Le Campus cyber, une tour de 26 000 mètres carrés à la Défense qui doit devenir le "porte-avions" de la cybersécurité française en réunissant sur un même lieu des spécialistes privés et publics du domaine, commencera à fonctionner début 2022, selon son président. "On devrait inaugurer le site avec le gouvernement au mois de janvier" , a indiqué jeudi au Forum international de la cybersécurité de Lille le président du campus et ancien patron d'Orange Cyberdéfense, Michel Van Den Berghe. Les premiers des 1500 à 2000 occupants prévus du site commenceront à s'installer à ce moment-là, a-t-il précisé.
Le campus cyber réunira des représentants d'entreprises de cybersécurité de toute taille, de la startup aux géants comme Thales ou Airbus, de services de l'État comme la police, la gendarmerie ou les renseignements, et d'instituts de recherche comme l'Inria mais aussi d'écoles spécialisées. "On voudrait en faire le porte-avions de la cybersécurité française" , capable de "faire émerger des champions français" dans ce domaine stratégique en pleine explosion, a déclaré Michel Van Den Berghe.
Créer une émulation entre les acteurs
Les acteurs privés de la cybersécurité détiennent environ 55% du capital de la société gérant le site, la participation de l'État s'élevant à 45%. En rassemblant des acteurs très divers sur un même endroit, le campus cyber doit notamment permettre l'accélération de la circulation de l'information entre les professionnels du secteur. Car c'est bien là la clé pour faire croître des startups encore trop confidentielles. "L'intérêt pour les startups, c’est de pouvoir se faire connaitre par les industriels, afin qu'ils puissent développer des offres à partir de ces technologies. Faire partie de l'offre de Thales ou CapGemini est un accélérateur extraordinaire pour les petites entreprises" , a précisé Michel Van Den Berghe à Maddyness.
Les grands comptes regardent tout particulièrement les solutions permettant de sécuriser les PME, qui n'ont pas toujours les moyens de se défendre face à des attaques toujours plus nombreuses et plus perfectionnées. "Les pirates attaquent le sous-traitant du sous-traitant, qui n'a aucun moyen de se sécuriser, parce que cela leur permet d'entrer dans les grands comptes." Un autre enjeu majeur consiste aujourd'hui en la sécurisation de la pharmaceutique industrielle. Alors que les établissements de santé sont dans le viseur des pirates, les acteurs du secteur doivent "accompagner le plus vite possible la transformation numérique de la santé : la cybersécurité des hôpitaux, par exemple, doit être pensée dès le départ" .
Essaimer sur tout le territoire
"On voit qu'il y a une course de vitesse" entre la sensibilisation à la menace cyber et le développement de celle-ci, a indiqué de son côté Cédric O, le secrétaire d'État au numérique. Le ministre a donc fixé un objectif particulièrement ambitieux au secteur : faire émerger pas moins de trois licornes d'ici quatre ans. Plusieurs startups, à l'instar de Tehtris, ont gagné des galons ces derniers mois mais il reste encore du chemin à parcourir pour installer durablement ces acteurs dans le paysage de la cybersécurité française.
C'est pourquoi, avant même l'ouverture du flagship de La Défense, Campus Cyber réfléchit d'ores et déjà à des hubs régionaux thématisés. "L'idée est à terme d'avoir un satellite dans chaque région française, avec une spécialisation par région, souligne Michel Van Den Berghe. La Bretagne, par exemple, possède déjà des compétences en matière de traitement des données sensibles, les Hauts de France de solutions pour sécuriser les PME..." Le campus discute avec différents territoires pour ouvrir rapidement ces succursales. "On a créé une marque, un modèle, un mode de gouvernance qu'il est possible de dupliquer dans les territoires qui le souhaitent."
Le président du Campus Cyber voit même plus loin, en dessinant les contours d'un projet européen. "Créer des liens entre différents pays européens permettra aux startups d'ouvrir plus facilement des marchés." Avec un enjeu de croissance mais aussi de souveraineté : "L'Europe doit montrer un peu ses muscles, en matière de cybersécurité. Nos startups ne doivent pas être forcées d'aller aux États-Unis pour grandir et finalement se faire racheter."