Placer son argent à un taux garanti de 3%, la proposition était plus qu’alléchante, surtout au regard des 0,75% promis par le livret A des banques traditionnelles. L’offre proposée par Swoon a trouvé preneur mais sa récente faillite, annoncée en août dernier, plonge dans la tourmente plusieurs centaines de clients qui ont investi quelques milliers ou dizaines de milliers d’euros et se demandent s’ils en reverront un jour la couleur. "Ils ont joué sur la proposition de valeur avec un livret A rémunéré à hauteur de 3% par rapport aux banques traditionnelles qui est rémunéré à moins de 1%. En regardant leur modèle, on ne peut pas parler d’épargne" , souligne d'entrée Louis-Arnaud Nguyen. En effet, le système est très loin de celui d’une épargne traditionnelle garantie. La néobanque proposait des financements avec des intérêts à hauteur de 5% auprès "d’entreprises refusées par les banques traditionnelles" , reversait une partie (3% donc) aux épargnants et conservait les 2% restants. "C’est une sorte d’asset management déguisé" , pointe l’expert financier, c'est-à-dire, un modèle de gestion pour compte de tiers.
Au-delà du système de crowdlending - investir dans des PME à travers le financement participatif et via une plateforme numérique — c’est l’objectif final qui est remis en cause par l’expert. "Un taux de 3% était bien trop ambitieux, un taux de 1% au départ aurait été plus prudent" en attendant d’avoir une masse de clients critique, estime t-il. Un avis partagé par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), interrogée récemment par l'AFP. C’est finalement l’adéquation de tous ses éléments, et le faible nombre de clients acquis qui a fait s’effondrer Swoon.
Les garanties manquent à l'appel
Si le président de Swoon, Quentin Haddouche, défend dans Moneyvox, vouloir "récupérer l’intégralité de l’argent et le restituer aux clients", l’expert d’Azzana Consulting pointe l’absence de garantie apportée aux consommateurs par certaines FinTech. "Il faut être attentif aux agréments et aux garanties" , que ces structures fassent appel à des intermédiaires - comme Qonto avec Oktober - ou opèrent par elles-mêmes, rappelle Louis-Arnaud Nguyen. Dans ce dernier cas, et si les entreprises possèdent un agrément bancaire, "elles offrent des garanties plus importantes" , ce qui signifie qu’en cas de faillite, les clients sont assurés de percevoir un remboursement minimum de leur investissement. "Que vous soyez démarché, que vous souhaitiez placer votre argent chez un courtier en ligne, ou encore contacter un conseiller en investissements financiers, il est important de vérifier l'agrément de votre interlocuteur et des produits qu'il vous propose" , confirme d’ailleurs l'Autorité des marchés financiers sur son site.
Un modèle difficilement rentable
Cette faillite ne remet néanmoins pas en cause le modèle des néobanques, dont le fragile équilibre réside entre l’apport "de services différencient et l’atteinte d’une masse critique de clients" et peine à être rentable. La croissance du nombre de clients est essentiel pour proposer des prix aussi attractifs par rapport aux banques traditionnelles.
Pour Louis-Arnaud Nguyen, cet échec - qui n’est pas le premier, Carrefour a abandonné le compte C-Zam en 2020 rappelle t-il - souligne deux points : le manque de cadre et la question des garanties offertes aux clients. "Tout le monde peut créer sa néobanque aujourd’hui avec un simple agrément de paiement. Il est temps de mettre un cadre et d’imposer des règles" , estime l’expert.
Afin, à la fois de protéger les clients mais aussi de lutter contre le blanchiment d’argent dans lequel les néobanques sont souvent pointées du doigt comme le souligne l’Agefi. Et les jeunes pousses ne sont pas les seules concernées. Avertie deux ans auparavant d’un manque de rigueur dans l’identification de ses clients, N26 est sous le coup d’un audit lancé par le régulateur financier allemand. Objectif : évaluer ses procédures de lutte contre le blanchiment d’argent.