Avec la levée des restrictions à la mi-mai, le gouvernement a décidé de supprimer progressivement d'ici la fin août la plupart des soutiens d'urgence mis en place depuis le début de la crise sanitaire, comme le fonds de solidarité et l'activité partielle. Une manière de sortir du "quoi qu'il en coûte" , alors que l'activité économique reprend, même si ce retrait progressif a conduit le gouvernement à remettre plus de 15 milliards d'euros dans les enveloppes dédiées aux aides d'urgence dans son budget rectificatif adopté début juillet. Bruno Le Maire défendait alors au Parlement un texte "de transition entre protection maximale (...) et le retour à la normale" , qui signifiera la fin du 'quoi qu'il en coûte' . Mais les restrictions imposées par le pass sanitaire pourraient bien ralentir, en partie, cette fameuse reprise, ce qui inquiète certains professionnels visés par cette mesure.
Le pass sanitaire, un frein à la reprise ?
Imposé depuis mercredi dernier dans les lieux de culture, le pass sanitaire a déjà fait plonger la fréquentation des parcs de loisirs et des cinémas. Dans ces derniers, les entrées ont chuté de 70% entre mardi et mercredi selon les professionnels, qui ont évoqué "une catastrophe industrielle" , appelant l'État à augmenter le niveau d'aide, notamment la prise en charge de l'activité partielle, réduite depuis juin. Lundi, le président du syndicat national des espaces de loisirs, d'attractions et culturels (Snelac) Arnaud Bennet, évoquait lui aussi une chute d'activité de 20 à 70% selon les parcs, qui risquait de "massacrer" les entreprises.
Début août, une fois la loi sur la gestion de la crise sanitaire validée par le Conseil constitutionnel, le pass sanitaire sera aussi obligatoire dans d'autres établissements recevant du public, comme les restaurants et les cafés. Dès l'annonce de cette mesure par Emmanuel Macron mi-juillet, le principal syndicat de l'hôtellerie restauration, l'Umih, avait insisté sur la nécessité de voir les aides au secteur "maintenues et proportionnelles à la perte d'activité qui pourrait découler de ces mesures" .
Le comité de suivi appelle à un maintien des aides
Mardi, le comité de suivi et d'évaluation des mesures de soutien aux entreprises face à la crise du Covid-19 a toutefois appelé le gouvernement à la vigilance dans son rapport remis au Premier ministre, estimant qu'un maintien des aides pourrait s'avérer nécessaire. Ce rapport final, publié après un point d'étape en avril, confirme globalement que les aides massives mobilisées par l'État ont bien fonctionné. Le fonds de solidarité et l'activité partielle ont aussi permis de compenser en moyenne près de la moitié de la perte de bénéfice brut des entreprises durant la première vague, et la totalité de cette perte durant la deuxième vague. Mais le rapport souligne toutefois que les difficultés structurelles des entreprises françaises perdurent : des marges inférieures à celles de leurs voisines européennes et un endettement supérieur.
Du fait de "l'incertitude" économique engendrée par la propagation du variant delta, "le comité attire l'attention sur le fait de bien doser la sortie des dispositifs" , a déclaré à la presse son président Benoit Coeuré, en présentant son rapport final. "Cette logique incitative est absolument justifiée dans une perspective de reprise rapide, mais l'incertitude est là et si cette reprise ne se manifestait pas ou si elle était moins forte que prévu, il faut pouvoir moduler le rythme de sortie des dispositifs" , a-t-il insisté. Le comité souligne d'ailleurs que plusieurs pays européens ont prolongé leurs aides jusqu'à la fin de l'année.
Bercy attend fin août pour envisager de réviser sa copie
Lors du débat au Parlement sur la loi de gestion de la crise sanitaire, des sénateurs ont également demandé à ce que la perte d'affluence et d'activité liée au pass sanitaire soit compensée par l'État. À Bercy on renvoie le dossier à fin août, le ministre de l'Économie Bruno Le Maire ayant prévu depuis fin mai de faire un point à ce moment-là sur la situation de l'économie et des entreprises, restant tout de même ouvert au maintien de certaines aides. Ce rendez-vous permettra notamment d'avoir "un peu de recul sur la mise en place du passe sanitaire" , justifie-t-on à Bercy.
Le ministre recevra tout de même mercredi les représentants des exploitants de salles de cinéma, avec la ministre de la Culture Roselyne Bachelot. Cette "clause de revoyure n'est pas une figure de style, il y aura un vrai besoin à la fin de l'été et puis en septembre, au moment de la préparation de la loi de finance pour 2022, d'évaluer la situation macroéconomique et de voir si le scénario de sortie de crise reste le même" , a défendu Benoît Coeuré.