arrêt cardiaque. Un autre tiers des victimes décèdent à l’hôpital, du fait du choc cytokinique – un puissant phénomène inflammatoire – découlant de l’infarctus. "Actuellement, les patients meurent dans les deux tiers des cas" , constate amèrement Fabrice Paublant. En faisant passer les organes cibles, tels que le cœur, de 36 à 32 ou 33 degrés, Orixha affirme pouvoir "mettre un coup de frein à la tempête cytokinique". "On n'a pas les moyens de le faire aujourd’hui, observe le dirigeant. La solution permet de protéger ces organes vitaux." Concrètement, le dispositif de la startup permet d’envoyer "un litre d’un liquide respirable" dans les poumons pour "descendre la température du sang et du cœur en 10 minutes et du cerveau en 15". Ce que ne permettent pas de faire aussi vite les couvertures rafraîchissantes utilisées par les secours, puisque la peau constitue selon Fabrice Paublant "un bon isolant thermique".
Orixha a jusqu’ici mis son prototype de ventilation liquidienne à l’épreuve sur des porcs et des lapins, deux animaux qui présentent d’après elle "des similitudes avec l’Homme sur le plan cardiovasculaire". "Les premiers résultats sont encourageants : alors que le taux de survie est compris entre 15 et 25 % sans assistance, notre approche affiche un taux de 60 à 90 % de survie, se félicite Fabrice Paublant, qui admet que le bond ne sera sans doute pas aussi important chez l’humain. Notre but est d’augmenter d’au moins 15 % en valeur absolue les chances de survie." Le dirigeant envisage un début des essais cliniques début 2023, afin de décrocher le marquage CE des dispositifs médicaux un an plus tard et de lancer la commercialisation en 2025. "Il nous faudra démontrer, d’ici là, que l’efficacité est telle qu’une prise en charge par les organismes payeurs est justifiée" , avance-t-il ainsi.
La MedTech assure qu’elle sera, une fois le produit en vente aux hôpitaux, établissements de santé et secours, à même de "sauver 10 000 vies par an en Europe et en Amérique du Nord". Elle ambitionne d’ores et déjà de lever une série A de 15 millions d’euros en 2023 afin de financer l’étude clinique qu’elle mènera en lien avec les hôpitaux Cochin (Paris) et Erasme (Bruxelles) sur "quelques dizaines de patients". Son tour de table en amorçage lui permettra, d’ici là, d’étoffer son équipe qui se compose actuellement des cinq co-fondateurs et de deux consultants. Orixha aura besoin d’experts des affaires réglementaires pour décrocher le marquage CE, puis l’agrément de la Food and Drug Administration (FDA) aux États-Unis "dès 2027". Elle compte, aussi, sur l’appui de ses premiers investisseurs – OEM, InfiPlast et Activation – pour industrialiser son produit. L’entreprise a fort à faire, mais elle exprime déjà la volonté d’aller plus loin en s’attaquant vite à de nouvelles pathologies… qui restent, pour l’heure, tenues secrètes.