Même le deuil a désormais son réseau social. Il existe des réseaux pour échanger autour de la cuisine, du dating, des enfants... mais la mort reste un sujet tabou dans notre société. Pourtant, elle engendre quantité de questionnements, qu'ils soient de nature très pratique (a-t-on jamais eu de cours pour organiser des obsèques ?) ou au contraire quasi-ésotérique. C'est pour partager ces interrogations, parfois y répondre, souvent pour apporter un peu de soutien et de réconfort, que Marie-Bérangère Salmon et Baptiste Rippes ont créé Alanna, une " plateforme sociale " dédiée aux personnes endeuillées. " Nous voulons aider les personnes à se rassembler pour adoucir cette épreuve et simplifier le partage du souvenir et l’organisation des démarches. Nous pensons que le numérique peut aujourd’hui jouer pleinement son rôle dans les interactions, les échanges, le soutien pendant ce moment, en facilitant les démarches et le rapprochement familial. "
Alanna reprend ainsi les codes des réseaux sociaux à succès : des espaces de discussion, des profils à renseigner, des fonctionnalités pratiques de partage et la possibilité de rendre ou non certains espaces publics, grâce à des critères de confidentialité. Autant de fonctionnalités qui, appliquées au deuil, prennent tout leur sens. Les profils deviennent des biographies en hommage aux morts, les fonctions de partage servent à envoyer les faire-parts ou les remerciements, la confidentialité multi-niveaux permet de séparer les contingences d'organisation avec la famille, par exemple, des déclarations publiques et les espaces de discussion se montrent particulièrement utiles pour partager des conseils notamment administratifs et éviter d'inutiles tracas qui ajoutent à la douleur du moment.
" Le monde évolue, le regard sur la mort doit changer également ", intime Marie-Bérangère Salmon. Et si le deuil devient un marché comme un autre, pas question pour Alanna de devenir un Facebook du deuil - avec toutes les dérives que cela implique. La plateforme chiffre les données et se rémunère grâce à un modèle hybride, qui combine une commission prise sur les services des professionnels du deuil embarqués par la plateforme et de la publicité. Elle a déjà opéré une première levée de fonds de 200 000 euros et espère en boucler une nouvelle dès l'année prochaine. Il faut dire que la Deathtech est en plein essor, de nombreuses entreprises se lançant dans le secteur. Mieux vaut donc avoir les reins solides pour ne pas finir au cimetière des startups.