Le 6 octobre dernier, Ÿnsect signait l’une des plus belles levées françaises de l’année - de par son montant - le closing de sa série atteint les 315 millions d’euros - et le contexte économique. L’ampleur de l’opération visait à asseoir l’ambition de la startup, à savoir, créer une méga-usine de 44 000 mètres carrés visant la fabrication de 100 000 tonnes d’insectes par an à Poulainville, près d'Amiens. Pour faire fonctionner le futur centre névralgique de leur activité près d'Amiens, les fondateurs d’Ÿnsect envisagent de recruter plus d’une centaine de personnes qu’il faudra former. La startup a donc décidé de lancer sa propre "école de formation aux métiers de l’insecte". En réalité, l’intitulé ne correspond pas tout à fait au contenu, les formations élaborées étant destinées, non pas à des étudiants, mais à tous les futurs salarié·e·s de l’usine, quelque soit leur poste.
Mettre les salariés au diapason
Développée depuis quelques années en France, la culture de l'insecte ne s’enseigne pas encore dans les écoles d’ingénieurs agronomes ou les formations d’agriculteurs. "Travailler avec le vivant et avec les insectes est très particulier. Ce sont des métiers que nous développons depuis quelques années seulement sur notre site de Dole dans le Jura. C’est essentiel de connaître le cycle de vie d’un insecte : sa gestation, son alimentation, sa chaîne de valeur, sa transformation...que l'on soit éleveur ou chargé de communication" , détaille Anaïs Maury, directrice de la communication et des affaires publiques d'Ÿnsect.
Ÿnsect s’apprête donc à recruter une centaine de collaborateur·rice·s - soit une augmentation de 66% de ses effectifs actuels qui s'élèvent à 150 personnes dont 50 travaillent dans l'usine de Dole-, de quoi susciter une inquiétude commune à presque toutes les scaleups : faire grandir leurs effectifs sans perdre leurs valeurs et leur culture d’entreprise au passage. Pour éviter cette mésaventure, la startup mise sur la formation. Tous les nouveaux employé·e·s de l’usine, dirigeant·e·s, ouvrier·ière·s, technicien·ne·s, éleveur·euse·s...devront suivre une formation avant de rejoindre les rangs d’Ÿnsect. "Il y a un double aspect : apporter des compétences techniques et un socle de connaissances sur l’entreprise" , détaille Frédéric Julien, DRH d'Ÿnsect.
Des formations réalisées en interne par les collaborateurs
Des modules communs seront dispensés sur l’univers industriel autour de l’insecte, la politique RH et économique de l’entreprise, le temps de travail mais aussi des aspects plus techniques comme la maintenance des machines. D’autres contenus, plus spécifiques et qualifiés, seront ensuite proposés pour "permettre à chaque collaborateur de comprendre son poste de travail, ce qu’on attend de lui...sous forme d’un parcours type" , résume le DRH. Les formations seront réalisées en présentiel, des visites de l’usine existante de Dole seront organisées en complément.
Le contenu des modules est encore en train d’être mis au point par les membres d'Ÿnsect. "Cette formation répond à une véritable envie de nos collaborateurs de transmettre leurs connaissances, ils sont très demandeurs. D’ailleurs nous allons former des collaborateurs pour qu’ils deviennent aussi formateurs" , atteste Frédéric Julien. La startup n’exclut pas de faire appel à un prestataire de services pour l’aider à mettre en musique les contenus à délivrer.
Echéance à l'été 2021
Si l’entreprise est très technologique, Frédéric Julien précise qu’elle n’en est pas moins accessible. "Certains postes très pointus seront réservés à des profils très précis et seniors. Mais pour la majorité d’entre eux, nous acceptons tous types de compétences sans regarder s’ils ont un cursus industriel. Nous nous intéressons surtout à leur motivation et leur habilité" , assure t-il. Sans donner de précision pour autant sur les types de postes et le nombre d'offres d'emploi les concernant. Actuellement, Ÿnsect comptabilise 150 membres dont 91 ingénieurs. Ces formations seront aussi là pour les faire "monter en compétences" puisqu'elles donneront lieu à "des certifications d’acquisition de compétences reconnus par d’autres sociétés".
Cette stratégie s’intègre à une politique sociale plus globale. “Nous nous sommes déjà engagés à mettre en place un salaire minimum équivalent 35% de plus que le SMIC. Nous arrivons facilement à recruter, nous avons de bons résultats, c’est important de partager la valeur" , estime Frédéric Julien. Depuis aujourd’hui, les 150 salariés actuels peuvent même devenir actionnaires d’une petite part d’Ÿnsect en achetant des parts dans la société en fonction de leurs moyens. De quoi renforcer leur engagement.
L’usine d’Amiens, dont la construction a débuté en 2020, est toujours en cours. Les nouvelles machines devraient être réceptionnées à l’été, ce qui permettra aux premier·e·s employé·e·s de s’y former et de s'imprégner des procédures dès le mois de septembre. L’ouverture est, quant à elle, prévue pour la fin de l’année. "Il faudra ensuite faire venir les larves de Dole et attendre un peu avant que nous atteignons les objectifs finaux que nous nous sommes fixés, cela prendra plusieurs mois” , souligne Anaïs Maury.