Tribunes par Guillaume Rigal
27 juillet 2020
27 juillet 2020
Temps de lecture : 12 minutes
12 min
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Entrepreneur.e : faut-il vous lancer sur les Linkedin stories ?

Linkedin est le dernier des grands réseaux à se lancer dans les stories. Alors que ce format fait désormais partie de notre quotidien aussi bien personnel que professionnel, le plus grand réseau social professionnal se lance dans la danse. Avec succès ?
Temps de lecture : 12 minutes

Ce lancement fait suite à un fort teasing sur le format stories depuis plusieurs mois, mais le produit à sa sortie reste assez basique. Une grande partie de la communauté Linkedin et des power users attendaient quelque chose de plus puissant, et nul ne sait si le jeu en vaut la chandelle : alors faut-il vous lancer ? Chez Kannelle, on pèse le pour et le contre dans la perspective d’adapter le format vertical dans notre app de création vidéo.

Alors résumons la situation. Voyons ce que vous pouvez faire aujourd’hui avec les stories Linkedin ainsi que les limitations. Et nous terminerons par quelques conseils pour les braves parmi les braves qui souhaiteraient se lancer.

Linkedin stories, sur mobile...seulement

Tout d’abord les stories sont uniquement accessibles sur mobile. Ce choix du mobile-only est dommage : pour un service plutôt axé business, c’est limitant car nous sommes certainement beaucoup à accéder à Linkedin lorsque nous bossons sur notre ordinateur - pour checker une société, un contact, des jobs etc. À titre de référence, Facebook permet de créer et consulter des stories sur sa version web en desktop.

En attendant que Linkedin étende la fonctionnalité au desktop, soyez conscient·e que vos stories ne seront visibles que par 57% des membres. Important si votre cible est plutôt grand compte/desktop

Une visibilité compliquée à apprécier

Sur l’application mobile, on a un positionnement sur du “real estate” fort intéressant : tout en haut, juste sous la barre de recherche. Donc bien visible. Par contre, la liste de stories disparaît dès qu’on scrolle dans le feed (que l’Académie Française me pardonne cette phrase). Cette visibilité est donc très limitée, à l’ouverture de l’app.

Le look de la barre Stories s’inspire d’Instagram mettant en avant les photos de profil. Il m’aurait paru plus judicieux de choisir le format de Facebook qui inclut un aperçu photo de la story en plus de la photo de profil. Ceci aurait donné plus de visibilité aux stories et surtout plus envie de cliquer.

La barre stories sur l’app mobile Linkedin (c’est un peu vide, vous ne trouvez pas …?)

Côté branding personnel, c’est intéressant : si vous publiez une story, votre photo de profil se retrouve dans cette liste horizontale “à la Insta” qui, deux semaines après son lancement en France, était aussi peuplée que le désert de Gobi. Si vous publiez, il y a donc de fortes chances que vous apparaissiez en haut de l’app pendant 24h, dès qu’un de vos contact l’ouvre.

Tiens, les contacts reviennent ! A l’heure de l’apéro ?

Au passage, si vous n’aviez pas soigné votre photo de profil auparavant, voici une raison de plus de le faire.

Une visibilité éphémère

Alors que la page profil est un élément essentiel de Linkedin, il n’est pas possible d’ancrer ses stories sur son profil pour le moment. Une story Linkedin est donc éphémère comme un snap. A moins d’avoir une audience massive qui se connecte quotidiennement, votre story passera comme un bateau dans la nuit.

À noter : un mois après le lancement officiel en France, les stories sont enfin disponible pour les pages entreprise.

Une durée trop limitée

Même si Linkedin nous a gratifié de 20 secondes, soit 5 secondes de plus qu’une story Instagram, cela reste un format trop limitant, surtout en B2B. Même Tiktok, qui a du contenu business et marketing (eh oui !), permet d’aller jusqu’à 60 secondes.

Certes, si votre propos nécessite plus que les 20 secondes imparties, vous pouvez enchaîner les stories, mais ce n’est pas très pratique pour un usage pro. De ce fait, les Linkedin stories risque d’être cantonnées aux annonces de webinars qui sont foison en ces temps de post-confinement. Et au vu des résultats, peu de marketers et community managers risquent d’adopter cette tactique durablement.

Une création trop B2C et pas interactive

Outre la limite de temps, une caractéristique majeure des stories sur Instagram et consorts, c’est la possibilité d’ajouter des stickers, d’utiliser des filtres, de tagger des hashtags et mentionner d’autres profils. Et enfin d’avoir une multitude de call to actions comme les sondages.

Pour faire bref, sur Linkedin stories, point de fioriture de ce côté là : cette première version est en dessous du minimum syndical. Et la préférence n’a pas été donnée à des outils pour les pros.

