28 août 2020
28 août 2020
Temps de lecture : 6 minutes
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Tech.gouv fait le bilan de sa première année

En mai 2019, la DINUM (direction interministérielle du numérique) lançait Tech.gouv, un ambitieux programme d’amélioration des compétences numériques du service public. Cette première année de développement, frappée par le Covid, permet de dresser un bilan mitigé. Les progrès sont là mais de nombreuses difficultés demeurent.
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Malgré la volonté affichée du président de la République de moderniser les administrations, le numérique peine encore parfois à s'imposer dans les administrations. Le classement sur la performance numérique des États de l’UE réalisé par la Commission européenne plaçait la France au quinzième rang en 2018. Un échec auquel le gouvernement a voulu répondre grâce à Tech.gouv. Le programme, doté d’une enveloppe de 23 millions d’euros (2019-2020), est le bras armé de la transition numérique des services publics français. Nadi Bou Hanna, directeur interministériel du numérique revient sur cette première année, influencé par le Covid-19. 

France Connect en passe d’élargir ses compétences 

Dédié aux citoyen·ne·s et aux membres de la fonction publique, Tech.gouv ambitionne de faciliter l’accès à l’information et aux outils de performance. Parmi les premiers chantiers engagés, on trouve celui de l’identité numérique (IDNUM) des Français·es. Afin de simplifier l’accès aux comptes (impôts, CAF, assurance maladie), la DINUM a souhaité mettre en place un système fédérateur permettant d’accéder à tous ses comptes grâce à un seul et unique identifiant. Le système, nommé France Connect, est passé de 12 à 17 millions d’utilisateurs en 2020. L’objectif final “est de faire monter ce chiffre à 25 millions d’utilisateurs en 2022 et 100 millions de connexion annuelle”.

En parallèle, l’équipe de la DINUM s'attaque à un autre chantier : “associer France Connect à des fournisseurs privés (location de voiture, location immobilière, éducation) afin d’offrir la possibilité aux utilisateurs de se connecter via cet identifiant et non par Facebook ou Google ID”. À  travers ces initiatives, le gouvernement marque clairement son ambition de devenir l’ambassadeur de la protection des données face à des GAFAM aux pratiques décriées.

Data et cloud, la France peine encore à assurer sa souveraineté

Autre grand chantier porté par le gouvernement, celui de la data, qui constitue le critère de base pour établir des stratégies politiques et économiques mais aussi calculer la performance des projets. “Concernant le partage d’informations, les administrations accusent encore des retards” dans certains domaines. Tech.gouv s’efforce donc d’inculquer et de créer les outils nécessaires pour “la collecte des données, leur qualification et leur partage” entre les différentes administrations et le public. Certaines API ont déjà été ouvertes pour permettre ce type d’échanges et d’autres plateformes de partage entre l’État et les collectivités seront mises en oeuvre début 2021.

Autre vecteur de la souveraineté du gouvernement, son projet de cloud, lancé en juillet 2018 et censé être déployé sous trois ans. “Ce projet se divise en trois cercles internes. Il a commencé à être déployé dans le premier (celui des administrations) au sein des services du Premier ministre et de la DGSI”, souligne Nadi Bou Hanna. 

La rétention des talents, un vrai problème pour le gouvernement

Le gouvernement fait aussi face à une pénurie de talents, à la fois en raison de leur rareté mais aussi de sa lenteur. Un rapport publié en février 2020 par la Cour des comptes révèle que “le délai de recrutement dans l’administration est de 14 mois minimum pour les titulaires et 11 mois pour les contractuels. Ces délais ne sont pas adaptés à un marché en tension. Ils laissent peu de chance face à la concurrence du secteur privé qui peut recruter les jeunes 15 jours après leur diplôme” , conclut le rapport.

Nadi Bou Hanna nuance ce propos, parlant, lui, de “quatre mois en moyenne”, un délai encore trop important vu l’état du marché. Pour pallier ces difficultés de recrutement, Tech.gouv prévoit, via le programme TALENT, d’attirer les experts et des étudiants grâce à des défis sur lesquels ils pourront travailler plusieurs mois. À la fin de leur mission, un poste pourra leur être proposé dans une administration. Un coup d’accélérateur sera également mis sur l’apprentissage et la promotion des métiers du numérique auprès des étudiants via une grande campagne de communication et l’organisation d’un salon de l’IT public. 

La loi sur la transformation publique du 7 août 2019 ouvre également la voie à plus de souplesse. “Les membres de la fonction publique pourront bientôt quitter le public pour travailler durant 5 ans dans le privé et revenir dans le public sans perdre les avantages de leur carrière” , explique Nadi Bou Hanna. 

Le projet commando UX vise, quant à lui, à recruter des développeurs et des designers à temps plein sur une période de quatre mois afin de répondre à des besoins précis. Au final, la stratégie de la DINUM sur cette question est d’intégrer les services publics comme une étape dans une carrière."Il faut s'aligner sur les salariés proposés par la concurrence" , reconnaît le directeur de la DINUM.

Le Covid met en avant les manques

En imposant le télétravail, le Covid-19 a mis en avant les difficultés rencontrées par les entreprises face au numérique et a joué un rôle d’accélérateur en obligeant parfois les salarié·e·s à adopter de nouveaux usages. Depuis le confinement, les fonctionnaires sont plus de 160 000 à utiliser Tchap, “l’équivalent Whatsapp du gouvernement contre 70 000 auparavant. Nous pensons atteindre les 200 000 d’ici la fin de l’année” , explique Nadi Bou Hanna. 

Au-delà de cette réussite, cinq chantiers prioritaires ont émergé du confinement : 

  • Faire monter en puissance les plateformes de l’État déjà capables d’accueillir 150 000 conférences par jour. L’objectif est de réduire les risques de dépendance à des tiers comme Zoom ou Google Meet. 
  • Créer un sac à dos numérique permettant aux fonctionnaires d’accéder à un bouquet de services (audio-conférence, messagerie, transfert de documents), “ce qui est loin d’être le cas aujourd’hui”
  • Constituer et déployer une brigade d’intervention numérique. Cela nécessite d’identifier toutes les forces en présence au sein des administrations et des ministères pour les mobiliser sur des projets prioritaires. 
  • Éclairer les décisions publiques par la donnée. 
  • Inclure plus de diversité au sein des profils choisis, en variant les bassins d’emploi et en travaillant sur les femmes et le numérique. Actuellement, 30% des effectifs de la DINUM sont féminins. 

La stratégie d’investissement et d’organisation de la politique numérique du gouvernement commence (enfin) à se structurer. En 2020, la France s’est dotée “pour la première fois d’un pilotage financier des projets numériques. Auparavant, chaque ministère gérait ses investissements, sans bénéficier d'une d'ensemble des chantiers en cours” , reconnaît le directeur de la DINUM. Malgré ses avancées, les chantiers demeurent nombreux. Amélie de Montchalin, ministre de la Transformation et de la Fonction publique devrait bientôt présenter les prochains grands auxquels s'attellera la France sur le numérique.

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