En passant de 5,1 à 5,4 milliards d’euros de fonds investis entre 2019 et 2020, la France atteint des sommets. Elle est le seul pays européen du top 3 (Royaume-Uni, Allemagne, France) à avoir prospéré en 2020. De cet état de fait, et des 662 levées de fonds réalisées l’année dernière, deux tendances émergent : le pre-seed & seed perdent du galon, avec une baisse de -21% et les levées de fonds des séries A, B et C progressent de 10% en moyenne comparé à 2019.
Dans l’Hexagone, les secteurs du SaaS, mais aussi de l’e-commerce et des Marketplace ressortent grandis, avec notamment des levées de fonds impressionnantes pour Mirakl, Contentsquare, Ynsect et Ecovadis. Loin de se replier sur soi, le pays continue d'attirer des investissements de l’étranger, puisque ceux-ci ont augmenté à hauteur de 20% sur les investissements réalisés en 2020. Et si l’élan de tous vise à oublier et à se tourner vers l’avenir, travail, paiements et commerce sont les trois tendances à observer de près cette année.
Futur du travail à travers la sociabilité virtuelle
L’homme est un être social, 2020 l’a crié haut et fort. Les différents confinements auront montré deux choses : d’une part, surfant sur une remarquable capacité d’adaptation, les employés ont accompli leurs missions à distance sans mettre à mal leurs performances. D’autre part, et indépendamment de tout aspect performatif, toutes et tous ont déploré la dissolution du lien social.
Nous passons un tiers de nos vies au travail. Aussi, sans culture d’entreprise, sans contact humain, la colonne vertébrale d’une entreprise peut être ébranlée. Le lien social, mais aussi les affinités que nous créons, que nous cultivons avec collègues ou clients, alimentent notre créativité. 2021 sera donc l’année du "Future of work" , durant laquelle encore plus de start-ups s’attelleront à résoudre la problématique : comment se sentir ensemble, tout en travaillant à distance ?
Certainement grâce à la réalité virtuelle, mais aussi grâce aux nouveaux produits SaaS qui permettront aux co-workers de travailler dans une simultanéité encore plus poussée, ou encore, de nouvelles solutions de visioconférence toujours plus interactives. Conscientes du manque de liens sociaux, de nouvelles startups ont déjà fait beaucoup de bruit. Aux États-Unis, la startup Hopin, une plateforme d’événementiel virtuel d’à peine deux ans, a déjà pris le pas avec 2 milliards de dollars de valorisation lors de la dernière levée de fonds de 125 millions de dollars. Aussi, l’appétence générale pour des modèles de SaaS, créant encore plus de liens entre les employés, tend à croître de façon exponentielle.
Futur de la fintech à travers le paiement encore plus intégré
Avec 828 millions d’euros levés en 2020, les fintech françaises ont su maintenir le cap pendant la crise. Pour 2021, l’orientation est claire. Tout d’abord, 2021 sera l’année de la facilité de paiement, avec une encore meilleure intégration des solutions de paiement. Il est fort a parier que cette facilité de paiement utilise de nouvelles monnaies vu l’irrésistible ascension des monnaies décentralisées, comme le Bitcoin ou Ethereum ou encore la création de NOVI par Facebook. On observera également une croissance des systèmes back-end en Fintech- Insurtech, à l’image des sociétés américaines Plaid ou Unqork.
Il y a fort à parier que 2021 verra encore plus émerger des sociétés tournées vers ces systèmes back-end, afin de permettre aux utilisateurs privés et aux entreprises, d’envoyer et de recevoir quasi-instantanément de l’argent dans n’importe quelle devise. Facebook, à travers son application Whatsapp, teste déjà le paiement instantané en Inde.
Toujours dans le domaine de la fintech, il faudra prêter attention à l’intégration encore plus complète du paiement, pour une expérience digitale de shopping ultra-fluide. Une start-up franco américaine, Acquire.App, travaillant notamment sur le sujet depuis San Francisco, a récemment levé 1,7 millions de dollars.
Enfin, la dernière tendance fintech est le paiement 3.0 qui se dope au "Buy now, Pay later". L'intégration du paiement fractionné prendra encore plus de place chez lese-commercants. En effet, avec 60 millions de dollars de capital-risque en moins de 24 mois, la startup française Alma prouve que le paiement échelonné est en passe d’intégrer l’expérience de shopping digital des consommateurs.
Retail socio-digital
Si 2020 fut une année noire pour le retail, elle aura catalysé l’essor de l’e- commerce. Le prix de l’action de Shopify, qui héberge des magasins digitaux, en est la preuve puisqu’elle a plus que doublé courant 2020 6 . Et ce n’est qu’un début. Entre la facilitation du paiement en ligne, l’analyse data du consommateur, ou encore le suivi du coût d’acquisition... Le champ d’action est immense et 2021 sera sans nul doute l’année du e-commerce. Tout comme le travail, le shopping se distingue lui aussi comme une expérience sociale. Le lancement de la fonctionnalité Reels, mais aussi la facilité à créer aujourd’hui une boutique sur Instagram, avec Instagram Shopping, va contribuer à faire muter l’actuelle communauté de créateurs et d’influenceurs en chefs d’entreprise. Il ne serait donc pas surprenant de voir croître les levées de fonds en 2021 pour des startups s’intéressant au "social commerce".
Travail, paiement, commerce... Trois pierres angulaires pour une nouvelle année imprévisible certes, mais stimulante. Ces différents secteurs prouvent qu’il n’est pas interdit d’être optimiste. Le lien social fait figure de cap à tenir dans cette situation sanitaire fragile. Et si la vie n’est pas encore tout à fait revenue à la normale l’été venu, l’énergie développée laisse présager le meilleur. Notre horizon, pas totalement dégagé qu’il demeure, a donc le mérite d’être bleu.
Salomon Aiach est responsable du développement Startups et Venture Capital chez Facebook France