Oui, il y a des stickers, mais ils ne répondent pas à un objectif business sur un réseau où personnal branding et marque employeur sont primordiaux. Il s’agit de la même liste de stickers que Linkedin nous pousse à utiliser lorsque l’on poste un contenu photo ou vidéo. “Just another day at the office”, tout est dit.

Enfin, alors même que Linkedin a lancé les sondages comme type de post, ceux-ci sont absents : impossible de poser une question et d’obtenir la réponse via une story. Un bel exemple d’intégration manquée, surtout que tous les réseaux le proposent. Dommage.

Contre toute attente, les sondages marchent sur Linkedin. Mais pas dans les stories.

Des mentions, mais pas trop

Dans vos stories, vous pourrez mentionner d’autres membres, mais point faire de liens vers le profil du ou de la membre citée. Et vous ne pourrez mentionner ni page entreprise, ni vous-même.

Impossible de mentionner une page entreprise. Oui, vous avez bien lu. Sur Linkedin, le réseau pro. Certes ceci limite l’auto-promotion à outrance, mais au prix de toute promotion. Et soyons clairs, l’auto-promotion (de soi ou de sa boîte), est l’essence même de ce réseau, pour le meilleur et pour le pire.

Dans la même logique, impossible de se mentionner soi-même. Il faudra que l’audience clique sur la photo de profil en petit en haut à gauche si elle veut pouvoir donner une suite à une story. C’est bien dommage car c’est le seul moyen aujourd’hui de pousser l’audience vers le contenu intéressant mentionné.

Où sont les liens ?

Paraphrasons Patrick Juvet maintenant (non, on ne recule devant rien) : Où sont les liens ? Avec leur utilité pleine de charme… Où sont les liens ? les liens, les liens...

Il est possible d’ajouter une petite bulle de texte à sa story, et on peut bien sûr écrire une URL ou un hashtag mais ceux-ci ne seront pas cliquables. Pire, s’il venait à l’utilisateur ou l'utilisatrice la pulsion irrépressible de cliquer sur un élément, il se trouverait immédiatement éjecté de la story en cours. Trafic perdu deux fois donc : pas de clic vers votre destination et fin prématurée de visionnage… Idem pour le swipe up.

Cette absence limite les possibilités. Même pour promouvoir votre prochain webinar, vous devrez inclure un lien bitly au sein de votre vidéo et poser un cierge en invoquant Isidore de Madrid, saint patron des laboureurs.

Note : Inclure un bouton reminder pour le prochain webinar, de la science fiction ? Demandez à Instagram…

Si les influenceur·se·s Instagram peuvent inviter leurs contacts à leurs events numériques...

Des vidéos de faible qualité, sans filtre

Que vous choisissiez d’utiliser la caméra avant ou arrière de votre smartphone ou que vous uploadiez votre vidéo en 1080px, cela n’aura aucune incidence sur la qualité : elle est assez médiocre du fait d’une certaine compression côté Linkedin. Encore une fois, pour un réseau où il est question d’image professionnelle et de personal branding, c’est bien dommage. Et pour aggraver le problème, les stories Linkedin sont comme les Gitanes, c’est-à-dire sans filtre.

Là où Insta ou Snap nous habituent à nous voir au top de notre forme, Linkedin nous laisse l’apparence de managers défraîchis, sortis tout droit d’un data center sans fenêtre, d’un cube gris orienté cage d’escalier ou d’un mois de parenting de triplés toddlers en télétravail... Alors que nous avions investis dans une photo professionnelle pour notre profil. 

Sérieusement, Linkedin ?

Attention, les stats aussi disparaissent !

Pénultième point, et non des moindres, Linkedin nous avait annoncé la possibilité de voir quels membres avaient visionné nos stories. Et la fonctionnalité est là, avec un compteur, mais il vous faudra être rapide et organisé pour bénéficier de ces informations. Au bout de 24 heures, vous ne pourrez plus y avoir accès - ceux qui se souviennent des informations qu’il était possible d’avoir sur ses posts il y a quelques années voient de quoi on parle ici.

Donc, astuce importante : si vous postez une story, mettez-vous immédiatement un reminder pour le lendemain 15 minutes avant l’heure où vous avez posté pour accéder à vos statistiques et consulter qui a vu votre story. Sinon, il ne vous restera plus qu’à appeler votre cartomancienne préférée.

Où est la musique de film ?

Il ne s’agit pas de suggérer à Linkedin d’imiter Tiktok et ses challenges de chorégraphie avec la musique qui va avec - même si un challenge choré en équipe c’est très sympa. Mais quel bonheur ce serait d’avoir un fond musical. Et encore mieux avec de la musique de film - vous voyez, le genre qui va avec le grand discours de Mel Gibson dans Braveheart ? En attendant, vous pouvez utiliser Kannelle qui vous permet d’ajouter votre musique de fond simplement (désolé pour cette promotion éhontée).

