Mise à jour d'un article paru le 10 février 2021
Le Covid-19 met les acteurs principaux de la recherche médicale française en difficulté. Tandis que Sanofi a annoncé repousser la demande de commercialisation de son vaccin à 2022, prenant du retard par rapport à la concurrence étrangère, l’Institut Pasteur a tout simplement décidé d’arrêter les frais. L’espoir d’une percée tricolore repose donc désormais sur les BioTech, qui sont nombreuses à s’emparer du sujet. Portées par le succès de leur homologue allemande BioNTech, dont le vaccin est produit par le groupe pharmaceutique américain Pfizer, elles planchent sur des candidats-vaccins avec des approches variées. Maddyness passe en revue les projets en cours, initiés aussi bien par des sociétés installées qu’émergentes.
Depuis plusieurs mois, les vaccins sont présentés comme le remède à la crise. Ils sont les garants d’une immunité collective qui permettrait, une fois un seuil critique de vaccinations dépassé, de retrouver une vie "normale". Si de premiers produits ont fait leur preuve et été autorisés sur le marché européen, à l’instar de Pfizer-BioNTech et Moderna, en rechercher de nouveaux reste une question centrale. Nombre d’experts, par exemple cités par 20 Minutes ou La Montagne, estiment que la pandémie ne sera maîtrisée qu’à partir du moment où la majeure partie de la population mondiale sera protégée. Et les seuls vaccins aujourd’hui préconisés n’y suffiront pas sur le long terme, d’où l’opportunité pour ces BioTech qui pourraient néanmoins avoir besoin de nouer des partenariats avec de grands industriels.
Celles qui sont les plus avancées
Sous le feu des projecteurs, Valneva a une longueur d’avance sur ses concurrents français. L’entreprise nantaise créée en 1999 développe un vaccin reposant sur une technologie déjà éprouvée, à base de virus inactivé. Quelque 153 adultes ont participé à un essai clinique de phases 1 et 2, dont les premiers résultats ont été rendus début avril 2021. Le vaccin a été "généralement bien toléré dans tous les groupes vaccinés et aucun problème de sécurité n'a été constaté par le comité indépendant de surveillance des données" , a précisé la BioTech. Au vu des besoins, cette dernière a choisi de ne pas attendre pour initier la production du produit. C’est là où le bât blesse : c’est en Écosse que celle-ci a lieu. Le gouvernement britannique a financé les recherches de Valneva à hauteur de 470 millions d’euros... quand son homologue français n’aurait pas accordé de subvention.
Le Royaume-Uni devrait donc, en toute logique, être prioritaire quand débutera la livraison des 60 millions de doses prévues "en avril 2022". La Commission européenne aurait également négocié avec la BioTech en vue de la fourniture du même nombre de doses. Problème : "Une étude récente a toutefois montré que si cette technologie représentait un bon booster pour les personnes primo-vaccinées avec AstraZeneca, elle ne fonctionnait pas chez celles ayant d'abord reçu du Pfizer" , a depuis indiqué à L'Express Marie-Paule Kieny, présidente du comité scientifique sur les vaccins Covid-19. Le vaccin de Valneva pourra donc être déployé dans d'autres pays, encore peu vaccinés, mais son utilisation en France en tant que rappel devrait rester marginale.
Ose Immunotherapeutics a, elle, reçu 5,2 millions d’euros en financements publics en France. Selon LCI, la société, implantée dans la région nantaise depuis 2004, s’est engagée à rembourser l’État, "éventuellement en doses". Davantage de fonds seront nécessaires au développement de son candidat-vaccin, qui restera au stade de l’étude clinique "jusqu'au premier trimestre 2022". Celui-ci se base sur une méthode qu’elle applique déjà dans le cadre de sa recherche en faveur d’un vaccin thérapeutique contre le cancer du poumon. Son avantage : le produit cible 11 protéines du Sars-CoV-2, alors que la plupart des vaccins se concentrent sur une seule d’entre elles (le spicule). La promesse d’un produit résistant à de multiples éventuels variants du virus, qui propulse Ose Immunotherapeutics parmi les plus grands espoirs tricolores.
