La fatigue, le burn out et la dépression n'épargnent personne, pas même les chefs d'entreprise qui constituent pourtant le socle de leur société. Avant le Covid, la revue française de gestion affirmait que 17,5% des responsables de PME étaient menacés d'épuisement professionnel. Dans certains cas, la situation peut même aller jusqu'au suicide. Cette réalité est d'autant plus à craindre en cas de crise sanitaire et économique où la fermeture d'entreprises et de commerces entraînent une perte sèche de revenus.
Si le chômage est toujours une période compliquée pour les salarié·e·s, elle l'est également pour les ex-dirigeants qui perdent plus qu'un emploi, souvent un rêve et un statut. Pour les aider à passer ce cap parfois complexe, plusieurs associations épaulent les chefs d'entreprise qui ont besoin d'aide avant ou après la faillite, pour reprendre confiance en eux et se relancer. Le gouvernement a lui même ouvert un numéro vert pour aider les entrepreneurs qui le souhaitent, le 0 800 94 25 64, qui a permis d'accompagner plus de 3000 sociétés pendant le premier confinement.
Prendre un second souffle
Monter une entreprise est parfois un rêve ou un projet de vie. C'est en tout cas une aventure qui demande un investissement important, à la fois financer mais aussi humain. Nombre d'entrepreneurs admettent débuter leur journée très tôt et la finir dans la nuit sans parler des week-ends tronqués. Trop focalisés sur leur situation, certains peinent parfois à sortir la tête de l'eau pour prendre du recul lorsque la situation se complique. Pour éviter qu'ils se noient, Dimitri Pivot a lancé l'association Second Souffle en 2010, 4 ans après avoir lui-même fait faillite et connu cette traversée du désert. La structure propose plusieurs accompagnements dont deux parcours destinés aux dirigeants d'entreprise. La première formation, pensée pour les primo-entrepreneurs a pour objectif de les aider à savoir dans quoi ils s'embarquent. La seconde ambitionne d'aider des dirigeants en difficulté à rebondir avant qu'ils ne se retrouvent au bord du gouffre.
L'association propose également des conférences et un accompagnement individuel pour les dirigeants qui le souhaitent, qu'ils soient déjà ou risquent une procédure de liquidation judiciaire. La structure regroupe plus de 300 bénévoles, à la fois chefs d'entreprises, experts, avocats qui donnent gratuitement de leur temps.
Rebondir après la faillite
"L’échec n’est qu’une opportunité de recommencer plus intelligemment" . Cette maxime, attribuée à Henry Ford, souligne bien la notion de rebond qui gravite autour de l'échec. Si aux États-Unis, ce dernier fait partie inhérente de l'aventure entrepreneuriale et n'empêche pas d'obtenir un prêt pour monter une deuxième société, faire faillite en France ferme de nombreuses portes. L'association 60 000 rebonds milite pour faire changer le regard sur l'échec en France et accompagne les entrepreneurs dans le développement et la construction de leur prochain projet professionnel, qu'il s'agisse d'une création - reprise d'entreprise ou d'un désir de devenir salarié.
Le chef d'entreprise est accompagné pendant une période pouvant aller jusqu'à 24 mois par un coach et un parrain qui le suivent individuellement. Au-delà de ces séances, réalisées bénévolement par des entrepreneurs et des experts, des ateliers de développement personnel, des conférences et des groupes de discussion avec d'autres entrepreneurs qui ont réussi leur rebond sont organisés. L'objectif est clair : remettre aux dirigeants le pied à l'étrier en les redonnant confiance en eux.
Protéger la santé mentale des dirigeants
Pour réussir à se relever d'une faillite, il faut déjà avoir la force psychologique de le faire. La liquidation judiciaire est une épreuve qui peut parfois détruire des familles. D'après Dimitri Pivot, plus de 2/3 des liquidations se concluraient par un divorce. Confrontés à ce problème, Jean-Luc Douillard, psychologue clinicien et Marc Binnie, greffier associé du tribunal de commerce de Saintes, ont décidé de créer le dispositif Apesa pour aider ces entrepreneurs à parler et sortir de cette situation de souffrance. Apesa propose des formations aux professionnels du droit afin qu'ils puissent détecter les risques de dépression dans le comportement des dirigeants et les aiguiller vers des professionnels.
En parallèle, une équipe de près de 400 praticiens, spécialisée dans les addictions, la prévention du suicide et la médiation familiale, épaule les chefs d’entreprises qui le souhaitent. Parmi eux on trouve des patrons de PME du BTP, des artisans, des femmes dirigeantes seules avec enfants ou encore des pharmaciens, des boulangers… La structure a également publié un livret d'aide pour aiguiller les entrepreneurs.
D'autres structures comme l'association Credir offre des cadres pour aider les entrepreneurs à prévenir ou sortie d'un burn-out grâce à des ateliers, des stages ou des groupes de parole. L'essentiel est surtout de trouver le bon interlocuteur et la formule qui aideront le dirigeant à se délester de ce poids pour rebondir et débuter une nouvelle aventure.