24 septembre 2020
24 septembre 2020
Temps de lecture : 5 minutes
5 min
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Kapten joue à quitte ou double en se renommant Free Now

Un an et demi après être passé de Chauffeur Privé à Kapten, le service de VTC change à nouveau de nom. Il répondra à présent au nom de Free Now, puisqu’il rejoint la plateforme de MaaS de sa maison-mère, le constructeur automobile allemand Daimler.
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À peine un an et demi s’est écoulé depuis que Chauffeur Privé a pris le nom de Kapten. Et la plateforme de VTC, née en France et créée par Othmane Bouhlal, Omar Benmoussa et Yann Hascoet, récidive déjà, changeant à nouveau d'identité. Dans les faits, ses services vont s’imbriquer dans la plateforme de MaaS (Mobility-as-a-Service) de son propriétaire : le constructeur automobile allemand Daimler, qui l'a racheté pour 200 millions d'euros fin 2017. Depuis ce mardi 22 septembre 2020, Kapten est devenue Free Now. "L'ambition a toujours été de réunir les différentes marques et marchés du groupe sur une même application. Est-ce qu'on se doutait que ça arriverait si rapidement ? La réponse est non, nous pensions que la marque Kapten vivrait plus longtemps. Le marché des mobilités est arrivé à maturité plus tôt que prévu, ce qui a accéléré le calendrier", justifie auprès de Maddyness Antoine Lieutaud, directeur général de Free Now France.

Les exemples de Drivy ou ManoMano

Pensée comme une dénomination transitoire début 2019, Kapten avait pour but de faciliter le lancement de l'activité VTC à l’international – c'est désormais le cas, en Angleterre et au Portugal – et de casser l'image faussement premium associée à Chauffeur Privé dans l'Hexagone. Résultat des courses : deux fois plus de trajets auraient été effectués en 2019 qu'en 2018. "Ce premier changement de nom nous a été bénéfique, il a permis de capter une nouvelle population, assure Antoine Lieutaud. Instaurer un environnement de marque ne demandait pas un effort énorme en soi et nous permettait de continuer à nous développer, quand une intégration directe à la plateforme Free Now demandait un travail titanesque au niveau technique."

Joint par Maddyness, Marcel Botton, un expert du branding, qualifie le timing d'"étonnant" alors que la crise économique ne fait que débuter dans le secteur des transports. Et, ce, d’autant plus que la marque Kapten s'est imprimée dans les esprits en un temps record. Le spécialiste tempère ses propos : il pense tout de même les consommateurs s’imprégneront rapidement du nouveau nom commercial, qui permettra une synergie de groupe. "Il existe quelques précédents, relève ainsi Marcel Botton, directeur général de l’agence Nomen. L’exemple d’un des concurrents de Kapten, Voiturelib, devenu Drivy puis GetAround après son rachat, répond au même schéma." Un schéma qui serait plus commun qu'il n’y paraît.

Le premier nom d'une société est le plus souvent décidé entre fondateurs, sans conseil marketing. Alors quand les investisseurs arrivent, la société est invitée à modifier son appellation dans le but de favoriser son internationalisation – c'est d'ailleurs là l'une des expertises de Nomen, grâce à laquelle la startup monEchelle s’est notamment mutée en ManoMano. "Nous constatons aussi que les noms d'entreprises tendent de plus en plus à évoquer le bénéfice du produit ou service plutôt que de le décrire. Ainsi quand Kapten renvoyait à l’image du chauffeur, Free Now fait allusion à la liberté et à l’immédiateté de mouvement", pointe Marcel Botton.

Les clients devront télécharger une autre application

Une campagne de communication d’ampleur devra être menée pour permettre à Free Now d’imposer sa nouvelle marque. Daimler semble investir massivement dans le service, qui a donc les coudées franches. "Kapten avait su marquer les esprits lors de son changement de nom l’an dernier. Des affiches, placardées dans le métro parisien, adoptaient un ton pour le moins décalé… voire parfois irrévérencieux", se souvient Marcel Botton, optimiste. En Angleterre et au Portugal, où la migration a eu lieu dès le mois de juin, une légère perte de clients s’est faite ressentir. "Cela nous a permis d’adapter des choses pour la France. Nous n’avons pas de crainte majeure, car nous sommes à l’aise avec notre parcours utilisateur", affirme Antoine Lieutaud, indiquant que les clients seront toutefois obligés de télécharger une autre application que celle qu'ils possèdent déjà pour continuer à utiliser le service de VTC.

Un enjeu européen d'exister face à Uber et Bolt

L'intégration de Kapten à Free Now constitue une étape importante pour Daimler, qui anticipe une bascule des ventes de véhicules, des particuliers aux entités de partage de moyens de transports. De quoi anticiper la fin d'un modèle de société articulé autour de la voiture individuelle. "C'est très intelligent. En mettant la main sur Chauffeur Privé, ils ont mis des moyens financiers substantiels pour acquérir des clients. Ils ont pu s'insérer plus facilement dans un marché où Uber et Bolt, un Estonien financièrement soutenu par le géant chinois Didi, se livrent une sacrée bataille, confie un fin connaisseur du marché, qui souhaite conserver l'anonymat. On a besoin d'un concurrent européen sérieux. Quelle tristesse si on se retrouve à terme avec le seul Américain qui écrabouille la concurrence."

L'acquisition du service de VTC a permis au constructeur automobile de créer sa propre galaxie de services, dont les appellations sont petit à petit uniformisées. Au-delà de Free Now, sa solution d’autopartage Car2Go a été rebaptisée ShareNow. Une identité commune, à l’image de ce que peut faire EasyJet avec les services EasyBus ou encore EasyVoyage. C’est sur cette stratégie que l’Allemand mise pour relancer son business, alors que le chiffre d’affaires de son activité VTC a dégringolé avec la crise sanitaire, pour tomber à 7 % des revenus habituels lors du confinement du début d’année. Remonté par paliers successifs, il s'est depuis stabilisé à 80 %. "La faute au manque de vie nocturne", selon Antoine Lieutaud. Une difficulté qui ne devrait pas disparaître dans l'immédiat, puisque le ministre des Solidarités et de la Santé, Olivier Véran, vient d'annoncer un renforcement des consignes sanitaires pour endiguer la reprise épidémique – les bars et restaurants devront notamment fermer à 22h dans les grandes villes, dès le lundi 28 septembre.

La marche paraît encore bien haute pour que Free Now France atteigne les (nombreux) objectifs fixés pour 2021 : devenir rentable en passant de 3 à 4 millions de clients et atteignant les 30 % de parts de marché. Pour ce faire, l’application sera rendue disponible à Bordeaux et à Lille au début de l’hiver.

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Légende photo :
Camille Froment / FreeNow