Les conseils Kannelle pour vous lancer sur les stories Linkedin

Si les précédentes remarques ne vous ont pas échaudé·e et que vous souhaitez vous faire une place au soleil du haut de page de Linkedin (sur mobile), voici quelques conseils à suivre :

1. Travaillez votre story

Vous l’aurez compris le champ des possibilités est bien restreint sur LinkedIn Stories. C’est pourquoi vous devez à tout prix miser sur votre contenu. Oubliez les call to action, les mentions etc. pour le moment.

Votre contenu doit être autosuffisant tant dans le fond que la forme !

Shootez avec votre application habituelle et importez ensuite dans l’app Linkedin. Cela vous permettra d’ajouter votre branding (logo, cadre coloré), des sous-titres (le son est coupé par défaut), un fond musical (si la personne lance le son), et un peu de texte avec un call to action (type URL, de présence en bitly).

2. Soyez succinct

20 secondes, c’est le laps de temps dont vous disposez pour chaque Linkedin Story. Oui, c’est court et donc un défi. Vous avez plusieurs options : adapter votre discours pour respecter ces 20 secondes ou découper votre story en plusieurs clips. Cette  deuxième option n'est optimale ni pour vous, ni pour votre audience : les vidéos sont saccadées, certains mots peuvent être coupés… Bref, un travail supplémentaire et chronophage !

Le mieux reste de respecter ces 20 secondes. Attention, pensez à couper avant d’uploader : au delà, Linkedin refusera votre contenu et vous ne pouvez pas réduire dans l’app Linkedin !

3. Postez régulièrement et en simultané sur votre feed

Prévoyez de poster tous les jours, voire de reposter le même contenu. Rassurez-vous, vu le peu de vues relatives pas story, cela ne devrait pas poser de problème. Aussi, n’hésitez pas à poster également le même contenu dans votre feed si vous voulez booster sa visibilité, en faisant attention au format : le format vertical pour la vidéo passe mal dans les post du feed.

4. Perfectionnez vos visuels

La qualité des stories sur Linkedin n’est pas franchement au rendez-vous en raison de la compression appliquée par les serveurs de Linkedin: sur-saturation, dégradation etc. Bye bye 4K et  1080p.

Pour le moment, la seule solution si l’on souhaite s’éviter l’effet rouge “oops j’ai oublié la crème solaire”, c’est le noir et blanc. Passez un filtre “gomme” qui non seulement effacera les rougeurs et sur-saturations mais donnera aussi un effet premium, légitime à votre vidéo, et convertissez en noir et blanc. Et voilà. On vous dirait presque de créer vos stories vidéo dans Instagram. Mais chut.

Rappel : n’oubliez pas qu’il n’y a pas de preview sur vos stories, une raison de plus pour soigner votre photo de profil. Souriez, vous êtes filmé, bon plutôt photographié !

Enfin, si vous vous filmez en selfie (format le plus approprié à une story Linkedin), cadrez correctement en laissant assez de place en haut et en bas, sans être trop proche de la caméra. À l’aide d’un pied si vous n’avez pas le bras long ou une stabilité contrariée.  Alignez votre regard au tiers de l’écran, et faites en sorte que votre visage occupe à peu près la moitié de la hauteur.

5. Tentez le format “diaporama”

Pour toutes les raisons citées au dessus, la vidéo peut-être un vrai casse-tête dans les stories Linkedin. Essayez une approche diaporama : postez plusieurs images d’affilé, en utilisant toujours le même format et en découpant votre message. Cette méthode marche assez bien sur Instagram, puisqu’en général, l’audience est intriguée et veut connaître la suite. Encore faut-il proposer un contenu adapté à Linkedin et engageant. Less is more : Misez sur un contenu minimaliste qui met en avant votre message sans passer par quatre chemins

Vous savez désormais tout sur les stories sauce Linkedin.Il ne vous reste qu’à vous lancer en pariant que Linkedin investit sur le long terme en développant et en mettant en avant cette fonctionnalité. Après tout, les stories sont devenues des formats pérennes et populaires sur Snapchat, Facebook et Instagram ; il serait étrange que la greffe sur un réseau B2B ne prenne pas, surtout si Linkedin corrige les petits manquements de départ.

La principale question pour vous est de savoir si le jeu en vaut la chandelle. Développer des contenus spécifiquement pour les stories Linkedin est un peu compliqué car la fonction est limitée, et demande qu’on y passe un peu de temps. Au vu des audiences actuelles, c’est un risque. Mais ces stories Linkedin sont aussi une opportunité bienvenue de se démarquer professionnellement et de se créer une place dans une nouvelle niche peu exploitée.  À vous de jouer !

Guillaume Rigal est le CMO de Kannelle

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