Celles qui pourraient surprendre
Développer un vaccin résistant aux futurs variants, c’est aussi la stratégie adoptée par la Lyonnaise Osivax. Experte des maladies infectieuses, la société fondée en 2014 a utilisé l’approche qui lui a permis de mettre au point un vaccin efficace contre toutes les souches de la grippe. Elle a, pour ce faire, ciblé une protéine dite recombinante. Une partie "structurante" du virus qui est "beaucoup plus stable" , d’après ce qu’elle a avancé à Lyon-Entreprises. Bpifrance et le Conseil européen pour l’innovation ont accordé à la jeune pousse 15 millions d’euros de financements chacun, auxquels s’ajoutent une précédente levée de fonds de 10 millions, soit un total de 40 millions d'euros. De quoi prouver l'innocuité, certifiée par des tests sur des animaux "fin de l’année 2021" , du candidat-vaccin, qui n'en reste pas moins au stade de l'étude pré-clinique.
Créée en 2019 à Bourgoin-Jailleux, Aiova planche sur une nouvelle génération de vaccins à ADN en mesure de stimuler les anticorps qui s'attaquent au virus, mais aussi de générer des "cellules tueuses" pour éliminer les cellules déjà infectées par ce dernier. C’est sur la base d’une technologie issue du Laboratoire Pathogenèse et Vaccinations lentivirales (PaVal), qui est sous tutelle de l’Inrae (Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement) et de l’université Grenoble-Alpes, que la BioTech bâtit sa solution efficace "contre toutes les mutations". Si elle ne débutera son essai pré-clinique qu'à la "fin du mois de janvier" 2022 et que de nouveaux financements seront nécessaires pour mener à bien les essais sur l’homme, la jeune pousse a d’ores et déjà assuré à L’Essor que sa technique garantit "une immunité durable de 2 ans au minimum" ainsi qu"une industrialisation à faible coût".
Celles qui débutent tout juste la recherche
FlashTherapeutics revendique déjà "une approche complémentaire à celle développée par Pfizer ou Moderna". Si la BioTech toulousaine, fondée en 2005, met elle aussi au point des vaccins à ARN, elle privilégie une méthode de bioproduction plutôt que chimique. Des particules de sa conception auraient, d’après elle, "démontré leur capacité à déclencher une réponse anticorps à de faibles doses chez l’animal" dans le cadre de tumeurs chez la souris. Une expérience s’apprête à être lancée par rapport au Sars-CoV-2, puisqu’un de ses programmes a été retenu par Bpifrance – qui apportera un financement de 1,5 million d’euros. La fabrication clinique de lots de particules spécifiques sera lancée dès 2022, ce qui doit permettre à la startup de proposer un candidat-vaccin à la fin de la même année.
Fondée en 2005 à Paris, TheraVectys est issue de l’Institut Pasteur. La BioTech a bouclé le 8 février 2021 une levée de 16,5 millions d’euros pour financer l'essai clinique – qui n'a pas encore débuté depuis – de son candidat-vaccin anti-Covid, administrable par voie nasale. Cette technique permettrait, selon les résultats d’études pré-cliniques publiés dans la revue Cell Host & Microbes, de "réduire de façon drastique la charge virale dans les poumons et prévenir l’inflammation pulmonaire pathogénique". L’intérêt de ce vaccin, qui pourrait constituer une solution adéquate si le Covid-19 devait devenir une maladie saisonnière à l’image de la grippe, réside ainsi dans la "réponse immunitaire protectrice dans les voies respiratoires supérieures, à la porte d’entrée du virus" dans le corps. Ce produit agit sur l’ADN du vacciné (vecteur lentiviral).
Vous êtes une BioTech et planchez sur un projet lié au Covid-19 ? Votre témoignage nous intéresse. Contactez-nous directement via le mail suivant : [email protected]